Nouvel extrait de la conférence donnée par Rémi Fontaine sur l'application des principes non-négociables (pour l'intégralité, se reporter au numéro de Présent de demain) :
"Entre l’idéal institutionnel déduit de la philosophie chrétienne (actuellement inaccessible) et la possibilité concrète induite empiriquement ici ou là comme un « isolat » (selon l’expression ethnologique de Jean Raspail), il n’y a pas contradiction. L’erreur est d’opposer dialectiquement les deux modes de besoin ou de n’en retenir qu’un à l’exclusion définitive de l’autre. Entre les micro-chrétientés vicariantes (qui agissent bon gré mal gré comme des anti-corps dans une dissociété nationale) et la chrétienté institutionnelle, il y a la même préoccupation chrétienne du bien commun temporel et surnaturel. Et, à certaines conditions relatives au principe du moindre mal et aux points non-négociables, il peut même y avoir au confluent des deux démarches un front national commun, qui ne néglige évidemment pas l’élection républicaine…
[…] Le « sain et légitime communautarisme » vient aujourd’hui comme un complément indispensable au « style d’action » proposé par la rue des Renaudes, les deux modes d’action se recoupant d’ailleurs dans « la dynamique des réseaux naturels ». Car rien de sain n’est jamais parfaitement fermé ni cloisonné dans le monde organique, contrairement au monde clos (mécanique) et artificiel de l’individualisme et du particratisme.
Disons pour faire court et par un exemple concret, que sans renoncer à agir dans l’Education nationale ni dans l’Enseignement catholique, nous avons aujourd’hui prioritairement besoin de l’alternative des écoles indépendantes […]. On voit du reste comment cette « minorité créative » (pour reprendre une expression de Benoît XVI) commence à faire bouger salutairement les lignes en faisant réfléchir l’Enseignement catholique sous-contrat (voire même l’Enseignement public) à d’autres solutions sinon d’autres alliances, car les deux formes de cet enseignement « privé » n’ont-ils pas finalement partie liée pour défendre la liberté de l’enseignement et le bien des enfants ? Plus ces minorités créatives et alternatives seront organiquement représentées (l’union faisant la force), plus elles pourront agir, par interaction, dans les majorités institutionnelles et aussi par mode électoral…
On l’a vu aussi avec le scoutisme traditionnel (Scouts d’Europe, Scouts unitaires…) qui, par sa vitalité alternative et (sainement) communautariste, a fini par se faire reconnaître ecclésialement et civilement aux côtés du monopole institutionnel du néoscoutisme (Scouts de France)…
Un autre exemple encore ou plutôt une analogie : les communautés traditionalistes ou les communautés nouvelles dans une Eglise en crise, gravement déficiente. Parlant des communautés nouvelles promues par le cardinal Cordes, Benoît XVI a pu écrire à ce dernier en décembre 2010 : « Il est vrai que, pour ce qui est de l’organisation et de la planification, il existait de bonnes raisons de se scandaliser du fait de l’irruption d’expériences nouvelles et imprévues qui ne se laissaient toujours pas incorporer dans les formes d’organisation existantes. Tu as vu que ce qui est organique est plus important que ce qui est organisé (…). Certes, ces mouvements doivent être ordonnés et ramenés au sein de l’ensemble ; ils doivent apprendre à reconnaître leurs limites et à devenir partie de la réalité communautaire de l’Eglise… »"
