La sociologue Nathalie Heinich doit recevoir un prix pour son dernier essai, Des valeurs. Une récompense violemment contestée par le lobby LGBT, qui n’attaque pas son livre… mais les valeurs de la chercheuse, selon eux «réactionnaires», «antiféministes», «homophobes»…
Le prix Pétrarque de l’essai, remis chaque année par France culture et le Monde, est revenu cette année à Des valeurs, une approche sociologique, publié chez Gallimard en mars. Dans cet ouvrage, la sociologue Nathalie Heinich, directrice de recherches au CNRS, propose de considérer les valeurs comme des «représentations collectives agissantes». Refusant d’adopter une posture morale triant entre «bonnes» et «mauvaises» valeurs, elle décortique la manière dont une société produit des jugements.
Mais cette thèse n’est pas à l’origine de la violence contre elle. Le lobby LGBT la dénonce comme étant «l’une des idéologues les plus engagés dans la légitimation des idéologies homophobes et des schémas de la Manif pour tous». Il faut dire qu'elle avait pris position contre la loi Taubira (relayée par Le Salon Beige ici et là). En 2014, elle s'était clairement opposée à l’ouverture de la PMA et de la GPA aux homosexuels.
«Revendiquer la prise en compte d’une particularité individuelle, telle que la pratique sexuelle, dans l’allocation des droits civiques et civils constitue une perversion de l’idéal républicain.» «Assimiler un désir à un droit […] relève d’un mode de fonctionnement psychique qui ne connaît d’autre modalité de transaction avec le réel que le fantasme infantile de toute-puissance opposé à une autorité forcément maléfique.»
Nathalie Heinich parle d’un dangereux procès intenté par des intellectuels surenchérissant dans la radicalité :
«Ces accusations d’homophobie sont non seulement diffamatoires – je ne soutiens pas la Manif pour tous ! -, mais elles sont aussi un appel à la censure par la destruction de la réputation intellectuelle. Certaines positions, comme mes interrogations sur le mariage pour tous, sont désormais difficiles à tenir. Cette pensée par slogans, cette confusion des arènes politique et scientifique sont une dérive terrible.»
Jean Birnbaum, le responsable du Monde des Livres, refuse de retirer le prix :
«Notre jury n’a pas couronné une personne ou ses prises de position publiques, il a consacré un livre. S’il y avait des thèses politiquement contestables dans cet essai, nous ne l’aurions pas primé. Le bandeau France culture-Le Monde est posé sur le livre de Nathalie Heinich, non sur des prises de position concernant des enjeux qui ne sont d’ailleurs pas du tout au coeur ni de ses recherches ni de ses interventions dans le débat public.»
L’un des membres du jury, le journaliste Brice Couturier, a ajouté sur l’antenne de France Culture :
«Le livre de Heinich démonte l’idéologisation dont est victime une partie de la sociologie universitaire. Cela a déplu à une bande d’aigris. De manière policière, ils se sont jetés sur les prises de position passées de l’auteur […] pour y trouver matière à l’accuser de tous les péchés de la religion du politiquement correct.»