Le cardinal Jaime Sin est mort mardi après une longue carrière politico-religieuse qui culmina avec le renversement de Ferdinand Marcos. Mgr Sin, victime d’une attaque cardiaque en octobre dernier, a succombé des suites de problèmes de reins et de diabète à l’âge de 76 ans. Ancien archevêque de Manille, il était à la retraite depuis 2003. Depuis son retrait, il vivait reclus dans sa villa d’une banlieue de Manille. Son état de santé ne lui avait pas permis de se rendre à Rome participer au conclave qui avait élu le pape Benoit XVI en avril, ni aux funérailles de Jean Paul II.
Mgr Sin restera dans l’histoire pour avoir joué un rôle crucial dans le renversement de Marcos en 1986, en jetant le poids de l’église dans la révolte populaire qui mit fin à 20 ans de dictature, sans effusion de sang, le "people power". Il avait été un des rares critiques de l’instauration de la loi martiale par le président Marcos en 1972. Son courage à attaquer ouvertement le régime dans ses lettres pastorales lui avait valu une grande popularité et avait renforcé l’influence de l’église.
Quinze ans plus tard, il avait également soutenu les classes moyennes appuyées par l’armée dans leur mouvement contre le président Joseph Estrada, chassé du pouvoir pour corruption en 2001. Les présidents Marcos et Estrada avaient été remplacés par deux catholiques ferventes, Corazon Aquino et la dirigeante actuelle, Gloria Arroyo, qui toutes deux ont bénéficié de l’appui et des conseils du cardinal.
Ce fils d’un immigré chinois et d’une Philippine qui avaient eu seize enfants, il était le 14è, se moquait ainsi de son nom, qui signifie "pêché" en anglais, en disant que jamais l’église ne nommerait un "cardinal Sin".
Défenseur de la démocratie en politique, il se montra conservateur en matière de foi. Lorsque que Fidel Ramos, un protestant, fut élu à la succession de "Cory" en 1992, Mgr Sin s’en prit à une administration qui voulait promouvoir le contrôle des naissances pour réduire la pauvreté. Bien qu’il eut été déjà malade à l’élection de Joseph Estrada en 1998, il en fut un des critiques réguliers et appela à son départ après l’éclatement d’un scandale de corruption en novembre 2000 qui devait balayer son administration quelques mois plus tard.
Le cardinal avait déclaré lors de son retrait en 2003, que "la politique sans le Christ est le plus grand fléau de notre nation."
Un exemple pour ses pairs.