Lu ici :
"Le Sénat examine en ce moment la proposition de loi de simplification du droit. […] Le gouvernement a proposé un amendement de simplification d'une disposition très technique de la loi de 1905 sur la séparation de l'église et de l'Etat. Dans cette loi, il existe un article 22 qui prévoit que les associations cultuelles peuvent constituer un fond de réserve pour les frais et l'entretien du culte. Mais ce fond ne peut jamais dépasser une somme égale à trois fois la somme moyenne dépensée pour les frais de culte pendant les cinq dernières années. Cette réserve ne peut être utilisée que pour les frais directs de culte, et pas pour autre chose. Si en 1905, on pouvait craindre l'usage que pouvait avoir l'Eglise catholique de ses réserves financières, c'est une règle qui n'a plus lieu d'être aujourd'hui. Non seulement il n'y a plus aucun danger "politique", mais surtout, les associations cultuelles seraient, pour la plupart, bien en peine de constituer des réserves qui pourraient servir à autre chose que leurs dépenses cultuelles.
Cette règle comptable embête beaucoup les trésoriers, car elle les oblige à ne pouvoir mettre en réserve, tous les ans, que l'équivalent de trois fois leur moyenne de dépense annuelle. Il suffit qu'un legs un peu conséquent soit perçu, et il devient impossible de le mettre en réserve, en sachant qu'une association cultuelle ne peut pas verser d'argent à une association loi 1901 et qu'elle ne doit dépenser son argent qu'en vue d'opérations liées à l'exercice du culte. On se rend compte que cette règle est complètement inapplicable. Et cela inquiète les trésoriers, car depuis 2003, ils sont soumis, pour les associations qui ont plus de 153 000 euros de recettes, à une obligation de certification des comptes. Il suffit que l'expert comptable soit un petit peu pointilleux et qu'il regarde si l'article 22 de la loi de 1905 est respecté, constate que non et refuse de certifier les comptes. Le rapport Machelon, rendu en 2006, avait proposé cette petite modernisation, qui ne prête pas à conséquence et ne remet pas en question l'équilibre de la loi de 1905.
Le débat en commission fut très bref. Le rapporteur déclara : "Avis défavorable au n°299 du gouvernement car je suis hostile par principe à toute révision de la loi de 1905. C'est dangereux !" et l'amendement fut rejeté. Le rapporteur s'appelle Bernard Saugey, et c'est l'actuel président de la fraternelle des parlementaires…"
ERRATUM : il existe effectivement un danger en réformant cette loi, c'est de favoriser les associations cultuelles musulmanes, aujourd'hui majoritaires en nombre. Rappelons que par l'encyclique Gravissimo officii munere (Une très grave obligation de notre charge), du 10 août 1906, Saint Pie X a interdit de constituer les associations cultuelles prévues par la loi. Les relations diplomatiques entre la France et le Saint-Siège, qui avaient été rompues unilatéralement par le gouvernement français dès 1904, sont officiellement rétablies en 1921. Des négociations vont déboucher sur un arrangement : l'Église, qui n'a guère le choix, accepte la situation créée par la loi de 1905 en ce qui concerne la mainmise de l'État sur les biens ecclésiastiques, mais le gouvernement français accepte pour sa part la constitution d'“associations diocésaines” conformes au droit de l'Église. Elles seront considérées par l’Etat comme des “associations cultuelles” selon la loi de 1905, alors qu’elles ne le sont pas. Les statuts de ces associations, comme le souligne le pape Pie XI, «ne dépendent ni nécessairement ni directement» de la loi de 1905 (à laquelle ils ne font aucune allusion), mais ils dépendent directement et nécessairement de la hiérarchie de l'Église et du droit canon, au contraire des associations cultuelles de la loi de 1905, qui dépendent directement et nécessairement de l'État. (merci à YD)
Denis Merlin
Il me semblerait possible d’étudier la conformité de ces dispositions avec la constitution. Car Elles sont, pour moi, évidemment contraires à l’autonomie de la raison, donc à la liberté, l’Etat n’a aucun titre arbitraire s’immiscer dans la gestion des associations cultuelles. Le culte et les associations cultuelles ne sont pas une menace en tant que telles. Ces dispositions violent aussi le droit à la propriété privée.
L’argument selon lequel il ne faudrait absolument pas toucher à la loi de 1905 est absurde : il ne faut pas y toucher en ce qu’elle retranscrit le droit naturel (interdiction du financement public), mais il faut y toucher en ce qu’elle viole la liberté religieuse.
Contrairement à ce que dit l’article, l’Eglise n’est pas une menace, d’ailleurs cette disposition concerne tous les cultes (y compris les associations musulmanes).
Denis Merlin
Voici en quoi se décompose la liberté, selon le cardinal Bertone :
“Comme on le sait, il existe trois dimensions constitutives de la liberté : l’autonomie, l’immunité, la capacité d’action. Qui dit autonomie dit liberté de choix : on n’est pas libre si l’on n’est pas placé dans la condition de choisir. L’immunité, en revanche, implique l’absence de coercition de la part d’un agent extérieur. C’est, en définitive, la liberté négative (ou encore la “liberté par rapport à”). La capacité d’action enfin, signifie capacité de choix, c’est-à-dire de poursuivre des objectifs, du moins en partie ou dans une certaine mesure, que le sujet se fixe. L’on n’est pas libre si l’on ne réussit jamais à réaliser (pas même en partie) son projet de vie.”
http://www.zenit.org/article-21794?l=french
Cette loi brime la liberté au moins quant à la capacité de choix, et à l’immunité. L’Etat n’a pas de titre à s’immiscer dans la gestion, sauf malhonnêteté, or ici il s’agit d’une option de gestion sur laquelle l’Etat n’a pas de droit de regard, la disposition législative est abusive, liberticide.
Heli Trottincas
YD est judicieux : comme il n’y a pas d’association culturelle 1905 de catholiques mais seulement d’autres religions notamment islamiques, c’est une bonne chose que ce réglement comptable ne soit pas assouplie, fût ce pour de mauvaises raisons théoriques.
Tonio
La modification de 2002 concernant le plafond à partir duquel les comptes d’associations doivent être certifiés concerne quel type d’association ?
1901 ? => l’Eglise n’est pas concernée
1905 ? => c’est qu’on a déjà touché à cette sacrosainte loi… Et selon votre erratum l’Eglise n’est pas plus concernée.
Diocésaines ? => cela ne se peut puisque selon votre erratum elles ne dépendent pas de l’Etat mais du croit canon.
pg
@ Cher Michel JANVA
C’est là où on voit bien que la revendication de ”laïcité” légale (je ne parle pas des principes,mais des garanties qu’offre la loi de 1905 sur certains points) est utile politiquement face à l’Islam, malgré le foin et le raffut que qq uns ont créé contre la candidate la plus mal aimée de @ Solange, Marine LE PEN….
Denis Merlin
Je crois bien qu’il y a des associations cultuelles catholiques, car ce qui empêchait les diocèses d’en constituer a été levé par un arrangement ultérieur (des années 20, si mes souvenirs sont bons), mais qui dépend de la loi de 1905. En revanche la loi de 1901 régit les associations de droit commun et non les associations cultuelles.
De plus, faire des lois injustes contre une religion est contraire au droit naturel (lire Dignitatis humanae), c’est contraire à l’égalité de tous les citoyens. On ne combat pas pour la justice avec des comportements injustes.