La Liturgie, Gloire de Dieu, sanctification de l'homme Mgr Guido Marini.
Ce livre nous rappelle le pontificat de Benoît XVI, son exquise humilité, sa pensée si subtile et si profonde en même temps, son souci permanent du beau du vrai et du bien. Il serait intéressant d'étudier la portée de ces pontifes dits «de transition» et de voir en quoi ils ont été bien plus important que d'autres qui auront régné plus longtemps. Mais cela est du ressort de la Providence. Ce texte est imprégné de la vision ratzingérienne de la foi toute entière centrée sur le Christ et sur la liturgie qui en est le cœur et l'expression la plus parfaite.
Il est divisé en 5 parties; I: La liturgie, itinéraire de l'âme vers Dieu, II: La Liturgie sommet de la vie de l’Église, III: Entrer dans le mystère célébré à travers les rites et les prières, IV: Le langage de la célébration liturgique, V: Sainte liturgie et piété populaire.
Ce livre est rédigé par Mgr Guido Marini qui fut le cérémoniaire du pape Benoît XVI et qui l'est encore du Pape François. Mais la liturgie n'est pas une préoccupation de pape François. Chaque pape apporte une pierre à l'édifice pour le plus grand bien de la sainte Église et le salut de âmes. Il faut simplement souhaiter que ce qui est entrepris par l'un ne soit pas détruit par un autre. Il en va de la crédibilité de l’Église.
Au cœur de ce livre il y a toute la vision que le pape émérite a de la liturgie et de son lien intime avec la foi « lex orandi-lex credendi ». L'action eucharistique est redéfinie comme elle l'a été tout au long de l'histoire très mouvementée de l’Église, depuis St Paul, les désormais très célèbres « premières communautés chrétiennes », st Augustin soi-même, naturellement Grégoire le grand et sa célèbre réforme éponyme sans oublier plus près de nous Pie XII, l'immortel auteur de Médiator Dei dont le texte de Vatican II Sacrosanctum Concilium s'inspirera avec bonheur.
Le cœur de l'acte liturgique selon Benoît XVI, le sens de l'«ars celebranda» est bien de se tourner vers le Seigneur. La participation active doit être entendue au sens spirituel et le concept de silence sacré y est réitéré. Bref la messe n'est pas le lieu où les équipes liturgiques se font plaisir mais le moment durant lequel Dieu est glorifié et l’âme sanctifiée. Le cœur de l'action liturgique reste l'adoration. C'est à dire l'acte par lequel l’âme se tourne vers son Seigneur.
Si la liturgie est « la source et le sommet » de la vie de l’Église et des fidèles ainsi que Vatican II l'a affirmé, dans la fidélité à la tradition et selon l’herméneutique de la continuité, véritable planche de salut pour l’Église, alors la plus grande importance doit être accordée au respect des normes liturgiques de l’Église. Car il n'est permis à personne de disposer de ce mystère, à sa guise et selon son caprice créateur. Car c'est le Christ qui s'offre à nouveau au Père en présence de l'Esprit, pour sauver le Cosmos. La vision de Benoît XVI s'étend à toute l'humanité mais plus encore à toute la création.
Parmi les grands combats menés par Benoît XVI, il y eût la demande pressante d'inciter les catholiques à communier à genoux et de recevoir la communion directement sur les lèvres. "Que personne ne mange cette chair sans l'avoir d'abord adoré; nous pécherions si nous ne l’adorions pas" rappelle St Augustin. Ce qui veut dire très clairement qu'il faut s'agenouiller avant de communier.
Un autre grand combat de Benoît XVI fut celui du latin. Il est courant aujourd’hui d'entendre des propos négatifs sur le latin à tous les niveaux hiérarchiques de l’Église depuis la dame d’œuvre nouvelle formule, ambiance je fais des études de théologie, en passant par le jeune prêtre qui se fait tutoyer par toutes les femmes de sa paroisse à grand renfort d'embrassades qui n'en finissent plus, et, en bouquet final, l'acharnement épiscopal qui n'en voit nullement la nécessité. On connaît aussi la rengaine sur le latin trop européo-centré et qui empêche les peuples de se sentir eux-mêmes. Question : les missionnaires des premiers siècles jusqu'à ceux du XIX éme siècle inclus, comment ont-ils convertis des peuples entiers au Christ en disant la messe en latin ? Et le coup de la langue morte aussi. La langue officielle de l’Église reste le latin, langue de la renonciation de Benoît XVI, langue de l'édition originale de l’exhortation apostolique de Pape François. Par ailleurs, l'Etat d’Israël n a-t-il pas fait ressusciter une « langue morte » l’hébreu ?
Finalement, quel est le bilan liturgique de Benoît XVI ? Il peut se résumer dans cette assertion que l'on peut retrouver en page 34 de l'opus :
"Si, dans la liturgie n'apparaissait pas au premier plan la personne du Christ, …. nous n'aurions plus la liturgie chrétienne dépendante du Seigneur et soutenu par sa présence créatrice".
Laissons la conclusion à Jean Paul II dans Ecclesia de Eucharistia :
"L'Eucharistie est toujours célébrée en un sens sur l'autel du monde". "C'est vraiment là le mysterium fidei qui se réalise dans l'Eucharistie: le monde sorti des mains de Dieu créateur, retourne à lui après avoir été racheté par le Christ".
Bref, ce court exposé est fondamental, car il est nécessaire pour un catholique d'être en mesure d'adorer son Dieu au cours de la messe. Et de comprendre en quoi la liturgie lui est indispensable pour cela.
«Le culte du veau d’or n’est pas une apostasie ouverte mais cachée, subtile, elle tient à ce que le peuple ne supportait plus que Dieu soit invisible, lointain mystérieux, elle veut le ramener au tangible, à son niveau ; un tel culte n’élève plus vers Dieu, il le place au-dessous de lui, le manipule ; c’est un culte engendré par un sentiment de toute puissance, la communauté s’autocélébre dans une banale autosatisfaction. Le récit du veau d’or est comme un avertissement contre tout culte arbitraire et égocentrique.»
(Benoît XVI, L’esprit de la liturgie, ch. 1).