Partager cet article

Histoire du christianisme

La musique des sphères célestes

D’Aurelio Porfiri, éditeur et écrivain catholique italien, pour le Salon beige:

Un grand philosophe comme le Romain Boèce (480–524), que l’Église catholique compte parmi les saints, a formulé des réflexions très importantes sur la musique. Il a dit qu’il existe trois types de musique : mundana, humana et instrumentalis.
La musique mundana est celle produite par l’harmonie des sphères célestes ; la musique humana est celle générée par l’harmonie des mouvements de l’âme ; tandis que la musique instrumentalis est celle produite par le son des instruments.
Cette tripartition a eu une importance décisive surtout au Moyen Âge, et je crois que nous devrions, nous aussi, la reprendre d’une certaine manière pour mieux comprendre la musique sacrée.
Pour Boèce, la musique instrumentalis était la moins importante. En 1619, Kepler publie un texte intitulé Harmonices Mundi, dans lequel il analyse les rapports numériques et musicaux créés par l’harmonie des sphères célestes. Ces rapports, ainsi que les mouvements de l’âme, produisent une musique peut-être inaudible, mais qui se situe à un niveau bien plus élevé que celle produite par les instruments. Le musicologue Claudio Casini, dans son Histoire de la musique de l’Antiquité classique au XXe siècle, explique ainsi cette tripartition :
« En ce qui concerne les liens avec la pensée pythagoricienne fondamentale, on doit à Boèce une classification qui connut un grand succès au Moyen Âge : la musique est divisée en mundana (produite par les vibrations de la gravitation universelle), humana (innée dans l’âme humaine), et instrumentalis (produite avec des instruments, donc extérieure). Et il est évident que la musique instrumentalis n’a aucune valeur si elle ne correspond pas à la musique humana et, indirectement, à la mundana. »
Ainsi, la musique instrumentalis ne peut être autonome. Elle dépend des manifestations de la musique plus élevées et, en même temps, plus profondes.
Et comment ne pas appliquer tout cela à la musique pour la liturgie, la forme la plus haute de l’expression musicale, car elle est tournée vers Dieu ?
Je crois vraiment qu’il est profondément regrettable que nous ne comprenions plus que la musique que nous devons entendre à l’église n’est pas simplement une “activité”, mais un être en présence de la Présence. Si nous ne retrouvons pas ce sens profond du faire musical, nous sommes exclus de l’expérience spirituelle que la musique pour l’Église doit et peut nous offrir.
La musique sacrée ne nous mène pas seulement du naturel au surnaturel, mais semble accomplir cette opération décrite par Michel-Ange, qui pensait que la sculpture était déjà contenue dans le bloc de pierre, et que l’artiste devait seulement comprendre ce qu’il fallait retirer pour la libérer.
Ainsi, dans l’expérience de la vraie musique sacrée — et non celle, corrompue, que nous entendons dans trop de nos liturgies — se cache le Deus absconditus, ce Dieu qui semble parfois jouer avec nous, se révélant d’abord, puis se voilant à nouveau.
Nous devons redécouvrir cette fonction fondamentale de la musique sacrée, qui n’est pas seulement importante, mais — oserais-je dire — essentielle.

Partager cet article

Publier une réponse

Nous utilisons des cookies pour vous offrir la meilleure expérience en ligne. En acceptant, vous acceptez l'utilisation de cookies conformément à notre politique de confidentialité des cookies.

Paramètres de confidentialité sauvegardés !
Paramètres de confidentialité

Lorsque vous visitez un site Web, il peut stocker ou récupérer des informations sur votre navigateur, principalement sous la forme de cookies. Contrôlez vos services de cookies personnels ici.


Le Salon Beige a choisi de n'afficher uniquement de la publicité à des sites partenaires !

Refuser tous les services
Accepter tous les services