Tribune de Jean-Frédéric Poisson pour Le Salon beige :
« Je le dis avec toute ma conviction : l’avortement doit rester l’exception, l’ultime recours pour des situations sans issue. Mais comment le tolérer sans qu’il perde ce caractère d’exception, sans que la société paraisse l’encourager ?[1] »
Voici la question que posait Simone Veil le 26 novembre 1974 devant l’Assemblée nationale dans son célèbre discours ouvrant l’accès à l’interruption de grossesse. Que les choses ont changé depuis ! Plus de quarante-cinq ans plus tard, force est de constater que l’avortement n’est plus l’exception, mais la norme, qu’il n’est plus question de le tolérer, mais de l’encourager. En votant cette loi, ce jour-là, les mains tremblantes et à raison, les parlementaires entourant Simone Veil ouvraient une brèche et provoquaient une rupture majeure dans notre civilisation qui s’est toujours fait un devoir de protéger la personne humaine de sa conception à sa mort naturelle. C’est ce qu’ils avaient ignoré à l’époque en œuvrant pour un projet de loi motivé par des soucis pragmatiques. Mais les bonnes intentions ne suffisent pas toujours. Ce premier pas n’aurait jamais dû être franchi.
Aujourd’hui, avec cette nouvelle loi proposée par madame Gaillot, adoptée par l’Assemblée nationale et en cours de discussion au Sénat, notre société s’éloigne toujours plus de notre fil civilisationnel. Elle s’éloigne même, alors que la plupart des progressistes s’en revendiquent volontiers, de l’état d’esprit qui a motivé le discours de Simone Veil dans l’hémicycle en 1974. Ainsi est-il question de rallonger les délais légaux d’accès à l’interruption volontaire de grossesse de douze à quatorze semaines[2]. Présenté comme un progrès social, ce rallongement barbare acte définitivement le passage d’une conception tragique de l’avortement comme ultime recours – conception qui dominait initialement – à une conception égoïste, dans laquelle l’enfant à naître frustre la volonté individuelle de jouir de la vie sans entrave. Car, à quatorze semaines, même en période de pandémie, la femme ne souhaitant pas mettre d’enfant au monde a eu le temps de prendre les dispositions adéquat auparavant. Simone Veil déclarait :
« Aucune femme ne recourt de gaieté de cœur à l’avortement. Il suffit d’écouter les femmes. C’est toujours un drame et cela restera toujours un drame ».
Madame Gaillot et ses acolytes l’ignorent visiblement, puisqu’ils nous présentent cet allongement comme une conquête et l’IVG comme un droit fondamental. Elles invisibilisent ainsi les millions de femmes souffrant psychologiquement des suites de ces interruptions.
En revenant aux origines de cette légalisation, on perçoit tragiquement le fossé qui nous sépare des parlementaires de l’époque : alors que l’esprit de la loi initiale « interdit l’incitation à l’avortement par quelque moyen que ce soit » car « cette incitation reste inadmissible », nous avons basculé peu à peu vers une loi qui interdit la critique de l’avortement. Et la proposition de loi de madame Gaillot enfonce le clou puisque doit être supprimée la double clause de conscience spécifique à l’IVG. Pour Simone Veil, la dissuasion était pourtant une condition sine qua non de la légalisation de l’avortement :
« si le projet qui vous est présenté tient compte de la situation de fait existante, s’il admet la possibilité d’une interruption de grossesse, c’est pour la contrôler et, autant que possible, en dissuader la femme. »
Aujourd’hui, dissuader est devenu un délit. La loi actuelle prévoit même, depuis 2017, un délit d’entrave à l’avortement puni de deux ans d’emprisonnement et de 30.000 euros d’amende. Le discours moral s’est inversé.
Même Emmanuel Macron, chantre du progressisme reconnaît être opposé à cette proposition. Dans une interview accordée au magazine Elle le 1er juillet 2021[3], il mettait en avant, et à raison, « le traumatisme que c’est pour une femme d’avorter ». Il est à craindre, à l’inverse, que certains parlementaires Républicains ayant juré allégeance à madame Pécresse se rallient à la majorité progressiste et adoptent cette loi, conformément à l’état d’esprit de leur candidate – ce qui prouvera à nouveau, s’il en était encore besoin, que les véritables forces conservatrices du pays n’ont plus rien à faire chez LR voué à disparaître ou à fusionner avec En Marche !. Pour finir sur une note d’espoir, pensons à la jeunesse qui se lève dans ce combat et laissons une dernière fois la parole à Simone Veil :
« Les jeunes générations nous surprennent parfois en ce qu’elles diffèrent de nous ; nous les avons nous-mêmes élevées de façon différente de celle dont nous l’avons été. Mais cette jeunesse est courageuse, capable d’enthousiasme et de sacrifices comme les autres. Sachons lui faire confiance pour conserver à la vie sa valeur suprême. »
Aujourd’hui, les jeunes générations luttent à nos côtés pour cette valeur suprême. Voilà pourquoi nous les attendons nombreux à la prochaine Marche pour La Vie le dimanche 16 janvier 2022.
Jean-Frédéric Poisson
Président de VIA | la voie du peuple
[1] « Discours de Simone Veil en 1974 à l’Assemblée nationale », BFM TV, le 30/06/2017.
[2] « Proposition de loi visant à renforcer le droit à l’avortement », Senat, le 01/12/2021.
[3] « Brigitte Macron, Simone Veil, Joséphine Baker… Emmanuel Macron nous dit pourquoi ‘elles comptent’ », Elle, le 01/07/2021.
TontonJean
IVG: Interruption d’une Vie Génante.
14e Semaine: Le Placenta est formé; les muscles de bébé se développent; Le systeme digestif commence à fonctionner; par biographie nous pouvons voir si bébé est un garçon ou une fille; son coeur bat en moyenne 140 pulsations à la minute. Bébé mesure 20 cm.
Voilà ce que nos députés veulent tuer.
lavergne21
je trouve que JFP envoie bien des fleurs à Simone Veil . Ses “concessions” n’étaient-elles pas pour qu’une minorité de la droite vote le texte ?