La Commission a adopté aujourd’hui un "ensemble de mesures de grande envergure", concernant notamment les conditions d’expulsion des clandestins. Les lecteurs du Figaro, s’ils se fient à cet article un peu ahurissant, seront persuadés que par ces mesures Bruxelles "encourage les expulsions de clandestins" :
"La Commission européenne (…) n’a pas l’intention de mettre des bâtons dans les roues des États membres qui emploient la manière forte contre les immigrés clandestins, au contraire. Elle encourage les expulsions rapides et vante les mérites des centres de rétention pour étrangers : un message de fermeté adressé aux millions de clandestins installés dans l’Union européenne."
Et l’article de citer les mesures proposées… qui, découvre-t-on avec stupeur, rendront les expulsions plus difficiles. La Commission veut ainsi imposer aux états un minimum de quatre semaines entre l’ordre d’expulsion et l’expulsion elle-même, afin de laisser au clandestin la possibilité souvent illusoire de quitter le territoire de son plein gré. Et elle veut fixer une limite supérieure, de six mois, à la période de détention des clandestins internés.
Les mesures proposées par la Commission émanent en ligne directe de recommandations clairement immigrationnistes du Conseil Economique et Social Européen (ici, pdf, p58) datant de décembre 2002.
Le dirigeant du Parti conservateur britannique au Parlement européen ne s’y trompe pas : ces mesures entraveraient les efforts de son pays contre le terrorisme.
La Grande-Bretagne doit être libre d’agir contre les extrémistes qui attisent la haine et incitent au terrorisme. Je crains que les projets de la Commission n’entravent notre capacité à protéger nos citoyens.
Les droits de la société doivent être pleinement pris en compte, au même titre que les droits de l’individu. Un système qui lie les mains des gouvernements au moment où ils sont confrontés à cette menace sans précédent serait une victoire pour les terroristes.
La Commission doit se rendre compte de la nature de cette menace. L’Europe ne devrait pas avoir à attendre une nouvelle atrocité pour avoir la flexibilité dont elle a besoin pour répliquer.
En France, un préfet peut actuellement procéder à des arrêtés de reconduite à la frontière, exécutoires en une dizaine de jours en cas de recours par le clandestin (voir ici, Ch.3 ). Ces dispositions, qui n’empêchent déjà pas que seule une décision de reconduite sur cinq soit exécutée, seraient encore affaiblies si la règle des quatre semaines voulue par la Commission était adoptée.
Les propositions de la Commission devraient, pour être adoptées, être retenues par le Conseil de l’Union européenne, constitué de représentants des exécutifs européens.