Dans Famille chrétienne, le père Buttet se penche sur cette question délicate :
"Le commandement de Dieu est en effet incontournable : « Tu ne tueras pas ! » Il ne souffre aucune exception. Pourtant le mal, la violence existent… C’est pourquoi, l’Église a placé en face de cet impératif « Tu ne tueras pas ! » – socle incontournable de toute vie en société – le principe de la légitime défense.
Ce principe concerne aussi bien les personnes que la communauté humaine. Il ne saurait servir d’exception à l’interdit de meurtre (Catéchisme de l’Église catholique § 2 263). Le but de la légitime défense est la préservation de la vie d’une personne – la sienne ou celle d’un autre – ou d’un corps social. Dans la situation de légitime défense, ce qui est recherché volontairement, c’est la préservation de la vie injustement attaquée. Cette défense peut avoir pour effet la mort de l’agresseur, mort qui n’est pas voulue en tant que telle mais qui sera alors une conséquence de la défense légitime de l’innocent agressé.
C’est avec cet éclairage qu’il faut envisager le sujet de la peine de mort. Comme il s’agit d’appliquer un principe général à des situations particulières tant historiques que personnelles, la vertu de prudence doit être exercée. C’est pourquoi, les jugements prudentiels de l’Église ont évolué au cours des siècles à ce sujet. L’Église n’a pas transigé avec le principe intangible « Tu ne tueras pas » ; elle a cherché à circonscrire le champ d’exercice de la légitime défense, notamment en ce qui concerne un État, particulièrement en matière de violence militaire (droit à la guerre et droit dans la guerre) ou de violence criminelle (droit pénal).
La peine de mort ne saurait pas (ou plus) être la sanction pénale d’un crime, fût-il le plus ignoble. Il est juste que les pouvoirs publics sévissent face à la violation des droits personnels et sociaux, à travers l’imposition au coupable d’une expiation adéquate de la faute (Evangelium vitae, § 56). Mais la peine de mort ne peut pas être la sanction d’un crime même odieux ou la façon d’assouvir le besoin de « vengeance » face à l’inacceptable.
La peine de mort pourrait être appliquée si – et seulement si – elle est l’unique moyen praticable pour protéger efficacement de l’injuste agresseur la vie d’autres êtres humains (légitime défense). « Mais si des moyens non sanglants suffisent à défendre et à protéger la sécurité des personnes contre l’agresseur, l’autorité s’en tiendra à ces moyens, parce que ceux-ci correspondent mieux aux conditions concrètes du bien commun et sont plus conformes à la dignité de la personne humaine » (Catéchisme de l’Église catholique § 2 267).
Le pape François synthétisait récemment cette pensée : « La peine de mort est inadmissible, quelle que soit la gravité du délit du condamné. C’est une offense à l’inviolabilité de la vie et à la dignité de la personne qui contredit le dessein de Dieu pour l’homme et la société, et sa justice miséricordieuse ». Si la peine de mort d’un coupable n’est pas légitime sauf en des circonstances exceptionnelles, que dire alors de la peine de mort infligée arbitrairement par l’État létal à des innocents, comme l’enfant à naître, la personne handicapée ou âgée ?"