Tugdual Derville, délégué général d’Alliance VITA et l’un des porte-parole de La Manif pour tous, analyse la réussite des grandes marches parisiennes et bordelaises du dimanche 5 octobre 2014. Extraits :
"La question de fond que nous posions depuis octobre 2012 est désormais placée au centre du débat politique, et pour longtemps. C’est un immense résultat. Nous avons mis la France devant le choix anthropologique qui constitue l’enjeu de société majeur de notre temps : au-delà de la loi Taubira et de ses conséquences que nous contestons toujours, il s’agit de savoir si la procréation humaine doit obéir aux lois d’un marché ultralibéral mondialisé, ou si l’intérêt de l’enfant nécessite la préservation de la famille, écosystème de base de toute société, et de l’enfant contre toute marchandisation.
Grâce à la ténacité paisible de nos manifestants, ce débat est enfin reconnu comme sérieux au sein de chaque grande famille politique. Ces derniers temps, plusieurs prises de position et appels au gouvernement émanant de la gauche, de mouvements féministes et même d’écologistes comme José Bové, ont finalement légitimé notre dénonciation de la marchandisation du corps. […]
Aucun parti, aucun syndicat, aucun autre mouvement n’a jamais réussi à organiser sur trois années civiles six immenses défilés pacifiques, chacun d’ampleur historique. L’immense mouvement social déjà foisonnant, né de la résistance à la loi Taubira, est désormais installé dans le paysage politique français. C’est à mes yeux le point de départ de l’alternative culturelle que nous préparons, avec des échéances à court, moyen et long terme… sur lesquelles nous devons peser.
Vous assumez donc une posture politique ?
Oui. Et qui fait réellement preuve de sens politique, au sens noble du terme. Sans doute notre constance, notre cohérence et notre altruisme tranchent-ils avec la versatilité égotique qui marque les joutes partisanes. Au fil des années, la parole de nombre des chefs de partis s’est décrédibilisée. Ces paroles ne résonnent qu’à court terme parce qu’elles ne sont pas fondées sur des convictions. […]
Pensez-vous que votre mouvement social offre réellement cette vision dont la France a besoin ?
Je crois même qu’avec ce qui se passe en France naît un nouvel espoir dans le monde. Les mouvements de nombreux pays, constatant le réveil de ce que je nomme « l’âme de la France », nous le disent. Les tribus gauloises — et j’embrasse par cette expression l’accumulation des identités particulières qui forgent notre nation aujourd’hui — apparaissaient comme désordonnées, au regard du centralisme démocratique qui ne veut voir qu’une tête. En réalité, ce foisonnement est le signe d’une créativité, d’une générosité, d’un courage et d’un esprit de rébellion propres à notre nation.
Quand le pouvoir bascule dans la toute-puissance, quand il s’arroge le droit de transgresser des lois fondamentales, un vent de révolte se lève toujours dans notre pays. La contestation fait partie de nos gènes. […]"