"Quelques jours après la libération de cette petite ville de 60 000 habitants, au printemps 2014, certains étaient déjà de retour dans leurs maisons parfois détruites, souvent pillées. Le père Georges se souvient d’avoir entendu des paroissiens lui affirmer qu’une statue de la Vierge pleurait dans la petite chapelle située juste à côté de l’historique cathédrale Constantin-et-Hélène.
Le lendemain, des enfants viennent le trouver en courant : la Vierge pleure à nouveau. « J’ai vu une larme au coin de ses yeux, et la Vierge rayonnait d’une lumière éclatante, cela a duré 48 heures », explique le père devant cette statue redevenue de pierre, qui continue pourtant à attirer chaque jour de nombreux pèlerins chrétiens et musulmans.
Quelques maisons plus loin, un père de famille brandit son portable et montre une photo de la statue prise alors qu’elle pleurait : « C’étaient des larmes de joie parce que les enfants de Yabroud commençaient à revenir », commente-t-il après avoir montré de multiples photos de sa maison détruite par des tirs d’obus mais rapidement reconstruite « pour ne pas laisser [les terroristes] gagner » .
Le père Georges est plus prudent sur la signification de ces larmes : « Nous nous sommes demandés quel pouvait être le message de la Vierge… Pleurait-elle à cause de la souffrance des Syriens ? Sans doute. De joie parce que ses fils revenaient ? Sûrement… Nous ne pouvons savoir, mais nous avons choisi de la mettre à l’honneur et de lui confier à nouveau notre paroisse », précise-t-il, fier [d'avoir installé, le 8 septembre dernier, une nouvelle statue de la Vierge] dans la cour d’une église contre laquelle les djihadistes s’étaient acharnés.
« La Sainte Vierge n’a cessé de nous protéger pendant cette guerre, elle ne cesse de nous rappeler que nous sommes ses enfants, si nous détournons notre regard, nous perdons l’espérance », confie une jeune mère de famille revenue s’installer dès la libération de la ville. Cette [nouvelle] statue est donc un remerciement, une manière de résister et un encouragement pour tous ceux qui sont revenus mais qui continuent malgré tout à souffrir d’une guerre interminable."