Lu sur Sandro Magister :
"Après Scola à Milan, voici Chaput à Philadelphie. Pas à pas, les nominations décidées par Benoît XVI remodèlent les instances dirigeantes dans les pays phares du catholicisme mondial. […] La nomination de Charles J. Chaput comme archevêque de Philadelphie, rendue publique aujourd'hui, est un nouveau pas en avant dans la démarche entreprise par Benoît XVI pour remodeler conformément à ses idées les instances dirigeantes de l'Église catholique aux États-Unis, comme cela a déjà été fait dans d'autres pays. […] Avec cette nomination de Chaput à Philadelphie, siège qui est traditionnellement honoré du chapeau cardinalice, les principaux postes de l'épiscopat des États-Unis sont de plus en plus solidement occupés par des hommes très en accord avec les idées du pape Joseph Ratzinger, qui les connaît et les estime. On se bornera à citer, parmi eux, l'archevêque de New-York, Timothy Dolan, et celui de Los Angeles, José H. Gómez, qui est un grand ami de Chaput. Depuis l'automne dernier, Dolan est également président de la conférence des évêques des États-Unis. Pour son élection, les votes qui s'étaient précédemment portés sur Chaput lui-même ont été déterminants au moment du vote final."
A Sandro Magister, Mgr Chaput déclare :
"Les catholiques ont très largement contribué à modeler l'Amérique, depuis Charles Carroll – le seul signataire catholique de la Déclaration d'Indépendance – jusqu'à aujourd'hui. Mais cela n'a pas été facile. L'Amérique n'a jamais été vraiment à l'aise avec le contenu de la foi catholique. Le courant majoritaire des Américains a eu tendance à accepter les catholiques en raison inverse du sérieux avec lequel ils vivaient leur foi. Il existe évidemment un grand nombre d'exceptions à cette règle, mais elle est encore trop souvent vraie.
Q : Et en politique ?
Particulièrement en politique. Robert Casey, le gouverneur de Pennsylvanie aujourd'hui disparu, est l'un des hommes que j'admire le plus. Le pays pourrait employer beaucoup plus d'hommes et de femmes catholiques comme lui dans le service public.
L'archevêque de New-York Timothy Dolan, qui est également président de la conférence des évêques catholiques des États-Unis, est habituellement très présent dans les médias. Vous-même, vous intervenez par écrit, en participant à des débats et même en affrontant les autorités politiques. En Europe ce comportement serait qualifié d'“ingérence” de l'Église et il provoquerait des protestations.
L'Europe a été modelée, partiellement, par les Guerres de Religion et aussi par ces héritages de la Révolution française que sont son anticléricalisme et sa méfiance fondamentale vis-à-vis de la religion. C'est un poids du passé que la plupart des Américains ne comprennent pas. La Révolution Américaine a été un phénomène différent et elle a eu lieu dans un contexte profondément chrétien et protestant. Beaucoup des Pères Fondateurs étaient eux-mêmes chrétiens. John Courtney Murray a fait un jour remarquer que même lorsque les Américains ne sont pas croyants, leur absence d'intérêt est amicale. L'hostilité aiguë envers la religion que l'on trouve en Europe est étrangère à l'Amérique. Ou, tout du moins, elle l'était encore récemment.
Q : Par comparaison avec l'Europe, les États-Unis paraissent beaucoup plus religieux. Est-ce vraiment le cas ? Ou bien le désert de l'incrédulité y gagne-t-il également du terrain ?
Si l'on se fie aux apparences, c'est vrai. D'une manière générale, les Américains sont beaucoup plus enclins à la foi religieuse que les Européens. Mais ce n'est pas seulement une apparence. Des millions et des millions d'Américains prennent vraiment leur foi au sérieux et ils pratiquent sincèrement leur christianisme. On ne peut pas vraiment comprendre les États-Unis si l'on ne tient pas compte de leurs racines influencées par le christianisme. Cependant il y a, dans le caractère des Américains, un pragmatisme, un fond de matérialisme et d'instinct de possession, qui agit contre l'Évangile. C'est pour cette raison que beaucoup d'Américains ont l'habitude d'avoir une croyance sans se rendre compte de ce qu'elle implique et sans laisser leur foi modeler véritablement leur vie. […] Aux États-Unis, le catholicisme a toujours été une foi d'immigrants, une foi de minorités. C'est ce qui explique à la fois sa vigueur et sa très forte volonté de s'assimiler et de s'intégrer. La culture américaine a une aptitude extraordinaire à homogénéiser et à assimiler les nouveaux venus. Ce n'est pas quelque chose de tout à fait mauvais. Les États-Unis sont fondamentalement une nation d'immigrants. Mais cela peut donner comme résultat une population dont les croyances perdent de leur vigueur."
Sur ce même sujet, voir aussi les posts de Daniel Hamiche, le spécialiste français du catholicisme aux Etats-Unis.