Dom Philippe Piron est moine bénédictin à l’abbaye Sainte-Anne de Kergonan, à Plouharnel (56), depuis 1984. Il est abbé depuis novembre 2001. Il est l'auteur de la méditation de La Neuvaine en la fête du Coeur Immaculé de Marie.
« Ce saint en herbe, ce saint en germe, c’est vous, c’est moi »
O Dieu qui a préparé dans le Cœur de la bienheureuse Vierge Marie une demeure digne de l’Esprit Saint, accorde-nous par son intercession, de devenir le temple de ta gloire.
C’est avec cette prière toute simple mais si profonde que l’Église nous fait entrer dans la célébration de la mémoire du Cœur immaculé de Marie. Il est heureux de noter également que cette mémoire suit immédiatement la solennité du Sacré-Cœur, comme pour nous montrer le lien si intime et si précieux qui unit le Cœur de la Vierge à celui de son divin Fils. Comment nous en étonner quand, avec toute la tradition, nous vénérons la Vierge comme la fille bien-aimée du Père, la mère immaculée du Fils, l’épouse très fidèle du Saint-Esprit !
Une telle magnificence de grâce chez la Vierge était en quelque sorte nécessaire pour la préparer à sa mission exceptionnelle de Mère de Dieu. Il lui revenait d’engendrer et d’offrir au monde le Fils de Dieu lui-même et il convenait, à cet égard, qu’elle soit pleine de grâce, immaculée dès sa conception.
C’est pourquoi, avec une immense confiance, nous nous tournons vers la Vierge Marie pour notre pays la France, nous souvenant également que depuis le Vème siècle, depuis Clovis et saint Rémi, la France est la « Fille aînée de l’Église » et que depuis le vœu de Louis XIII, le 10 février 1638, la France est solennellement consacrée à la Vierge Marie en sa glorieuse Assomption. Fils et filles de cette noble terre de France, nous avons donc, presque par nature si l’on peut dire, un lien particulier qui nous unit à l’Église, et une grâce spécifique qui nous place sous la protection particulière de la Vierge Marie.
À l’image de Marie, nous sommes invités à entrer toujours plus avant dans cette intimité exceptionnelle avec notre Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit. Nous sommes invités, selon les mots d’Isaïe (54, 2) à élargir l’espace de notre tente, à déployer sans hésiter la toile de notre demeure, c'est-à-dire à dilater notre cœur, pour y accueillir, à notre tour et selon notre mode propre, Jésus, l’hôte divin, qui vient nous visiter si régulièrement et si réellement, dans la liturgie, les sacrements, tout particulièrement l’eucharistie, mais aussi dans la lecture de la Bible (la lectio divina), ou encore dans nos rencontres fraternelles, amicales ou même inattendues.
Avec l’Esprit Saint dont elle est comblée, Marie vient vous aider dans votre vie de foi. Elle vient nous apprendre à être attentifs à ce que nous dit le Seigneur. Elle nous invite à nous laisser conduire par lui et, comme aux serviteurs des noces de Cana, elle nous dit : Tout ce qu’il vous dira, faites-le (Jn 2, 5). Au cœur du monde et de la vie, au cœur du combat spirituel que nous devons mener, Marie nous encourage et nous soutien. N’ayez pas peur, nous dit-elle, n’ayez pas peur d’être des amis de Jésus, des amis de Dieu, c'est-à-dire n’ayez pas peur d’être des saints.
Les saints, sauf la Vierge Marie bien sûr, ne sont pas des êtres parfaits, sinon il n’y en aurait pas, car homme ou femme, nous sommes tous pécheurs, c’est notre nature. Cela ne veut pas dire que nous n’ayons rien à faire. Le saint est celui qui, à l’école de la Vierge Marie et à l’écoute du Saint-Esprit, a choisi son but ultime. Il sait où il veut aller. Même s’il tombe, même s’il a parfois l’impression de ne pas y arriver, il persévère, il est fidèle dans ses choix. Il demande pardon à Dieu de ses fautes et de ses péchés, il demande pardon à ses frères qu’il a pu offenser, et confiant dans la miséricorde de Dieu, dans l’amour de Dieu pour lui, dans l’amour de ses frères, il se relève et continue son chemin, en s’appuyant toujours plus fortement sur la grâce de Dieu.
Le saint est celui qui a pris conscience qu’il est aimé de Dieu, et qui veut répondre à cet amour. Le saint est toujours en chemin, il croit, il espère, il est heureux et émerveillé de l’amour de Dieu pour lui, de l’amour de son conjoint, de l’amour de son frère, de l’amour de ses parents, de l’amour de ses enfants…
Le saint est celui qui sait aussi se taire et prier et qui fait silence dans le fond de son cœur pour y écouter le murmure de Dieu qui lui dit sans cesse : « Je t’aime ! ».
Le saint est celui qui aime Dieu en aimant ses frères les hommes et de ce fait, le saint est toujours solidaire des joies, des espérances, des souffrances et des épreuves de ses frères et sœurs en humanité. Le saint a le cœur en feu et désire rendre l’humanité incandescente de joie et de bonheur.
Ce saint en herbe, ce saint en germe, c’est vous, c’est moi, c’est nous tous, qui, à l’école de la Vierge Marie et à l’écoute du Saint-Esprit, désirons nous laisser aimer par Dieu et voulons aimer nos frères les hommes.
Ce sont des saints, des fils de Marie, dont la France a besoin. Ce sont des saints, des fils de Marie, dont la « Fille aînée de l’Église » à besoin ! N’ayons pas peur d’être des saints.
O Dieu qui a préparé dans le Cœur de la bienheureuse Vierge Marie une demeure digne de l’Esprit Saint, accorde-nous par son intercession, à nous qui sommes ses enfants, de devenir des fils dans le Fils, des fils du Père, des amis de Jésus et des temples de ta gloire !