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Pays : International

Le vrai problème de la Tunisie

D'Alain Chevalérias dans L'Homme nouveau :

T "Jeune Tunisien de 26 ans, Mohamed Bouazizi a poursuivi des études à l’université. Mais il ne trouvait pas de travail. Pour subvenir aux besoins de sa famille, il vendait des fruits et légumes dans la rue de l’agglomération de Sidi Bouzid. Le 17 décembre, des agents municipaux ont confisqué sa marchandise, l’accusant de se livrer à son commerce sans autorisation. Le jeune homme a alors voulu porter plainte, mais les autorités ont refusé de recevoir cette dernière. Désespéré, il s’est aspergé d’essence et a tenté de se suicider par le feu. Il a succombé à ses blessures quelques jours plus tard. Bouazizi n’est pas seul dans cette situation en Tunisie. Comme lui, des dizaines de milliers de jeunes sortis de l’université cherchent désespérément du travail. […]

Le sentiment de partager un destin commun avec Bouazizi a très certainement dopé les masses de déçus, faisant du jeune homme un symbole expiatoire pour le pouvoir. En tout cas, Sidi Bouzid s’enflammait. Puis, le 25 décembre, au cours des affrontements avec la police, un autre jeune homme tombait. Comme une traînée de poudre, les émeutes s’étendaient à travers la Tunisie. […] Puis, le 26, un autre jeune mettait fin à ses jours en s’électrocutant volontairement sur une ligne à haute tension. […] Pour surmonter la crise, un rien décalé, le Président Ben Ali n’a rien trouvé d’autre que de procéder à un remaniement ministériel.

Facile, dans ces circonstances, de clouer le pouvoir tunisien au pilori. Certes, la carence de vie démocratique et la corruption de la belle-famille du chef de l’État, le clan des Trabelsi, entretiennent un climat délétère dans le pays. On oublie cependant les nombreux mérites du régime tunisien. D’abord, il a lutté avec une efficacité remarquable contre l’islamisme, allant jusqu’à s’attaquer à son idéologie, interdisant la polygamie et favorisant l’accès des jeunes filles à l’enseignement supérieur. […] La Tunisie de Ben Ali a fourni des efforts remarquables pour développer le pays. En est témoin son PIB par habitant, qui frise les 7 000 euros par an, quand il n’est que d’un peu plus de 5 000 euros en Algérie et de 3 500 euros au Maroc. Or, faut-il le remarquer, la Tunisie ne dispose ni de phosphates, comme le royaume chérifien, ni de gaz ou de pétrole en quantité, comme l’ancienne colonie française. Elle forme son PIB grâce à la productivité de son agriculture et à la création d’industries qui s’ajoutent à ses investissements touristiques. Meilleure élève du Maghreb, on voit la Tunisie victime de son succès. Sa population, ceux en particulier qui peinent au chômage, ne voit pas le chemin parcouru, mais celui qui reste à faire pour atteindre le même niveau de prospérité que les pays du Nord. Voilà, ajouté aux effets de la crise, qui a provoqué un tassement de 16% du PIB en 2008, où se situe le vrai problème de la Tunisie."

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8 commentaires

  1. Le deuxième problème est bien le “trop d’Etat”. Je comprends le désespoir de ce jeune homme et de ses semblables : ne pas trouver de travail est une chose, mais faire un travail difficile que des fonctionnaires vous interdisent faute d’autorisation sachant que ce travail vous permet de faire vivre votre famille en est une autre. Et aggravée par le fait d’être condamné à toujours perdre, au silence perpétuel puisqu’aucune plainte n’est acceptée.
    Ben Ali a peut-être eu une action positive face à l’islamisme ; cela ne l’absout pas d’autres fautes. Le socialisme de l’état providence est tout aussi néfaste.

  2. Le plus terrible c’est qu’à la suite de cette révolution populaire, la réalité du pouvoir n’est plus assurée. Qui va succéder à Ben Ali ? L’armée ? Les islamistes ? L’inquiétude demeure et les Tunisiens se posent des tas de questions sur le devenir de leur république…
    La Tunisie qui pourtant est un pays du monde musulman risque de perdre gros dans tous les domaines si l’instabilité politique demeure…
    Que va-t-il se passer dans les mois à venir ? Réaction de l’armée vis-à-vis des troubles politiques ? Coup d’Etats successifs ? Révolutions de palais ou dans la rue ? Guerre civile ?
    On ignore l’avenir de ce pays qui en fait était un bon modèle en Afrique du Nord.
    C’est aussi le pays où ma grand-mère est née (sous le protectorat il y a plus de 103 ans), alors je me sens un peu concerné par les évènements qui s’y déroulent…

  3. On pourrait par ailleurs saluer les décisions successives de nos propres gouvernants lors de cette crise… On voit tout d’abord MAM “voler” au secours de Ben Ali puis Paris refuser d’accueillir le président déchu. Quel beau paradoxe une fois de plus… C’est ce qu’on appelle : “Retourner sa veste”. Mais bon, on est habitué…

  4. Quel contraste avec nos petits commerces de hasch et autres produits d’importation colombienne si rémunérateurs à Barbès ou dans le 9-3!et qui ne nécessitent pas d’être passé par H.E.C!
    Ils sont sûrement plus profitables et moins menacés…et vont provoquer une nouvelle vague d’arrivées pour cause “d’asile politique” même si Ben Ali s’est fait la malle en prenant les voiles…
    Attendons “l’effet dominos” en Algérie et au Maroc!

  5. le changement de régime ne fera pas baisser le prix de la semoule. Les gens attendent trop du gouvernement. Et ils abandonnent un diable qu’ils connaissent

  6. La Tunisie est le 5ème producteur mondial de phosphates et se trouve pratiquement autosatisfaisant en énergie par sa production nationale.
    Les chiffres pour ces pays sont très instables et ne correspondent pas aux mêmes critères de collection que les notres et de ceux de ses voisins de telle sorte qu’ils ne peuvent être directement comparés, les années de production ne sont par ailleurs souvent pas complètes selon les pays.
    Les chiffres font partie de la stratégie économique pour de nombreux pays.
    Il est généralement admis une série régulière qui résulte d’un même registre, on en compare alors les évolutions.
    PNB 2009 :
    Tunisie : 3 564 en $ France : 42 864 $
    Algérie : 3 876 en $ Allemagne : 41 309 $
    Maroc : 2 789 en $ UK : 35 950 $
    Je ne peux accepter le principe du maintien d’une dictature par la pseudo nécessité des lutter contre l’islamisme, discours très onusien.
    L’Islamisme vient de la pauvreté. (voir post au dessus)

  7. Un raisonnement à courte vue qui fait abstraction de la financiarisation de l’économie mondiale et de la fuite des capitaux vers l’Asie. Dans un monde globalisé marqué par l’uniformisation des comportements de consommation – une tendance apparemment encouragée par l’ex leader de la Tunisie – les variables d’ajustement entre les économies nationales sont purement comptables et financières. Autant la Tunisie a pu bénéficier de la faveur des investisseurs avant la dernière crise, autant elle pèche aujourd’hui par des gains de productivité qui ne compensent plus l’effondrement des coûts salariaux en Europe et dans certains pays d’Asie qui jouissent aujourd’hui de la confiance des fonds d’investissemnt comme le Vietnam, le Bengladesh, l’Indonésie ou les Philippines. Même l’Inde où les salaires des ingénieurs IT a beaucoup augmenté a du mal à suivre. A tel point que l’outsourcing se rapatrie vers des pays d’Europe de l’Est, comme la Bulgarie ou la Roumanie, où les entreprises dites de nouvelles technologies bénéficient de franchise d’impôts. Il faut croire que même les call centers ne suffisent plus à apaiser des populations qui découvrent brutalement l’envers du décor, une fois qu’elles ont basculé dans un cycle économique baissier de désendettement des banques. Malheureusement il n’existe pas encore de produits dérivés basés sur l’évolution tendancielle des salaires qui permettraient aux salariés de se couvrir contre une baisse des revenus. La lutte contre l’inflation impose des sacrifices qui passent par le filtrage des flux monétaires entre les compartiments M3 et M1, surtout quand les hausses des prix alimentaires sont artificiellement créées par la spéculation. Pourquoi les tyraneaux locaux ne n’expliquent-ils pas à leurs sujets exclavagisés par la Finance mondialisé?

  8. Est-ce qu’un pays musulman qui a instauré une laïcité d’état a une chance de perdurer sans une dictature?
    Le problème est de savoir si la laïcité est compatible avec l’islam, sans système autoritaire.
    D’autre part, l’adhésion de la Tunisie aux politiques de Planning Familial a fait chuter les naissances.
    Quel avenir politique et économique pour un pays dont les ressources ont été mal gérées, dont la population jeune émigre en grande partie et dont le renouvellement des générations n’est pas assuré?

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