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Culture de mort : Avortement / Pays : Etats-Unis / Pro-vie

L’année 2019 pourrait être l’année d’un renversement législatif sur l’avortement aux États-Unis

L’année 2019 pourrait être l’année d’un renversement législatif sur l’avortement aux États-Unis

De Nicolas Bauer sur Aleteia :

Un juge fédéral du Missouri vient de suspendre ce mardi 27 août l’application d’une loi interdisant les avortements à partir de la huitième semaine, au motif que cette loi allait à l’encontre de la jurisprudence de la Cour suprême américaine. Au cours des derniers mois, de nombreux États (Alabama, Mississippi, Kentucky, Ohio, Géorgie, Louisiane, Missouri, Tennessee…) ont adopté des lois restrictives sur l’avortement dans le but de les faire contester devant la Cour suprême, à majorité désormais conservatrice. L’objectif est d’obtenir l’annulation de l’arrêt Roe v. Wade de 1973 constitutionnalisant le « droit à l’avortement ». Même si d’autres États (New York, Vermont, Massachusetts, Illinois, Rhode Island…) prennent une direction opposée en renforçant l’accès à l’IVG, la pression vient des États pro-life. Le 11 juillet, une Cour d’appel fédérale américaine a confirmé la nouvelle réglementation interdisant le financement des avortements par le programme de planning familial « Title X ». L’année 2019 pourrait être l’année d’un renversement législatif sur l’avortement, renversement dont l’Église catholique américaine n’est pas étrangère.

Dans son encyclique de 1995 Evangelium vitæ « sur la valeur et l’inviolabilité de la vie humaine », Jean Paul II exhortait les évêques à être les premiers « messagers infatigables de l’Évangile de la vie ». Sans « craindre l’hostilité ou l’impopularité » (§ 82), il appelait les évêques à la mise en œuvre, dans leurs pays respectifs, d’« une grande stratégie pour le service de la vie », au nom de « la mission même d’évangélisation qui est celle de l’Église » (§ 95). Comme des précurseurs, les évêques américains ont développé et piloté une telle stratégie depuis 1975 et celle-ci semble porter de plus en plus de fruits. Cette expérience pourrait inspirer les conférences épiscopales d’Europe.

C’est en réponse à l’arrêt Roe v. Wade du 22 janvier 1973 que la conférence des évêques catholiques a créé le National Right to Life Committee (NRLC), aujourd’hui la plus importante association pro-life américaine. Les évêques ont également lancé en 1975 un « plan pastoral pour les activités pro-vie ». Ce plan, d’abord centré sur l’avortement, s’est élargi à d’autres problématiques de bioéthique et vise maintenant, comme le souhaitait Jean Paul II, à bâtir une véritable « culture de vie ». Il mobilise les diverses ressources de l’Église au service de quatre objectifs : l’éducation et la sensibilisation du public, l’accompagnement pastoral des personnes, la promotion de politiques publiques protégeant les plus vulnérables, la prière pour la vie.

Le plan pastoral pro-vie de l’épiscopat responsabilise les fidèles catholiques qui ont chacun le devoir de « promouvoir des positions pro-vie au sein de leur famille, de leur paroisse et de leur communauté, ainsi que de leurs milieux professionnels ». Pour les évêques, les efforts des laïcs « méritent et ont besoin de l’encouragement et du soutien des prêtres, des diacres et des religieux ». L’Église des États-Unis est mise en ordre de bataille au service de la vie, avec une structure pro-vie à chaque niveau hiérarchique. Les Comités étatiques de coordination pro-vie, les Comités diocésains pro-vie et les Comités paroissiaux pro-vie forment un véritable maillage territorial.

Au cœur de ce maillage, le Comité pro-vie de la paroisse, sous l’autorité du curé, a « un rôle vital dans la vie paroissiale ». Ses actions sont très concrètes, principalement au bénéfice des enfants à naître, des femmes enceintes et des jeunes mères. Les coordinateurs paroissiaux pro-vie organisent dans les supermarchés des collectes de couches pour bébés, biberons et lait pour des mères en situation de précarité. Ils proposent aux familles d’« adopter spirituellement » un enfant à naître risquant l’avortement, au cours de ses neuf mois de développement in utero. Ils organisent des « messes pour la vie », sur un modèle proposé par les évêques. Des paroissiens sont aussi régulièrement présents devant des centres d’avortements pour prier et discuter avec les femmes qui s’y rendent, ainsi que pour promouvoir, le cas échéant, les services chrétiens d’écoute et de soins post-avortement.

Les Comités paroissiaux ont également une action auprès des candidats et élus politiques locaux, notamment lors des « votes importants ». Cela se traduit par des initiatives très diverses : envoi de cartes postales et lettres à des personnalités politiques, manifestations pour sensibiliser les passants ou demander la fermeture d’un centre d’avortements, ou encore organisation du déplacement des fidèles pour la Marche pour la vie à Washington D.C. chaque 22 janvier, à la date d’anniversaire de l’arrêt Roe v. Wade. À cette date, les Comités organisent en parallèle dans leur paroisse un jour de prière et de pénitence, à la demande de la conférence des évêques.

Le mouvement pro-vie américain, par son ampleur et son efficacité, a toujours impressionné. Il remporte actuellement des victoires politiques dans plusieurs États. Dans ce pays pourtant imprégné de protestantisme, l’action pro-vie de l’Église catholique est décisive. D’après le sociologue Ziad Munson, les militants pro-vie américains sont à 66% des catholiques (contre un peu plus de 20% dans la société) et à 57% des femmes. Cet engagement a même conduit plusieurs personnalités à s’engager pour la vie, puis à se convertir au catholicisme. C’est par exemple le cas de Bernard Nathanson et Abby Johnson, qui avaient pratiqué ou participé à des avortements avant de se repentir, ou encore de Norma McCorvey (« Jane Roe ») et de Lila Rose.

En Europe, depuis la fin des années 1960, ce sont surtout des laïcs qui prennent les initiatives de défense de la vie. Depuis quelques années, les évêques se mobilisent davantage, par exemple en France, où vingt-trois d’entre eux ont soutenu la dernière Marche pour la vie. L’encyclique de Jean Paul II Evangelium vitæ a joué un grand rôle dans cette évolution, en rappelant le sens profond du respect de la vie terrestre. Celle-ci « est la participation à la vie même de Dieu » et son développement « est éclairé par la promesse de la vie divine et renouvelé par le don de cette vie divine » (§ 2). C’est pour cette raison que les évêques européens pourraient se sentir pleinement dans leur mission de pasteurs en pilotant une « grande stratégie pour le service de la vie », à l’image de leurs homologues outre-Atlantique.

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