De Bernard Antony :
Le rapport Sauvé a notamment préconisé la remise en cause du « secret de la confession ». Il a entraîné la nouvelle émergence du fondamental débat de civilisation sur la hiérarchie de la loi civile et de la loi morale.
Ce débat a été, hélas, d’emblée pollué par l’insigne médiocrité culturelle de M. Darmanin, le ministre de l’Intérieur et des cultes, et par la mauvaise formulation du président de la conférence des évêques de France.
Guillaume de Thieulloy, notre délégué général, a magistralement rappelé ce vendredi dans un communiqué de l’AGRIF que la référence à des lois au-dessus des lois civiles n’était pas seulement un apport du christianisme mais celui des grandes civilisations humaines. Et ce fut en effet, dès le V° siècle avant Jésus-Christ, avec la tragédie de Sophocle, Antigone, l’immense legs de la civilisation grecque à la civilisation occidentale.
Mgr de Moulins-Beaufort n’a pas très bien éclairé le possible débat entre pouvoir temporel et autorité spirituelle en formulant un peu maladroitement que « le secret de la confession est plus fort que la loi de la République ». Car il n’y a pas là qu’une question de rapport de force. Sans doute aurait-il dû rappeler que les lois justes d’un État républicain non totalitaire ne sauraient être en contradiction avec la loi morale naturelle, la loi universelle de distinction du bien et du mal inscrite dans la conscience de la personne humaine ; et que le Décalogue biblique a parfaitement énoncé cela.
Le respect des secrets du médecin, de l’avocat, a fortiori du prêtre dans sa dimension sacrée par-delà sa personne est un des piliers de notre civilisation gréco-latine et judéo-chrétienne. Le respect du secret de la confession est d’ailleurs inscrit jurisprudentiellement dans notre droit.
Le confesseur doit naturellement s’efforcer, quand il y a lieu, de persuader le coupable de ne pas seulement accepter la pénitence religieuse infligée et de réparer ses actes délictueux si cela est encore possible, mais d’accepter aussi d’en répondre devant la justice des hommes.
Mais en aucun cas la République ne saurait exiger du prêtre qu’il soit un dénonciateur de confessés.
En revanche, les cas des évêques, nombreux semble-t-il, au cours des 70 ans écoulés, qui ont eu connaissance des agissements criminels avérés de prêtres pédophiles sans les bannir de leurs fonctions est accablant. Et accablant qu’ils n’aient mis en place aucun moyen de recours approprié pour les victimes.
On comprend qu’ils aient pour le moins accepté sans réagir le déclin culturel, liturgique, social et politique de l’Église catholique, quand ils n’en ont pas été les artisans.
Quant au ministre Darmanin, alors que le président de la République lui a demandé de « recevoir » le président de la Conférence des évêques, le procédé de sa « convocation » est pitoyable.
Il atteste de son ridicule contentement de frétillant ministrion jacobin de pouvoir se parer de l’autorité de César contre le représentant du domaine de Dieu, ce dernier fût-il, sur bien des plans, bien décevant.
À un moment où le parlement français s’apprête à étendre encore les possibilités de meurtre des enfants dans le sein de leur mère, la loi de la République se fait toujours plus barbare, méprisant en effet la loi morale et l’espérance de continuité du peuple de France. Hélas, l’épiscopat français dans son ensemble n’a pas du tout lutté jusqu’ici contre la culture de mort que dénonçait Jean-Paul II. Peut-être était-il par trop paralysé par ce que le régime savait des pratiques trop nombreuses révélées par le rapport Sauvé, au demeurant contestable sur le plan de la rigueur statistique.
Mais il ne faudra pas non plus compter sur ce même Sauvé pour faire un rapport précis sur les millions de meurtres d’enfants pratiqués depuis la promulgation de la loi Veil. Celle-ci fut préparée principalement en son temps par le docteur Simon, le grand-maître de la Grande Loge de France, cette obédience de gauche militante chère au président Sauvé.
Les crimes abominables de la pédophilie n’ont été que trop nombreux, mais bien plus nombreux encore ceux de l’avortement évoluant aujourd’hui en légalisation de l’infanticide.
Contre cela, collectivement, soyons sans illusions, les évêques ne feront toujours rien et le président Sauvé non plus. Ce n‘est pas sur eux que l’on pourra compter pour sauver notre civilisation de la noyade.