« NOS ÂMES NE VALENT PAS PLUS CHER QUE CELLES DE NOS ENFANTS ! » Zarifa.
« Le souvenir reste toujours, chaque matin, chaque soir, durant la journée nous nous souvenons ! Mais nous prions ! Notre espoir est à Jésus-Christ ! »
Je suis rentrée dans la maison d’Abou Meekhaïl et de Zarifa, et je suis frappée par la légèreté qui flotte dans l’air. Comme un parfum d’espoir qui ne décide pas à s’évaporer malgré les cœurs lourds. La foi y est présente, il n’y a pas d’autre explication pour ces parents endeuillés de deux fils : Zarif et Mata. Quatre enfants constituaient leur famille : la moitié a été emporté dans l’horreur de la guerre.
Abou Meekhaïl, la gorge abîmée par un cancer laisse alors sa femme prendre la parole. Lentement elle commence :
« Soudain la guerre est arrivée. Personne n’y croyait. ». Elle continue pudiquement : « c’était difficile, les terroristes nous attaquaient. Tous les jeunes de la ville ont commencé à la défendre. C’était la normalité. L’honneur et notre pays sont très cher à notre cœur. Pour nous, pour les jeunes, pour les habitants de la ville. C’était presque une obligation de prendre les armes. Ils se sont sacrifiés pour nous défendre, pour la Syrie. »
Engagé dans la défense nationale, Zarif est l’un de ses jeunes. De ce que ses parents m’ont décrit, j’imagine un jeune homme au caractère ardent, un homme qui y croyait, qui se portait toujours volontaire, prêt à rendre service, prêt à se donner, un de ses hommes que l’on pourrait croire doté d’une bonne étoile, invincible. Soldat exemplaire, il est toujours appelé par Abou Faed. Monsieur Simon. Professionnel du lance-roquettes, ces talents sont souvent requis pour une mission spéciale, un travail plus ardu…
Zarif était du côté de l’est lorsqu’un tank terroriste attaque la ville. Le tank se rapproche, encore, encore plus près…C’est alors que l’arme sur l’épaule, Zarif court à sa rencontre, se positionne et tire ! En entrant en contact avec le tank, la roquette de Zarif met hors d’état de nuire cet engin de mort qui explose, se retourne et commence à brûler. Voilà une figure de héros, un homme seul, courant au-devant de la mort !
Or, c’est le 16 septembre 2014, lors d’une mission au village de Tremseh à l’ouest de Mhardeh dans un courage exemplaire et dans un face à face avec les terroristes qu’il est tombé martyr en combattant de toutes ses forces.
Avant d’aller au combat, Zarif avait pris soin de dire au-revoir à ses petits neveux et nièces. Il ne les embrassera jamais plus.
Deux ans plus tard, même date : 16 septembre 2016, pour échapper à la violence des combats, Mata, le plus jeune des fils passe une rue où la guerre faisait rage. En une seconde, ce beau garçon au visage d’ange, les yeux d’un bleu aussi bleu que le ciel d’azur en plein été, a été violemment heurté par une voiture.
Les yeux dans le souvenir, Abou Meekhaïl et Zarifa souhaitent que jamais ce mois ne revienne.
Alors que je leur pose la question pourquoi ils n’ont pas quitté Mhardeh, dans un sourire angélique, sa mère me répond, les âmes de nos enfants sont là… leurs âmes ne sont pas plus chers que celles de leurs enfants. Ils ne partiront pas.
Abou Meekhaïl fini sur ses mots :
« Nous sommes un peuple qui aime la paix et l’amour. Nous avons éduqué nos enfants à faire le bien partout. Nous ne laisserons pas notre terre aux terroristes ! Nous ne leur permettrons d’entrer qu’à condition de mourir. Tant que nous sommes vivants, ils ne peuvent pas. Après notre mort peut-être et encore, nous descendrons du ciel pour les repousser. »