Suite de l'entretien donné à Présent par le Dr Jokin de Irala sur le livre qu’il a écrit avec Matthew Hanley (postfacé par Mgr Aillet) : L’amour face au sida. Extrait :
"Quel est l’intérêt d’un chapitre sur « la perspective chrétienne » dans un ouvrage qui aborde sous un angle scientifique la prévention du sida ?
Cet intérêt est évident dans la mesure où, habituellement, les campagnes de promotion du préservatif sont accompagnées d’autres, plus ou moins franches, contre l’Eglise catholique à cause de sa position face aux préservatifs. Nous considérons qu’il est important d’expliquer que la position de l’Eglise n’est nullement en contradiction avec les données scientifiques. Aucun pays n’a réussi à freiner l’épidémie du sida avec les politiques exclusivement centrées sur la promotion du préservatif. En revanche, les seuls pays qui, pour le moment, y sont parvenus, ont fondé leurs campagnes sur le retard du début des relations sexuelles chez les jeunes et la monogamie mutuellement fidèle chez les adultes qui ont des relations sexuelles. Cela fait des années que l’Eglise le propose à partir de sa conviction – par révélation et par tradition – qu’il s’agit là de la façon de vivre la sexualité la plus conforme à la nature humaine et donc au bonheur de tout être humain. […]
Dans la pratique, les études confirment que sur 100 personnes ayant des relations sexuelles sur une année, et où il y a une personne infectée et une autre qui ne l’est pas, environ 5,7 vont être contaminées. En utilisant le préservatif dans tous les cas et correctement, ce risque est réduit de 80 % (80 % de 5,7, soit 4,56), ce qui signifie que le nombre d’infectés sera à la fin de 1,14 (5,7- 4,56). Le problème est que même si cette probabilité est théoriquement faible, il s’agit d’une maladie sans guérison et mortelle ; la probabilité s’accumule au fur et mesure que le nombre de rapports augmente et de plus le préservatif est modérément efficace pour éviter d’autres infections de transmission sexuelle qui sont graves et qui n’ont pas de cure définitive comme le virus herpès ou le virus du papillome humain qui constituent aujourd’hui de grandes épidémies silencieuses. […]
Que pensez-vous de certaines campagnes gouvernementales de prévention du sida qui ont eu lieu en Espagne et en France pour inciter les jeunes à utiliser le préservatif ? La précocité des relations sexuelles peut-elle augmenter le risque de sida ?
Simplement, elles ne tiennent pas compte des connaissances scientifiques actuelles. Elles font abstraction du principe de santé publique qui consiste à différencier les messages préventifs en fonction des groupes cibles. Dans de nombreux pays, le même message contre le sida est délivré à ceux qui pratiquent le sexe commercial, aux consommateurs de drogues par voie intraveineuse et aux jeunes de 13 ans qui n’ont jamais eu de relations sexuelles. Ceci est absurde et irresponsable. De plus, il y a des campagnes qui supposent l’existence d’une multiplicité de partenaires sans mettre en garde contre ce comportement, comme si l’emploi du préservatif éliminait le problème associé au fait d’avoir plusieurs partenaires. L’évidence scientifique montre que la réduction du nombre de partenaires sexuels est cruciale pour lutter contre l’épidémie mais trop de gens l’ignorent sans que rien ne soit fait pour les en informer. Par ailleurs, plus les relations sexuelles sont précoces et plus le nombre total de partenaires sexuels risque d’être élevé dans la vie, ce qui augmente aussi le risque d’être touché par une infection de transmission sexuelle. […]
Nous avons simplement voulu divulguer, en nous appuyant sur des études scientifiques, le fait qu’aucune campagne générale centrée sur le préservatif, dans aucun pays, n’a réussi à diminuer le sida tandis que les seuls qui y sont parvenus ont mis en œuvre une stratégie plus raisonnable de ciblage du message préventif : ils ont recommandé aux jeunes de retarder le début de leurs relations sexuelles et aux adultes d’avoir des relations mutuellement monogames. Et quant à ceux qui décident librement de commettre l’erreur de courir le risque de s’infecter, il s’agit de les informer que le préservatif réduit leur risque mais ne l’élimine pas complètement."