Dans Un Champ de ronces, Bernard Béhaile raconte l'histoire d'un homme rachetant une entreprise, qui est escroqué par le vendeur avec la complicité des banques et de la justice. Ruiné il décide de se venger. Extrait :
"- Je connais vos convictions, et je les respecte ! dit l'adjudant-chef avec fermeté. – Mais n'oubliez pas qu'elles doivent rester dans votre sphère privée, ne pas sortir de votre appartement : elles n'ont rien à faire avec notre mission !
– Je n'en suis pas si sûr, répondit doucement l'adjudant. – Je sais que nous en avons déjà parlé, mais comment peut-on imaginer qu'un chrétien puisse laisser sa foi sous son oreiller, le matin, à côté de son pyjama, et attendre le soir pour la retrouver et la mettre en pratique ? C'est une aberration intellectuelle grossière que de penser cela ! Et une tromperie que de le dire tout haut, et de nous y encourager ! Est-ce qu'un médecin catholique, qui défend la vie, peut laisser sa foi chez lui, passer sa journée à pratiquer des avortements et la retrouver le soir, comme s'il ne s'était rien passé ? Est-ce qu'un chef d'entreprise, qui essaie de mettre en pratique la doctrine sociale de l'Eglise dans son entreprise, peut laisser ses convictions chez lui et travailler sans elles ? Et l'avocat, qui s'attache, au nom du serment qu'il a prêté, à distinguer le bien et le mal, est-il imaginable qu'il laisse sa foi au vestiaire quand il enfile sa robe noire ? Et le pêcheur qui part sur les bancs de Terre-Neuve pendant plusieurs mois, n'aurait-il plus le droit de placer une statue de la Vierge à côté de sa bannette ? […] Plus généralement, la morale élémentaire qui encadre tout ce que nous faisons, travail, vie sociale, vie associative, vie familiale, et qui est d'essence chrétienne, faut-il la laisser sous l'oreiller ? On voit bien ce qu'il advient quand on laisse sa foi chez soi ; il suffit de regarder l'état de notre pauvre pays ! Alors, moi je pense que quand un homme politique affirme qu'il laisse ses convictions religieuses au placard, chez lui, quand il fait de la politique, soit c'est un menteur, ou un irréaliste, soit c'est que ses convictions sont trop faibles pour lutter contre son appétit de pouvoir, sa soif d'honneurs et de gloire, dont la conquête passe par l'emploi de tous les moyens, surtout ceux que notre morale réprouve !"