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Médias : Désinformation

“La mission du journaliste est d’entretenir le politiquement correct”

Dans Minute, Joël Prieur analyse l'ouvrage d'Ingrid Riocreux sur les médias (La langue des médias. Destruction du langage et fabrication du consentement, éd. du Toucan). Extraits :

M"[… Dans la langue des médias, Ingrid Riocreux n’hésite pas à faire un sort à tout ce qu’il faut bien appeler des fautes. Elle sort son crayon rouge, et nous, nous sourions. Fautes dans le maniement de la tournure interrogative : « Vous qui êtes un ancien ministre, est-ce que ces mesures vous ont-elles satisfaites ? » (même mon correcteur orthographique n’est pas d’accord). Pléonasmes : « C’est Free – l’opérateur téléphonique – qui a d’abord dégainé le premier. » Répétitions fastidieuses qui révèlent un vocabulaire limité : « Nous suivrons les suites de cette affaire. » Sans compter les emplois incohérents : « Un bilan annuel sera rendu tous les deux ans » ou mal assurés : « La soi-disant théorie du genre » (Il faut dire « la prétendue théorie du genre ». Le genre ne parle pas ; il ne dit rien de soi).

Mais là bien sûr n’est pas l’essentiel de la critique. Simplement un galop d’essai, pour montrer qu’on possède parfaitement cet instrument redoutable qu’est une langue vraiment choisie. Le plus important, en effet, ce n’est pas la grammaire, mais la rhétorique, avec d’abord tout ce qu’elle révèle de pré-pensé non-dit : « Ce non-dit ne résulte pas d’une manière de cacher ou d’arranger la réalité. C’est tout l’inverse : ce non-dit est tel, précisément parce que du point de vue du journaliste, il constitue une évidence incontestable, la seule vérité possible, bref le coeur du dogme. » S’agit-il nécessairement, comme le pensent certains spécialistes de la désinformation, de cacher une partialité de gauche derrière un discours convenu qui sera aussi un discours attendu ? Pas forcément. Ingrid Riocreux ne fait pas de politique. Pour elle, ce « non-dit » des médias (« on nous cache tout, on ne nous dit rien ») représente une condition indispensable à l’ordre social : « La mission du journaliste est peut-être, qu’il le veuille ou non, d’entretenir le politiquement correct, de s’assurer en permanence que les masses communient au mensonge qui les maintient dans une forme de paix même provisoire, même incertaine et fragile, mais en tout préférable à la guerre civile. » « Le Journaliste (comme l’écrit souvent notre auteur) se doit-il de chercher la vérité ? Il est probable qu’exactement à l’inverse, sa mission consiste à l’édulcorer suffisamment pour la rendre acceptable par tous. » Le mensonge est le moyen ordinaire de cette oeuvre de paix sociale. […]"

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