L’historien tchèque et diplomate à l’Otan Petr Lunak livre dans Planification de l’impensable-Projets de guerre tchécoslovaques 1950-1990, publié aux Éditions pragoises Dokoran, quelques secrets de la guerre froide. Il se fonde sur 15 documents tirés des archives militaires de l’ex-Tchécoslovaquie. Celles-ci révèlent que l’armée tchécoslovaque avait été chargée par l’ex-Union soviétique d’opérer en cas de guerre une offensive sur le territoire français en vue de conquérir Langres, Besançon, Épinal, puis Lyon.
Aux termes d’un plan d’opération daté du 14 octobre 1964, approuvé par le président tchécoslovaque, Moscou avait demandé à l’armée tchécoslovaque de «vaincre les armées occidentales dans le sud de l’Allemagne de l’Ouest (ex-RFA) afin d’opérer au bout d’une semaine près de la frontière française». Après la prise de Lyon par les Tchécoslovaques, l’Armée rouge était censée prendre le relais pour atteindre les Pyrénées. Ces documents révèlent surtout que Moscou envisageait d’utiliser éventuellement ses armes nucléaires pour parvenir à ses fins. Le plan, qui prévoyait «130 tirs nucléaires pour atteindre Lyon», est resté intact jusqu’en 1986, date à laquelle Mikhaïl Gorbatchev lançait la perestroika. En 1989, après la chute du Mur de Berlin, il fut édulcoré de manière à proposer deux options, défensive et offensive. Et en janvier 1990, alors qu’il n’était plus qu’une relique de la guerre froide, il fut de nouveau modifié à la demande de Vaclav Havel, devenu président de la République tchèque.
Pour Petr Lunak, ces documents révèlent la vraie nature du régime soviétique
"qui a élaboré cette stratégie très agressive au début des années soixante en dépit d’une détente relative entre l’Est et l’Ouest et alors que l’Otan n’avait jamais envisagé d’offensive terrestre sur le territoire du pacte de Varsovie".