De Jacques Bichot sur Liberté politique :
"Il y a environ un siècle, l’un des « grands ancêtres » du mouvement familial, Simon Maire, lança le slogan «les familles créancières de la nation» […] : en élevant leurs enfants, les parents rendent des services à l’ensemble des citoyens, si bien que la communauté leur est redevable. Pour l’essentiel, la politique familiale ne relève donc pas de l’assistance, mais de l’échange. Ceux qui n’ont pas d’enfant, ou n’en ont qu’un, ont besoin des enfants des personnes plus fécondes : sans elles, ils n’auraient pas grand chose pour vivre après l’arrêt de leur activité professionnelle. Mais l’équité consisterait-elle à tout recevoir sans rien donner ?
Dans un rapport du Conseil d’analyse économique, Évelyne Sullerot et Michel Godet indiquaient le coût en 2001 des enfants confiés à une famille d’accueil (1 250€ par mois) et à un établissement (2 500€ par mois). On peut compter aujourd’hui, neuf ans plus tard, environ 1 500 et 3 000€. Cela donne une idée de ce que représente l’apport des parents qui s’occupent eux-mêmes de leurs enfants. 1 500€ par mois pendant 20 ans, cela fait 360 000 €, le prix d’un logement en province. […]
Bien entendu, les personnes qui appartiennent aux 2 ou 3 % des ménages français les plus riches n’ont pas « besoin » d’allocations familiales. Ils n’ont pas non plus « besoin » de la gratuité scolaire pour envoyer leurs enfants à l’école, ni de la gratuité des soins pour ces enfants. Mais ils n’ont pas davantage « besoin » de la totalité de leurs salaires, des loyers des appartements qu’ils donnent en location, des dividendes des actions qu’ils possèdent, des intérêts qui leur sont servis sur leurs assurances-vie et leurs livrets d’épargne. Pourquoi les partisans de la mise sous conditions de ressources des allocations familiales ne demandent-ils pas la mise sous conditions de ressources des revenus de placements, et des salaires ?
Parce qu’ils creusent un fossé entre l’économique et le social. Il y aurait d’un côté un mécanisme purement redistributeur, la Sécurité sociale, faite pour prendre aux uns parce qu’ils sont à l’aise et donner aux autres parce qu’ils le sont moins, et de l’autre des mécanismes d’échange. Mais c’est inexact ! La Sécurité sociale est un lieu d’échange. Elle comporte certes une certaine dose de redistribution, mais son rôle principal est d’organiser une part importante des échanges non marchands. Ces échanges sont aussi vitaux pour le bien-être et la dignité des êtres humains que ceux qui s’opèrent sur les marchés. Il n’y a pas lieu de les opposer.
Si l’on ne comprend pas cela, ce qui est hélas le cas d’une partie des hommes qui se mêlent ou se sont mêlés de gouverner, on fait du système de protection sociale une sorte de cancer qui parasite l’économie d’échange, et on essaye (vainement) de donner de petits coups de lime à ce corps étranger dont le développement étouffe l’économie. Vouloir mettre les allocations familiales sous conditions de ressources, c’est proposer l’une de ces limitations minuscules et inefficaces d’un système que la sottise des hommes politiques a rendu désuet, et dont l’obsolescence croissante conduit la France – et bien d’autres pays développés – à l’impotence."
lama12
Bravo à Evelyne Sullerot et à Michel Godet, du Conseil d’analyse économique !
Malheureusement, l’idéologie antifamiliale continuera de faire ses ravages…Et les comités, conseils, et autres groupes d’études, continueront à proliférer !
Mais restons positifs : un article du New York Times (repris par le Figaro) nous apprend que “l’an dernier, la France a dépensé plus de 5% de son PIB sur sa politique familiale”.Ce chiffre fait prendre l’état français, comme un “état généreux”. Si ce sont les américains qui le disent !
Quant à l’ONU, il a établi le classement des enfants par femme en 2005-10 : USA 2,09 France 1,89 Suède 1,87 GB 1,84 Europe 1,50 Espagne 1,43 Italie 1,38 Allemagne 1,32.La France est considérée comme une “nation féconde”. Si c’est l’ONU qui le dit !