À l'occasion de la sortie de son dernier livre Populisme, les demeurés de l'histoire, Chantal Delsol déclare au Figarovox :
"[…] Je maintiens que le populisme est autre chose que la démagogie. Le démagogue flatte les désirs populaires qui vont contre l'intérêt général (par exemple les citoyens qui ne veulent pas payer des impôts ou partir à la guerre). Tandis que le populiste flatte les enracinements de proximité (le souverainisme contre l'Europe, par exemple). C'est très différent: on peut accuser les démagogues de flatter les égoïsmes mais ceux qui sont dits populistes s'adressent à des opinions, que l'on traite en égoïsme pour mieux les discréditer. Ce n'est pas de l'égoïsme que d'être souverainiste: c'est une opinion.
Les démocraties ont toujours du mal à combattre la démagogie parce qu'elle s'insinue partout: il est très difficile à un gouvernant démocratique, quel que soit son parti, de ne pas avoir envie de plaire à ses électeurs… […]
L'Union européenne a systématiquement rejeté ses opposants dans le camp «des populistes». Manque-t-elle ainsi à sa vocation démocratique? Peut-on aller jusqu'à parler de démocratie pervertie?
Oui on peut parler de démocratie pervertie. Je trouve tout à fait normal que l'on interdise des partis jugés anti-démocratiques (comme cela a été le cas des post-nazis en Allemagne et des communistes aux États-Unis). C'est une décision que prend une société, et il est normal que la démocratie se défende contre des groupes qui profitent d'elle pour ensuite la détruire, comme les communistes et les nazis l'ont fait au XX° siècle. Mais je trouve tout à fait scandaleux que l'on injurie les opposants. Ou bien ceux-ci appartiennent à la démocratie, et dans ce cas leurs arguments sont aussi respectables que d'autres, ou bien on les interdit.
[…] C'est bien une démocratie malade qui interdit l'expression de certains courants d'opinion en les traitant de fascistes mais sans avoir le courage de les interdire comme tels (parce que précisément ils ne sont pas fascistes). Les partis dits populistes sont accusés évidemment d'être anti-démocratiques parce que c'est l'injure la plus facile. Si l'on prend le cas de la France, un parti qui détient environ 25% des voix et a deux sièges au Parlement ressemble plutôt à un parti qui voudrait rentrer dans la démocratie. Souvenez-vous de la ceinture rouge de Paris où les urnes étaient sans cesse bourrées, et on n'accusait jamais le Parti communiste d'être anti-démocratique! Si les partis populistes se mettaient à bourrer les urnes, ils ne feraient pas long feu, croyez-moi, car les médias ne leur laissent rien passer. […]"