Michel de Poncins critique l'annonce de la prime de 1000 euros dans son bulletin du 2 mai :
"Le projet d'une prime de 1000 € accordée aux salariés à cause de la distribution de dividendes est une véritable farce à la française telle que le pouvoir dirigiste, interventionniste et pour tout dire socialisant nous en offre régulièrement le spectacle. […] D'abord, c'est la promesse d'une nouvelle usine à gaz malodorante à souhait. Les journaux écrivent carrément : «les contours de la prime se dessinent» ce qui annonce une effroyable complexité et «il parait que l'on procède aux derniers réglages du dispositif». […] Il est question d'un seuil de 50 salariés en dessous duquel le système ne s'appliquerait pas sinon d'une façon volontaire et au-dessus duquel le système interviendrait : les entreprises connaissent déjà, pour d'autres raisons, ce seuil de 50 salariés qui les obligent à des gymnastiques juridiques pour ne pas le franchir et qui se surajoute à d'innombrables autres seuils. Obligation légale ou pas ? S'il n'y a pas d'obligation légale, il y aura des incitations fiscales ou sociales mettant un désordre supplémentaire dans le paysage fiscal et réglementaire déjà aussi obscur qu'une forêt vierge.
Si le projet voit le jour, ce que personne ne sait à présent, il s'ajoutera à au moins deux systèmes déjà formidablement compliqués d'intéressement et de participation aux bénéfices, auxquels le monde économique avait fini par s'habituer. Il va être nécessaire de raccorder tout ces ensembles : le raccord inévitable entre les usines à gaz conduit à de véritables galaxies. Nous avons souvent signalé l'ouragan des lois avec leurs dépendances en décrets-loi, circulaires et contentieux qui assassinent littéralement l'économie française et le fonctionnement de la vie nationale. À l'ouragan s'ajoute des temps interminables d'attente car l'on ne sait jamais par avance exactement comment l'ouragan se déclenchera et de quelle façon. Des centaines ou des milliers d'entreprises sont dans l'incertitude actuellement du fait de ce nouveau projet : l'effet de freinage de l'économie est évident.
A ces inconvénients majeurs s'ajoute d'autres calamités d'importance. D'abord, volontairement, le pouvoir diffuse l'idée de la lutte des classes en se faisant le propagandiste d'un partage des profits prétendument plus équitable que d'autre ; or les gens commencent, lentement certes, à savoir que le capital et le travail sont étroitement liés dans un processus continu, l'un n'existant pas sans l'autre. L'emploi va forcément souffrir car il n'y a rien de pire en la matière que l'incertitude des entreprises. L'investissement va évidemment être touché : pourquoi un Français ou un étranger se risqueraient-ils à investir des fonds pour des gains hypothétiques dans un pays qui, ayant déjà un code du travail monstrueux, se permet des coups inattendus et ponctuels giclants tout soudain ? […] Faut-il ajouter que les adeptes de la lutte des classes qui se choquent des profits des entreprises du CAC 40 omettent de dire que celles-ci font leurs profits à l'étranger, ne laissant en France que le minimum d'activités et ceci pour échapper précisément à l'enchainement des «dispositifs» fous du type de celui qui s'avance."
TDK1
Quand on sait que, malgré le développement de leurs résultats, seulement 24 groupes sur 40 offrent une rallonge de coupons à leurs actionnaires, qu’il y en a 3 qui proposent le même dividende en dépit de leurs très bons résultats, (France Télécom, Total et Vivendi) qu’il y en a même un, (Alcatel-Lucent) qui ne verse pas un centime, je me suis dit au départ que c’était archi pipeau. Mais voilà, la prime a été annoncée comme pérenne. Et ça, ça change la donne. Ce que vous pouvez faire un an ou deux sans conséquences graves, vous ne pouvez pas le faire pendant 10 ans. Forcément cela va entraîner le départ des entreprises. Tenez, prenez par exemple la comparaison entre Danone et Peugeot : Avec à peine 8% de salariés français, Danone laissera dans cette histoire un chèque de 9 millions d’euros. PSA qui est un gros employeur de l’hexagone verrait en revanche son bénéficie amputer de 9% par la mesure. Ce sont ceux qui emploient le moins en France qui y gagneront. Imaginez ce à quoi cette mesure imbécile va les inciter…..
Voici ce que j’écrivais le 21 avril dernier sur le sujet:
http://maviemonargent.info/2011/le-president-sarkosy-a-tranche-ah-bon-et-quoi-exactement/
Bernard Mitjavile
Derrière cette mesure on voit une dénonciation démagogique des actionnaires supposés recevoir des dividendes mirifiques. Or si l’on considère l’évolution du CAC 40 par rapport à celui de l’immobilier en France au cours des 10 dernières années, on voit qu’il est bien plus intéressant et moins risqué d’avoir placé ses économies dans une bicoque sur l’île de Ré que d’investir dans des entreprises françaises. Ce n’est pas avec ce genre de démagogie que l’on va aller vers un capitalisme populaire ou développer une plus grande participation nationale face aux fonds de pension internationaux dans les fleurons de notre industrie..
François
Mettez aussi des propos de personnes se positionnant pour cette mesure, s’il vous plaît. c’est trop facile de suivre le climat ambiant en critiquant la moindre mesure une fois en se mettant dans le camp des gd patrons, une autre en se mettant dans le camp des plus démunis… Merci d’être objectif, vous avez un réel impact sur les lecteurs et vous le savez!
[Intéressant comme commentaire…
Trouvez-nous plutôt un propos qui réponde aux objections de M. de Poncins. MJ]
Nicolas
Il y a néanmoins quelque chose d’intéressant dans cette mesure : si les syndicats y sont opposés, y compris les syndicats patronaux, c’est avant tout parce que les entreprises vont pouvoir verser de l’argent à leurs employés sans que les systèmes sociaux monopolistiques co-gérés par ces mêmes syndicats ne prélèvent leurs cotisations, contributions, et autres taxes para-étatiques. C’est sans doute une toute petite brêche, mais l’opposition remarquablement inargumentée qu’elle déclenche semble très parlante.