Partager cet article

Pays : Pologne

Le père Jerzy Popieluszko, prêtre, patriote et martyr

Le père Jerzy Popieluszko, prêtre, patriote et martyr

Dans Valeurs Actuelles, le père Danziec évoque, à l’occasion du 40e anniversaire de son assassinat, le 19 octobre 1984, l’aumônier du syndicat polonais Solidarnosc, éliminé par des agents du service de renseignement du régime communiste. Devenu héros national, sa mémoire peut inspirer encore aujourd’hui. Et ce, au-delà des frontières de la Pologne :

Il avait le regard d’un enfant, doux et placide. Son charisme sublimait sa bonté quand sa foi transcendait sa mélancolie. Il était généreux, dévoué et sans histoire. La vitalité débordait de ses 37 ans. Ses traits parfois soucieux suggéraient qu’il ne se déroberait pas si l’heure devait devenir tragique. Il appartenait à cette race d’homme de devoir, de prière et de parole ; espèce devenue trop rare et dont, pourtant, il faudrait une variété pour colmater une civilisation en danger. Il savait le prix du sacrifice et le risque à courir pour faire ce que doit. Il aimait son pays comme on peut s’éprendre d’une jolie femme. Il aimait l’Eglise comme un mari se consumant pour son épouse. Lorsqu’il prenait la parole, l’atmosphère prenait des airs de ciel d’azur. Il irradiait avec un naturel divin. Il s’appelait Jerzy. Il était prêtre. Pleinement prêtre. Il y a 40 ans exactement, la police politique polonaise le capturait, le torturait avant de l’assassiner.

Dans une tribune publiée dans L’Opinion et titrée « Vaincre le mal par le bien », l’actuel président de la République polonaise, Andrzej Duda, témoigne à propos du prêtre martyr :

« Son service pastoral auprès des travailleurs et de l’opposition démocratique lui a valu la réputation d’un guide spirituel et d’un protecteur pleinement dévoué à sa vocation ».

C’est dans le contexte historique d’une Pologne mutilée par le totalitarisme communiste que le père Jerzy Popieluszko a offert son sacerdoce. Au pays de la peur, des tabous et de la dissimulation, il était habité par un infatigable amour de la vérité. Celle rend libre enseigne le Christ. Comme les prêtres vendéens déportés sur les pontons de Rochefort durant la Révolution Française, comme les prêtres morts à Dachau dans les camps de la mort du nazisme durant la deuxième guerre mondiale, son nom s’ajoute à la cohorte des serviteurs de Dieu qui sont allés jusqu’au bout de leur témoignage.

La notoriété des “Messes pour la Patrie et ceux qui souffrent pour elle”

Alors qu’au mois d’août 1980, un mouvement de grèves sans précédent s’abat sur la Pologne, le jeune prêtre Popieluszko ne refuse pas à s’exposer en célébrant la messe sur un autel de fortune dans une aciérie en arrêt et en pleine effervescence. La popularité croissante de ce prédicateur hors du commun agaçait le pouvoir communiste. En reportage en Pologne au début de l’année 1983 pour Le Parisien, le journaliste Bruno Fanucchi se rend dans l’église Saint-Stanislas Kostka, au nord de Varsovie où officie le Père Jerzy. Ils sont alors des milliers à assister religieusement à ses “Messes pour la Patrie et ceux qui souffrent pour elle”. Des connaissances le poussent jusque dans le chœur pour qu’il suive la messe. Conduit à la sacristie à l’issue de la célébration, il est présenté au père Jerzy. « Je n’oublierai jamais l’extraordinaire grâce de cette rencontre » confiera-t-il.

De ces messes pour la Patrie qui attirent les foules, le père Jerzy tient à ce que le climat spirituel de la nef respecte deux points non négociables : profondeur de la prière et sentiments patriotiques. En ces heures sombres pour la Pologne, l’aumônier de Solidarnosc veut amener les fidèles à sortir de l’église à l’issue de la messe en étant « recueillis et graves », comme il le confie dans ses notes personnelles retrouvées après sa mort ignominieuse.

Jean Offredo, présentateur du JT de 20h sur TF1 au début des années 80 et lui-même natif de Pologne, éditera Les carnets intimes du prêtre martyr deux ans après sa mort. Dans son avant-propos, le journaliste avertit le lecteur

« Jerzy Popieluszko savait que son attitude et son engagement provoquaient de vives réactions. Dans le cercle du pouvoir communiste bien évidemment, mais aussi au sein de son Eglise, bien qu’il en fût un fidèle et dévoué serviteur. De tout cela il parle avec pudeur, même quand il éprouve inquiétude ou doute, dans son journal, ses carnets intimes, où il écrit face à lui-même et à sa conscience. »

Eveilleur de conscience et apôtre de la vérité

Le 13 novembre 1982, l’homme de Dieu laisse entrevoir ses sentiments profonds en les couchant sur son cahier de notes à couverture bleue :

« Que de tourments pour la nation, sous la dictature militaire. Gloire à ceux qui souffrent pour la patrie, qui ne plie pas sous le joug des méthodes policières. (…) Nos autorités – pas les religieuses bien sûr – ne se remettent pas de ces messes pour la Patrie que je célèbre chaque dernier dimanche du mois. Elles disent que ce sont là les plus grands meetings tenus sous l’état de guerre. Ils peuvent m’interner, ils peuvent m’arrêter et préparer un scandale, mais je ne peux certes pas cesser mon activité, qui est un service rendu à l’Eglise et à la Patrie ».

Eveilleur de conscience, le père Jerzy Popieluszko aura jeté à la face du communisme – « vieillesse du monde et règne du mensonge » (Jean Madiran) – et l’intrépidité de sa jeunesse et son amour de la vérité. Lors de ses funérailles, plus de 600 000 personnes, pour la plupart ouvriers, petits et sans grades, se presseront dans une même prière autour de sa dépouille défigurée. Un immense panneau sera suspendu au-dessus de son cercueil portant l’inscription : « Bóg – Honor – Ojczyzna / Dieu – Honneur – Patrie ». Aujourd’hui comme hier, il s’agit d’une jolie devise pour temps troublé. Plus qu’une devise, il serait même pertinent d’y voir un programme de redressement.

Partager cet article

Nous utilisons des cookies pour vous offrir la meilleure expérience en ligne. En acceptant, vous acceptez l'utilisation de cookies conformément à notre politique de confidentialité des cookies.

Paramètres de confidentialité sauvegardés !
Paramètres de confidentialité

Lorsque vous visitez un site Web, il peut stocker ou récupérer des informations sur votre navigateur, principalement sous la forme de cookies. Contrôlez vos services de cookies personnels ici.


Le Salon Beige a choisi de n'afficher uniquement de la publicité à des sites partenaires !

Refuser tous les services
Accepter tous les services