Franck Riester, ministre de la Culture, a nommé Jean de Loisy à la direction de l’École nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris (ENSBA). Jean de Loisy prendra ses fonctions dans les premiers jours de l’année 2019.
Président-directeur du Palais de Tokyo depuis 2011, Jean de Loisy a exercé les fonctions de directeur du Frac Pays de la Loire, inspecteur à la création au ministère de la Culture chargé de la commande publique dans les monuments historiques, directeur-adjoint du musée de Nîmes, conservateur de la Fondation Cartier et du Centre Georges-Pompidou et directeur des programmes de la Mission 2000. Il a aussi été commissaire de Monumenta Anish Kapoor en 2011 au Grand Palais.
En 2012, Aude de Kerros écrivait à propos de l’exposition Les Maîtres du Désordre au musée du quai Branly :
Nous sommes conviés à voir la dernière œuvre de Jean de Loisy au Musée des Arts Premiers, quai Branly. Ce grand personnage de la bureaucratie culturelle, directeur du Palais de Tokyo, grand sachem de l’Art contemporain au Collège des Bernardins, fait « dialoguer » 350 objets ethnologiques avec 20 installations d’artistes contemporains. Cette exposition est le troisième volet d’une trilogie qui complète le grand œuvre de cet homme orchestre, à la fois fonctionnaire, commissaire, artiste et théoricien. En dix ans et trois expositions blockbusters, Jean de Loisy a réussi à faire de l’art contemporain, un nouvel art sacré. Son discours commence avec la « Beauté en Avignon » en 2000, se déploie grâce aux « Traces du sacré » en 2008 et se conclut dans « Les maîtres du désordre » en 2012.
[…] La scénographie est un discours grâce auquel Jean de Loisy nous persuade : les artistes contemporains et les chamanes font appel à des pratiques semblables et remplissent la même fonction, celle de rétablir l’équilibre du monde. Au seuil de l’antre, le visiteur peut lire sur le mur quelques affirmations péremptoires :
Ici règne la dualité : « Le combat nécessaire et sans fin de l’ordre et du désordre, […] indispensable à l’équilibre de l’univers tout entier. »
Ici, abandonnez tout espoir car Dieu n’y peut rien : « Il n’existe pas d’ordre sans ambivalence, tout ordre y compris divin est fondamentalement imparfait. »
Ici, « la mort à l’œuvre et la douleur, les catastrophes naturelles et les guerres témoignent de l’impuissance des dieux et des religions établies, de leur silence ou de leur distance ».
Ici, vous comprendrez l’essence monstrueuse du monde.
[…]
Jean de Loisy rassure le visiteur. La solution est « en marge des grands panthéons ». Il faut avoir recours à des « hommes-limite », à des êtres marginaux et impurs qui, pour cela même, seront d’efficaces intercesseurs. Jadis ils étaient sorciers, aujourd’hui ce sont des artistes d’« Art contemporain ». Le commissaire note au passage la supériorité de ces derniers sur les artistes de tous les temps car ils sont tout à la fois : artistes, prêtres, chamanes et de surcroît anthropologues : « Je me suis interrogé sur la signification de cette mutation de l’artiste en anthropologue (au sens explorateur de l’humain dans son intégralité), et sur les raisons pour lesquelles les artistes modernes se sont moins intéressés à l’aspect formel des objets primitifs qu’à la puissance psychique qui émane d’eux. »
Est-ce une supériorité ou une dérive totalitaire ? En rêvant ainsi de « l’artiste total », Jean de Loisy ne semble pas percevoir à quel point la distinction et la séparation entre art et sorcellerie a été une libération pour l’homme créateur, et le signe de son entrée dans la civilisation. L’artiste a conquis sa propre liberté en renonçant la volonté de puissance, en laissant au contemplateur sa liberté et en s’acheminant vers un au-delà inconnu et ouvert. […]
Face à cette déception amère causée par le monde mauvais, le commissaire inspiré nous rassure, il y a non seulement des intercesseurs mais aussi des remèdes. Hier comme aujourd’hui, il faut faire confiance aux médiateurs chamanes ou artistes, à leur bricolage sacré, sensé réparer le mal par les voies initiatiques de la transgression. Curieusement on trouve de plus en plus ce discours thérapeutique lorsque l’on analyse les « concepts » qui les accompagnent la production actuelle d’œuvres d’AC. […]
Mais nos puissants intercesseurs ne font pas que cela, nous enseigne Jean de Loisy, ils maîtrisent le désordre car ils y participent : « Celui qui consomme l’innommable peut dire l’indicible », celui qui vit tous les excès et les dégradations peut obtenir, selon lui, leur limitation. Pour sauver le monde il faut en expérimenter la lie comme l’affirmaient nos antiques carpocratiens. Il faut être possédé par les esprits pour obtenir leur collaboration, frayer et négocier avec eux. C’est d’ailleurs là le maître mot : « négocier ». Chamanes et artistes contemporains négocient avec le mal. Nous sommes ici dans le royaume du commerce, de l’échange égal, du marchandage. En AC, la formule duchampienne « donnant-donnant » est aussi un élément essentiel du dogme. […]
Loisy avance dans sa démonstration et fait apparaître avec l’évocation de ces fêtes, l’éternelle rivalité entre le sorcier et le prêtre. L’affaiblissement de la liturgie chrétienne entraîne la réapparition des cortèges de Bacchus et de la « mère folle », sous forme de gay pride ou de « marche des salopes ». Ces nouvelles liturgies sont aujourd’hui les plus spectaculaires, médiatisées et visibles. Catherine Grenier, conservatrice experte en Art contemporain remarquait dans un livre récent, L’art contemporain est-il chrétien ? (Ed. Jacqueline Chambon), combien les rites et croyances abandonnées par le christianisme étaient devenus un matériau détourné et reprogrammé par les plasticiens, performers et vidéastes. Cette exposition exclut curieusement deux types de médiateurs avec l’invisible ou l’inconscient, encore présents dans la monde moderne, les prêtres catholiques et les psychanalystes. Ces derniers sont nombreux à venir voir l’exposition, intrigués par le propos de Jean de Loisy qui sonne le glas de leur pouvoir et aurait scandalisé Freud. Ils se posent la question : mais comment peut-on renoncer à la civilisation ? Et surtout : serions nous devenus inutiles ? […]
Le commissaire-philosophe a terminé sa leçon. Il conclut : L’AC est un art au dessus de l’art, de la religion, de la morale. C’est le sommet de l’art de tous les temps puisqu’il réunit et dépasse désormais ces trois fonctions par la voie négative : « Mettre en turbulence les convictions, rejouer ce qui paraît acquis, élargir notre champ de conscience, faire exploser les règles convenues. » […]
Par ailleurs, comme dans son « œuvre » précédente, « Les traces du Sacré » à Beaubourg en 2008, Jean de Loisy écarte toute référence forte au christianisme, et pour cause ! Selon lui, celui-ci a échoué et fait partie du passé révolu. Les artistes contemporains sont devenus les néo-chamanes d’un monde désormais postchrétien. Tout au long de cette exposition, Jean de Loisy évoque le « surnaturel » mais exclut toute notion de transcendance. […]
Pierre-Jean
Je prends connaissance avec cet article de la prose fumeuse de Jean de Loisy, qui prétend réfléchir : on est bien davantage dans la supercherie intellectuelle. Les “Gilets jaunes” seront heureux d’apprendre que leurs impôts permet de nourrir une bouche inutile de plus.
Pierre-Jean
@Irishman,
Avouez qu’on est très loin quand même d’avoir des « talas confits en dévotion » dans les milieux de la culture et de l’art. L’on a surtout besoin de gens ayant la tête sur les épaules et les pieds par terre, qui ne se paient pas de mots.
DUPORT
“Dieu est mort” c’est un vieux slogan soixante-huitard…
Ce type à 50 ans de retard !
Moi
A quoi vous attendiez-vous ?
A ce qu’il nomme l’Abbé de Tanouarn ?