Lu sur le blog de L'Homme Nouveau :
"Le candidat Sarkozy vient de faire savoir par le secrétaire d'État chargé du commerce, Frédéric Lefebvre, qu'il était favorable à l'élargissement des «conditions d'ouverture des magasins le dimanche». Il y a, à peine une semaine, le même, alors qu'il n'était encore que… Président de la République, et potentiellement candidat (mais non officiellement déclaré), avait répondu lors de l'entretien accordé au Figaro Magazine : «La France a des racines chrétiennes, et mêmes judéo-chrétiennes, c'est une réalité historique qu'il serait absurde de nier.» […]
Mais les raisons invoquées sont fausses philosophiquement et inopérantes pratiquement.
Philosophiquement, le travail du dimanche introduit une coupure dans la « temporalité » dans laquelle nous vivons depuis des siècles. Cette coupure opère un retour en arrière, brisant toutes les limites devant les nécessités du commerce, déshumanisant un peu plus la vie sociale, comme à l’époque où l’on faisait travailler sans complexe aucun des femmes et des enfants dans des conditions particulièrement difficiles. Elle renverse ou, plus exactement, elle renforce le renversement architectonique déjà opéré depus longtemps qui place l’économie et la consommation comme seules normes de la vie sociale, avant le politique et le religieux. Nous ne sommes plus seulement dans une économie de marché ; celle-ci nous a fait entrer dans une « société de marché ». Désormais, la famille ne se rend plus le dimanche à la messe ou elle ne se promène plus le dimanche dans un parc ou un bois. Les rencontres entre amis, les moments de détente mis à profit pour la lecture ou le repos, sont remplacés par la grand-messe consumériste, la promenade dans les rayons des grands magasins où chaque membre de la famille peut chercher de quoi le satisfaire. C’est la longue consomption de l’être aux feux de la consommation.
Pratiquement, cette rupture n’a que peu d’effets sur l’économie. D’abord, parce que le commerce lié au tourisme profite déjà d’une exception en ce qui concerne le dimanche. Ensuite, parce que cet élargissement, une fois de plus, va profiter aux grandes enseignes et à la grande distribution qui profitent déjà très largement d’un quasi-monopole commercial et qui ont seules les vrais moyens d’imposer le travail du dimanche à ses fournisseurs et à ses employés.
Une véritable politique novatrice, et qui exigerait un véritable travail d’imagination et de compétences techniques, consisterait, au contraire, à créer les conditions pour une renaissance large du petit commerce, non pas seulement dans les villes, mais dans toutes les zones rurales. Petit commerce de proximité, qu’il faudrait ouvrir non pas le dimanche, jour de repos, mais tous les autres jours de la semaine et qui permettrait à tout un pays de revivre. […]"
C.B.
Les gens qui travaillent toute la semaine n’auraient que le dimanche pour faire leurs courses.
Sauf que, s’ils travaillent aussi le dimanche, ils n’auront pas la possibilité de faire leurs courses le dimanche, à moins qu’on ne leur donne la recette de la bilocation.
Je suppose qu’on va aussi ouvrir les écoles le dimanche (donc demander aux enseignants de venir garder les élèves ce jour-là) pour que ceux des parents qui ne travaillent pas puissent aller faire leurs courses, et que ceux qui travaillent soient débarrassés de la garde de leurs éventuels enfants?
En Grande-Bretagne, bien des commerces sont ouverts 24 h / 24 et 7 j / 7. Est-ce vraiment mieux que du temps où même les cinémas et théâtres faisaient relâche le dimanche?
odette de Lannoy
Mais c’est une honte!Comment dans une école catholique on ose évoquer le gender cette attaque contre la création qui est parfaite.Mais où va t on! Qui admet ce genre de sacrilège. Comment un directeur d’une école catholique peut il laissé faire cet enseignement stupide pour troubler des gamins.Non, mais je rêve Dans quel monde sommes nous arrivés.
incongru
à croire que les gens jeunent le dimanche, pour ne considérer que les courses alimentaires
Jean Theis
En Grande Bretagne les commerces ouverts 7j/7 le sont par des immigrés du Commonwealth qui travaillent en famille et qui ont chacun leur jour de repos à tour de rôle. Comme ils se ressemblent on pense que ce sont toujours les mêmes. Faux. Ils ont aussi besoin que nous de relâcher au moins un jour…
Robert Marchenoir
Cette campagne pour l’interdiction du travail le dimanche est parfaitement hypocrite. Ceux qui la soutiennent devraient promettre :
– De ne jamais acheter une baguette de pain le dimanche ;
– De ne jamais acheter une seule carotte sur un marché le dimanche ;
– De ne jamais prendre le train, l’avion, l’autobus, le métro ou le taxi le dimanche ;
– De tomber stoïquement en panne d’essence sur l’autoroute jusqu’au lendemain, s’ils ont l’imprudence de prendre leur voiture le dimanche sans assez d’essence ;
– De couper leur disjoncteur électrique le dimanche ;
– De ne jamais téléphoner ni utiliser Internet le dimanche ;
– De ne jamais écouter la radio, regarder la télévision, aller au restaurant ou au bistrot le dimanche ;
– De ne jamais acheter le Journal du Dimanche (et d’appeler à son interdiction) ;
– De ne jamais prendre une douche, faire la vaisselle ou se laver les dents le dimanche ;
– De refuser toute réparation de leur chaudière le dimanche si leur chauffage central tombe en panne, même s’il fait moins vingt ;
– D’attendre le lundi matin pour appeler la police, les pompiers ou l’ambulance s’ils se font agresser, si le feu se déclare chez eux ou s’ils ont une crise cardiaque un dimanche ;
Ou alors, de dire clairement et honnêtement : nous appelons à un boycott des seules grandes surfaces qui ouvrent le dimanche.
Et d’expliquer, alors, les motifs prétendument religieux qui autoriseraient le boulanger du coin à faire travailler ses salariés le dimanche, mais pas le directeur de Carrefour ou d’Ikea.
Je serais curieux de savoir quel verset de la Bible fait une telle distinction.
[On peut aussi ouvrir les mairies, les écoles, les ministères, l’assemblée le dimanche…
Cette vision est un peu caricaturale. Il s’agit d’abord de protéger la famille en donnant à tous un jour de repos le même jour. Ce qui n’est pas nécessaire peut rester fermer le dimanche. D’autant que la plupart des commerces sont déjà fermés le lundi. Ils n’ont qu’à déjà ouvrir le lundi…
Il n’est pas question ici de fermer les hôpitaux et commissariats le dimanche.
MJ]
chouan 12
aider la revitalisation du petit commerce, mais vous n’y pensez pas. Quand on est un vrai politique on est attaché a ses amis, c’est-à-dire les patrons des grands groupe, donc le petit commerce en campagne, et d’ailleurs même ce petit commerce n’est plus indépendant (sauf celui qui le tient pour payer toujours plus de charges!) puisque la plupart ont une enseigne de grande surface. Et cerise sur le gateau en général celui qui gère achète sa marchandise le prix que le consommateur le paye dans l’hyper, cherchez l’erreur. Il est grand temps de recréer des circuits courts entre producteurs et consommateurs.
PG
@ Robert MARCHENOIR
Sans aller jusqu’au bout de vos propositions, je leur trouve un certain bon sens : j’aimerais voir la tête de beaucoup des défenseurs du repos dominical, s’ils devaient vivre du samedi 17 h au lundi 8 h. sans une seule boutique de centre ville ouverte, sans un seul marché dominical, avec beaucoup de restaurants fermés, comme dans certains pays européens.
Effectivement, la jeune mère de famille qui vend sur un marché ou dans une boulangerie pâtisserie le dimanche vaut bien la vendeuse d’IKEA.
Nous ne sommes plus au XIX ème siècle : ce qui ne se vend plus en boutique est vendu par des grands groupes sur Internet. Où est le bénéfice social et familial : quand ces grands groupes auront tout fait disparaître en commerces indépendants de centre ville : ils imposeront alors leurs horaires à tous, salariés et consommateurs.
Ce qui doit être fait est une adaptation : il existe des salariés sans famille et sans enfants prêts à travailler le dimanche.
Quand on voit les effets désastreux de la fermeture des pharamacies et des cabinets de médecin le dimanche, qui pousse tout le monde à aller aux urgences hospitalières, on voit bien que tout n’est pas à inscrire dans un système binaire.
Les catholiques seraient plus économiquement et socialement plus crédibles s’ils proposaient un ou deux principes clairs sur le sujet.
Robert Marchenoir
Michel Janva :
Votre exemple n’est pas bon. Les ministères sont bien évidemment ouverts le dimanche ! Pas tous, pas tout le temps et pas pour tout le monde, mais le ministère de la Défense suspend-il les guerres le dimanche ? le ministère de l’Economie suspend-il les crises financières le dimanche ? le ministère des Transports suspend-il les tempêtes de neige le dimanche ?
Mon argument est que la logique anti-travail du dimanche est en réalité une logique néo-marxiste (les grandes surfaces exploitent les pauvres petits consommateurs et les endoctrinent dans le culte de la Marchandise, alors que laissés à eux-mêmes ils vivraient sur de la terre battue, porteraient un cilice et passeraient leurs rares loisirs à lire la Bible ou le programme de Mélenchon, tandis qu’une fois tous les quinze jours il achèteraient de la viande à 35 euros le kilo à leur pitit boucher di proximiti).
Je comprends que des altercomprenants, euh… altermondialistes, tiennent ce discours, mais le Salon Beige ? Ce n’est pas précisément un site de gauche, et de surcroît il affiche des positions libérales !
Vous dites que l’interdiction du travail le dimanche favoriserait la vie de famille, mais avez-vous pensé à ceux qui n’ont pas de famille ? Les étudiants ? Les célibataires ? Les veufs, ceux qui n’ont pas eu d’enfants, ceux dont les enfants sont grands, ceux dont les enfants sont morts, ceux dont la vie de famille s’accommode parfaitement du travail du dimanche ? (Au nom de quoi s’autoriserait-on à dicter aux gens quel jour et à quelles heures ils doivent se retrouver en famille ?) Ca fait du monde !
Il y a des gens qui veulent travailler le dimanche, aussi curieux que cela puisse paraître. Il y a des gens qui ont besoin du supplément de salaire correspondant. Il y a des gens qui ont besoin des services correspondants le dimanche.
En fait, ma thèse est que tout le monde a besoin du travail du dimanche (y compris évidemment ceux qui sont contre). L’étude correspondante n’a sans doute jamais été faite, mais je parie 10 % des actions de Carrefour contre 10 % des actions du pitit bouchi di proximiti, que si l’on interdisait effectivement le travail du dimanche à l’exception, mettons, des hôpitaux, de la police et des pompiers, la vie quotidienne telle que nous la connaissons aujourd’hui s’arrêterait, tout simplement.
En plus des exemples que j’ai donnés, il faudrait arrêter tout le fret mondial le dimanche (bateaux, avions, camions…), la poste arrêterait de transporter lettres et colis le dimanche, le pétrole s’arrêterait de couler dans les pipelines le dimanche, certaines usines s’arrêteraient de fonctionner le dimanche (et donc ne redémarreraient que trois mois plus tard, car il y a des installations qu’on ne peut pas allumer et éteindre comme un grille-pain), il faudrait faire une croix sur le tourisme (hôtels, musées, plagistes fermés le dimanche), et je suis bien sûr que l’on peut ajouter d’innombrables exemples à cela !
D’autre part, ce n’est évidemment pas parce qu’on interdirait à Ikea d’ouvrir le dimanche que des pitits marchands di meubles di proximiti entièrement fabriqués à la main avec amour dans nos villages d’Auvergne rouvriraient en centre-ville, alors que de tels commerces ont disparu depuis quarante ans !
Vous dites que seules les activités nécessaires devraient avoir lieu le dimanche. Mais qui déciderait de ce qui est nécessaire ? Le praesidium du soviet suprême ? Le conseil des cardinaux ? Voilà qui est peu compatible avec le libéralisme que vous défendez par ailleurs dans ces pages.
De quelque façon qu’on prenne le problème, le débat sur le travail le dimanche se résume à vouloir interdire à ses concitoyens de fréquenter les centres commerciaux le dimanche.
Ce n’est pas une motivation légitime, à mon avis.
Et puis il faudrait un peu regarder vers la Grèce, où, en ce moment, il y a bien d’anciens propriétaires de magasins, d’anciens employés et d’anciens clients qui aimeraient bien que les commerces soient ouverts, non pas le dimanche, mais le lundi, le mardi, le mercredi et les autres jours de la semaine !
La France est, en réalité, dans la même situation de faillite virtuelle que la Grèce, et on chercherait à dissuader des gens qui veulent travailler, des gens qui veulent vendre et des gens qui veulent acheter ?
Le degré de déni de réalité “dans c’pays” est terrifiant.
[Encore une fois, vous ne pouvez pas mélanger les services nécessaires et ce qui est accessoire, et qui d’ailleurs est fermé le lundi. Pourquoi les boulangeries de mon quartier sont-elles ouvertes le dimanche matin et fermées le lundi ? Je préfère aller chercher ma baguette le lundi et je n’ai pas ce plaisir. Et la caissière n’a pas le choix de venir ou de ne pas venir, sinon on la remplace.
Ce n’est pas ce que j’appelle une liberté.
Par ailleurs, des chercheurs des universités DePaul (Chicago) et Ben-Gurion (Israel) ont établi une corrélation entre l’ouverture des magasins le dimanche et un déclin dans le nombre de femmes se disant heureuses. L’étude porte sur dix Etats américains qui avaient des lois limitant l’ouverture le dimanche, et les ont abrogées ces dernières années (avec comme point de comparaison six Etats où la loi n’a pas changé). Dans ces dix Etats, la proportion de femmes se disant « assez heureuses » a décliné de 17%, et la proportion se disant » pas heureuses » a augmenté (la même évolution n’a pas été constatée chez les hommes). Les chercheurs émettent trois hypothèses d’explication :
-L’ouverture le dimanche entraîne le travail le dimanche, notamment de femmes – or « les gens n’aiment pas travailler le dimanche », dixit un chercheur;
-Il a déjà été montré dans d’autres études que l’ouverture le dimanche a un effet délétère sur le comportement des adolescents, qui se répercute sur le moral des mères;
-L’ouverture conduit à une baisse de la pratique religieuse, or, selon un chercheur « notre étude tend à fournir davantage d’indices indiquant que la pratique religieuse chez les femmes a une influence sur leur moral ».
Ce n’est peut-être pas une motivation légitime, mais on ne me fera pas croire que les employés de chez Carrefour ou Auchan sont motivés à l’idée de travailler le dimanche quand leurs enfants sont à la maison.
MJ]
HV
@ Robert Marchenoir:
Vous qualifiez le SB de “liberal”, mais je crois qu’il s’agit ici d’une des questions qui divisent les liberaux/libertariens et les (liberaux?-)conservateurs.
Outre la question religieuse (le respect du commandement divin, mais aussi l’effet de dechristianisation), les conservateurs ont a l’esprit que l’activite economique est subordonnee au bien commun, et que ce dernier dicte une synchronicite du jour de repos dans les familles et la societe.
On peut comparer le travail du dimanche au phenomene qui pousse les spectateurs d’un stade a se lever: tous ont, individuellement, un interet marginal a se lever (le premier pour mieux voir, les suivants parce que le type devant eux s’est leve et qu’ils ne voient plus rien); mais l’effet final est negatif: personne ne voit mieux qu’avant, mais tout le monde est debout au lieu d’etre confortablement assis. Pour un libertarien, il faudrait laisser la foule de la metaphore se pieger elle-meme dans ce processus; pour un conservateur, le bien commun peut dicter de l’en garder.
Sur le fait que la synchronicite du repos (et du travail, d’ailleurs) est plus important pour les familles et la societe que la quantite meme de repos, je vous renvoie a l’experience stalinienne relatee dans cet article de The Economist: http://www.economist.com/node/3987228
Extraits:
“[Josef Stalin] rationalised the Soviet calendar in 1929. Workers were given every fifth day off, but their shifts were staggered, so that factories could run without interruption. The staggered week appealed rather less to the people who worked it, however. According to Witold Rybcynski’s 1991 book about leisure, “Waiting for the Weekend”, Stalin’s four days on, one day off, was unpopular, even though it was less onerous than the six-day week that preceded it. Families and friends rarely had the same day off; administrative staff rarely worked at the same time. After less than three years, the staggered working week was abandoned.”