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Europe : politique / Immigration / Pays : Allemagne

L’Allemagne va-t-elle enterrer le traité de Schengen ?

L’Allemagne va-t-elle enterrer le traité de Schengen ?

Ils ont beaucoup critiqué Jordan Bardella durant les dernières campagnes électorales, estimant que remettre des contrôles aux frontières était impossible. C’est exactement ce que se prépare à faire l’Allemagne.

Gérard-François Dumont, Professeur à Sorbonne Université, président de la revue Population & Avenir et auteur de Géographie des populations, déclare dans Le Figaro :

Premièrement, l’Allemagne annonce qu’elle ne veut plus accueillir de  migrants en situation irrégulière , ce qui est un point non négligeable. L’effet d’annonce est d’autant plus significatif que les mesures prises sont concrètes, telles que la suppression de l’aide aux demandeurs d’asile ayant déposé un dossier dans un autre pays de l’Union européenne. S’il est vrai que le contrôle réel de toutes les frontières allemandes est ardu à mettre en place, des effets pourront être observés si les décisions sont réellement appliquées.

Bien entendu, l’Allemagne n’a pas un rideau de fer et ne saurait surveiller l’intégralité de ses  frontières ; il s’agit, en réalité, de maîtriser les points de passage. D’autres outils comme les drones lui permettront sans doute de surveiller les autres territoires frontaliers, même sans présence physique. Lorsque l’on a la volonté politique de le faire, on a les moyens de le faire. La difficulté vient plutôt du fait que certaines décisions allemandes contreviennent aux traités internationaux qu’elle a, comme la France, signés.

Justement, cette décision réinterroge la libre circulation dans l’espace Schengen, d’autant plus que la coalition en place a également annoncé vouloir renvoyer plus de migrants en dehors de ses frontières. Une solution juridique « conforme au droit européen» telle que le souhaite Berlin est-elle possible ?

Cette décision ne va pas à l’encontre des règles de libre circulation dans l’ espace Schengen  dans la mesure où celles-ci prévoient qu’un pays puisse être autorisé, pour une période temporaire, à fermer ses frontières. En revanche, cela contrevient à la Convention de Genève (1951) sur le droit d’asile et la Convention européenne des droits de l’homme (1950), notamment en matière de regroupement familial. Il n’y a aujourd’hui pas de solution juridique possible conforme au droit européen puisque celui-ci vient moins des décisions de l’UE que de ces deux traités internationaux, qui existaient bien avant que commence le processus de mise en œuvre de l’UE.

Il est vrai que les décisions prises ensuite au sein de l’UE, qu’il s’agisse de règlements ou de directives, n’ont pas amélioré la possibilité de contrôler l’immigration irrégulière. Mais le fonctionnement général de la politique migratoire européenne demeure antérieur à la création même de l’Union européenne. L’Allemagne pourrait à tout moment s’extraire de ces traités, comme tout pays le peut. Il suffit de dénoncer la Convention européenne des  droits de l’homme  et ensuite d’y réadhérer, en formulant des réserves sur les aspects jugés trop contraignants. […]

En réaction, la Commission européenne a affirmé qu’elle étudiait le fond de ces mesures qui doivent être « proportionnées» et rester « exceptionnelles», évoquant même des « mesures alternatives» telles que des « patrouilles conjointes» entre États européens. Qu’en pensez-vous ?

Des patrouilles conjointes opèrent déjà pour contrôler certaines frontières communes, en coordonnant une police nationale des frontières avec l’Agence européenne de gardes-frontières et de garde-côtes,  Frontex. Deux éléments sont à prendre en considération.

D’abord, faire appel à Frontex n’est pas une honte pour un petit pays comme la Grèce. Tout le monde perçoit que le contraste entre sa superficie et l’immensité de ses frontières maritimes et terrestres, couplé avec sa position géographique et sa proximité avec la Turquie, lui rend complexe le contrôle de ses frontières par ses propres moyens. En revanche, si un pays comme  l’Allemagne demandait l’aide de Frontex, ce serait pour elle un motif de honte, puisque cela signifierait qu’elle n’est pas capable, avec ses propres moyens, d’assurer sa sécurité.

Le deuxième aspect est sensiblement plus grave : depuis plusieurs années, une action est conduite, non seulement pour rendre impossible la mission de Frontex, mais aussi pour en faire une  Organisation non gouvernementale , simplement chargée d’accueillir les migrants en situation irrégulière. Le directeur de Frontex avait d’ailleurs été poussé à la démission, son rôle ayant été réduit au simple accueil des migrants, bien loin de la maîtrise de l’immigration irrégulière. […]

Quelques jours après sa nomination, Michel Barnier a déclaré sur le plateau de TF1 vouloir prendre des « mesures concrètes» pour la « maîtrise des flux migratoires» dont il veut faire une priorité. La France pourrait-elle imiter son voisin allemand ?

En réalité, tout cela n’est qu’affaire de volonté politique. Certes, si l’on s’appuie sur une interprétation laxiste de l’ensemble des traités internationaux, le champ d’action sera très restreint. Mais avec la volonté politique d’agir, de faire en sorte que le politique s’impose sur les réglementations, cela n’est pas exclu. La France peut tout à fait, si elle le souhaite, dénoncer les  accords qu’elle a passés avec l’Algérie, qui permettent aux Algériens d’avoir un avantage migratoire plus élevé que les ressortissants d’autres pays. La France peut dès demain s’insurger pour que les pays étrangers délivrent des laissez-passer consulaires lorsqu’une personne doit être expulsée de France. La France peut également dénoncer la Convention européenne des droits de l’homme tout en y réadhérant, sous des réserves, notamment concernant l’interprétation de l’article 8 de la Convention sur le groupement familial.

Une confrontation a lieu entre les gouvernements, d’un côté, Bruxelles, de l’autre. Les gouvernements travaillent pour l’intérêt de leur pays, mesurent les problèmes de concorde sociale que pose une immigration importante venue du Sud qu’ils souhaitent réguler. Le regard que porte, au contraire, l’UE sur ces questions est purement quantitatif, puisque l’idée d’une Europe  multiculturelle y est prégnante. Le débat est là. Qui, des jurés et technocrates bruxellois, des gouvernements ou des populations vont l’emporter ?

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3 commentaires

  1. Il s’agit de clarifier ce qu’on entend par:
    -étranger en situation irrégulière (pour moi, étranger non-européen n’ayant pas demandé de visa ni déposé une demande d’asile)
    -regroupement familial: doit être réputé réalisé si les membres de la famille déjà installés en Europe se voient offrir un titre de transport pour retourner dans le pays d’où viennent les membres nouvellement arrivants (voire, si on a les moyens, d’offrir à tous les membres de la famille un titre de transport, et une indemnité de déménagement calculée en fonction du nombre de personnes déjà installées sur le territoire européen).

  2. Avec l’Union Soviétique Européenne, ne nous y trompons pas : il s’agit de poursuivre la politique de remplacement de la population autochtone par des populations hétérogènes, en leur ouvrant grandes nos frontières tout en libéralisant et même en subventionnant l’avortement… Nous avons affaire à une organisation génocidaire…

  3. Si Barnier veut réellement s’opposer à la volonté multiculturelle et mondialiste de Bruxelles, une seule solution : le référendum. C’est par l’usage ou non de cette arme imparable qu’on pourra jauger véritablement sa volonté de bloquer l’immigration. Nous risquons de perdre très rapidement nos illusions.

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