Lu dans L'Homme Nouveau du 26 mars, ce témoignage d'Apollinaire Mengoumou :
"Originaire du Cameroun, je suis né et j’ai grandi dans un village dont la paroisse a été fondée il y a juste cinquante ans. C’est à l’école primaire paroissiale que j’ai suivi mon initiation au chant grégorien, comme tous les jeunes de mon âge. La méthode était simple, on faisait recopier les textes en latin à tous ceux qui savaient lire et écrire facilement. Au bout de quelque temps du fait de la répétition de la mélodie en regardant le texte, la mémoire intègre aussi les mots et, à partir de ce moment, on peut se passer du texte et chanter par coeur. De cette façon, nous avons appris et retenu par coeur les ordinaires et les chants propres à chaque dimanche de l’année liturgique correspondant au temps scolaire.
L’Afrique en général et le Cameroun en particulier ont bien intégré le chant grégorien dans leur culture. En effet, depuis les débuts de l’Église dans ce continent au début du XXe siècle, les missionnaires ne célébraient pas seulement en latin, ils enseignaient le chant grégorien aux fidèles, dans les paroisses entre les deux guerres. L’abbé Jean Criaud, cité par Jean-Marie Bodo, témoigne : «L’enseignement du chant latin a tout de suite eu de l’intérêt pour les fidèles et ils ont très vite appris les chants grégoriens de la messe… On s’efforçait d’avoir toujours des cérémonies dignes et solennelles. Auprès des païens, la beauté du culte, des chants, des cérémonies, étaient souvent la première occasion de l’appel à la foi.» Cette remarque reste vraie encore aujourd’hui."
Marc
Bernard Lugan dit à peu près la même chose : tant que l’Eglise chantait en latin avec des cérémonies très rituelles et fastueuses, cela convenait aux Africains (je parle bien de l’Afrique, pas du reste du monde).
Avec l’abandon de cette liturgie, ils se tournent vers les communautés évangéliques, désormais assimilées comme étant plus piétistes…
PK
Témoignage intéressant à plus d’un titre.
Premièrement, on rappelle que le concile de Vatican II précise que le chant grégorien reste le chant naturel et normal d’une célébration.
Ensuite, j’ai eu le témoignage d’un père blanc qui a est rentré il y a 3 ans après avoir passé plus de 50 ans au Mali. Le Mali a fait comme la France : ils se sont mis à chanter les cantiques dans les dialectes locaux… sauf qu’il n’existe pas de langue commune : chaque région possédant sa propre langue.
Lorsque l’évêque du Mali organisait un grand rassemblement des chrétiens maliens, ils leur étaient totalement impossible de chanter tous ensemble… chacun chantait à son tour…
C’est sans doute le progrès…
Michèle
C’est tout à fait exact. Il y a plusieurs années , un choeur grégorien dont je faisais partie à l’époque, est allé chanter à la chapelle de l’Ecole Militaire. Pour l’occasion , notre chef de choeur habituel était remplacé par le chef de choeur d’une autre chorale que nous venions “renforcer”, en l’occurrence une dame camerounaise d’une cinquantaine d’années.Au cours de la réception qui a suivi la messe, j’ai eu l’occasion d’échanger quelques mots avec cette dame : j’ai appris ainsi que le Cameroun comptait un nombre appréciable d’excellents grégorianistes.A une question plutôt stupide de ma part , au sujet du décalage culturel, de la difficulté d’assimiler une tradition musicale étrangère ,très éloignée de ses propres traditions, je me suis entendu répondre que cet héritage n’était aucunement “étranger”, qu’il appartenait à tous les catholiques quelques soient leurs origines.( Et n’avons-nous pas fait nôtre une révélation qui vient de l’orient?). C’est ainsi que cette dame m’a fait prendre conscience d’une “identité catholique”, qui transcende les héritages culturels, et aussi que le langage de la beauté est universel, donc …catholique !