La Montagne revient sur cette page d'histoire :
"Les pèlerins étaient encore nombreux pour les cérémonies de l'Assomption au Puy-en-Velay, cette année. Tous ont rendu hommage, comme le veut la tradition, à la Vierge noire. Une statue, objet aujourd'hui encore de toutes les dévotions, mais qui n'est qu'une effigie couronnée depuis 1856.
Dans les premières années de la Révolution, la déchristianisation va progressivement se mettre en marche. Dans une France où la religion constitue un socle important de la vie quotidienne, le choc est brutal.
Le christianisme est combattu farouchement : interdiction du culte, fin des fêtes religieuses, prêtres arrêtés ou assassinés… Le Puy-en-Velay, haut lieu de pèlerinage depuis le V e siècle, n'échappe pas à la règle. La ville doit par exemple appliquer la fermeture des églises, fin 1793. Les sans-culottes viellent à faire respecter ces lois anticléricales et les plus fidèles, condamnés à prier dans la clandestinité, craignent les représailles.
En janvier 1794, la Vierge noire est enlevée de la Cathédrale. Selon les documents d'époque, ses ornements précieux lui auraient été retirés avant qu'elle ne soit consignée aux archives municipales.
Le dimanche 8 juin de cette même année a lieu la fête nationale. Hasard ou non, elle tombe le jour de la révolue Pentecôte. Louis Guyardin, envoyé de la Convention nationale en Haute-Loire, décide pour toute festivité de faire un autodafé des reliques du christianisme sur la place du Martouret.
Devant une foule que les récits rapportent nombreuse, avec la guillotine à quelques pas – bien sollicitée ces derniers mois –, les flammes viennent alors réduire en cendres livres, tableaux, vêtements et autres, pourvu qu'ils soient en lien avec le christianisme. Clou de ce drôle de spectacle, la Vierge noire est amenée « dans un tombereau brimbalant et crotté de l'éboueur », explique l'auteur Roger Briand, dans son livre très documenté Les mystères de Haute-Loire (Editions De Borée – 2011).
Les insultes fusent en direction de la statue de bois de cèdre tant priée des siècles durant. Un premier coup de sabre vient abîmer le visage de la Vierge noire. Malgré les efforts de quelques lettrés pour éviter l'irréparable, la statue est jetée au feu.
Sous les yeux des badauds, l'objet de bois de cèdre se consume peu à peu. L'histoire rapporte qu'un parchemin enroulé serait sorti de la statue mais aurait… aussitôt été dévoré par les flammes. De quoi s'agissait-il ? Ce document aurait-il permis de connaître l'origine exacte de l'objet ? Impossible à dire. La Vierge noire est partie avec ses secrets en ce jour du 8 juin 1794. […]"