Le supérieur de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, Don Davide Pagliarani, a été interrogé dans Dici. Extrait :
Le paragraphe IV des Statuts prévoit : « Dès que la Fraternité aura des maisons dans différents diocèses, elle prendra les mesures nécessaires pour obtenir le statut d’institut de droit pontifical ». Cela conduit à la question suivante : comment peut-on remplir ce souhait de notre vénéré fondateur dans la crise actuelle de l’Église ?
Les statuts de la FSSPX ont été approuvés en 1970 au niveau diocésain. Il était tout à fait normal que notre fondateur ait déjà en vue une approbation à un niveau supérieur, puisque la Fraternité était destinée à s’étendre dans le monde entier.
Mais chacun sait que, malgré tous ses efforts en ce sens, Mgr Lefebvre, au lieu de connaître une approbation de droit pontifical, a subi en 1975 une suppression pure et simple de la FSSPX. Depuis cette date, les Supérieurs de la Fraternité, à commencer par Mgr Lefebvre lui-même, ont à tour de rôle envisagé des solutions, mais ces dernières se sont systématiquement heurtées, de la part du Saint-Siège, à des exigences doctrinales tout simplement inacceptables. Celles-ci auraient certes permis sa reconnaissance canonique, mais elles auraient en même temps détruit sa valeur morale. Ainsi, pour prendre l’exemple le plus récent, lorsque la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, en 2017, a voulu exiger de la FSSPX qu’elle accepte les enseignements du concile Vatican II, et reconnaisse la légitimité de la nouvelle Messe : si la FSSPX avait accepté les conditions imposées à ce moment-là, elle aurait tout simplement nié ce qu’elle est, en reniant ce à quoi elle est attachée de toutes les fibres de son être.
Il me semble donc que, à l’instar de ce qui fut toujours la conduite de notre fondateur, il convient de suivre la Providence et non pas de la précéder.
Les contacts avec le Vatican vont-ils donc continuer à stagner ?
Cela ne dépend pas de la FSSPX, ni de son Supérieur général. Le Vatican lui-même a préféré pour l’instant ne pas reprendre les discussions doctrinales, que la FSSPX proposait dans le but de mieux exposer sa position, et de montrer son attachement à la foi catholique et au Siège de Pierre.
Ce qui est étonnant, c’est que le Vatican nous demande en même temps de régulariser d’abord notre situation canonique : cela crée une situation inextricable et intrinsèquement contradictoire, puisque la possibilité d’une reconnaissance canonique de la FSSPX est elle-même constamment soumise à des exigences de nature doctrinale ; lesquelles, encore et toujours, demeurent pour nous absolument inacceptables.
J’ajouterais que, quels que soient les avis personnels à ce sujet, il est important de veiller à ne pas se préoccuper d’une manière quasi-obsessionnelle de ces questions très délicates, comme cela a pu parfois se produire. Il faut nous rappeler que, de même que la Providence nous a guidés et assistés depuis notre fondation, de même, à son heure, elle ne manquera pas de nous donner les signes suffisants et proportionnés qui nous permettront de prendre les décisions que réclameront les circonstances. Ces signes seront tels que leur évidence sera facilement perceptible par la Fraternité, et que la volonté de la Providence apparaîtra ainsi clairement.
Pendant cette année 2020, la crise liée à la Covid-19 a affecté aussi l’Église et a conditionné ses activités. Comment voyez-vous cela ?
Il est intéressant de noter qu’avec la crise due à la Covid, la hiérarchie ecclésiastique a manqué une occasion en or de pousser les âmes vers la véritable conversion et la pénitence, ce qui est toujours beaucoup plus facile lorsque les hommes redécouvrent, en quelque sorte, leur nature mortelle. De plus, cela aurait été l’occasion de rappeler à l’humanité, prise de panique et désespérée, que Notre Seigneur est « la Résurrection et la Vie ».
Au lieu de cela, la hiérarchie a préféré interpréter l’épidémie d’une façon écologique, en parfaite cohérence avec les principes chers au pape François. En pratique, la Covid ne serait autre chose que le signe de la rébellion de la Terre contre une humanité qui aurait abusé d’elle par l’exploitation démesurée de ses ressources, la pollution des eaux, la destruction des forêts, etc. Cela est lamentable et incompatible avec une analyse où subsisterait un minimum de foi et de conscience de ce qu’est le péché, qui se mesure par rapport à la majesté offensée de Dieu, et non par rapport à la pollution de la Terre.
Dans son message pour la Journée mondiale de prière pour la sauvegarde de la création (Jubilé de la Terre), le 1er septembre 2020, le pape lui-même nous enseigne à quelle conclusion morale la pandémie doit nous conduire : « La pandémie actuelle nous a amenés, en quelque sorte, à redécouvrir des styles de vie plus simples et durables. […] Il a été possible de constater comment la terre réussit à se reprendre, si nous lui permettons de se reposer : l’air est devenu plus sain, les eaux plus transparentes, les espèces animales sont revenues dans de nombreux endroits d’où elles avaient disparu. La pandémie nous a conduits à un carrefour. Nous devons profiter de ce moment décisif pour mettre fin à des activités et à des finalités superflues et destructrices, et cultiver des valeurs, des liens et des projets génératifs… » Bref, la crise de la Covid nous pousse de nouveau à la « conversion écologique », pierre angulaire de l’encyclique Laudato si’. Comme si la sainteté pouvait se résumer dans le respect de la planète. […]