Alors qu’un nouveau sondage crédite Éric Zemmour de 11% des intentions de vote, François Billot de Lochner analyse l’exaspération de la médiasphère :
Eric Zemmour, bien qu’officiellement toujours absent de la course à l’Elysée, serait un peu trop présent. Enchaînant les émissions à succès, les matinales, et bientôt les débats, comme celui qui l’opposera jeudi soir à Jean-Luc Mélenchon sur BFM, il fait aussi la une de tous les organes de presse, de Challenges à Marianne. Dans la rue, sur les kiosques, on ne voit que lui.
Ce succès n’a rien d’étonnant : son profil a l’immense mérite de secouer la France endormie, anesthésiée par cinq ans d’un macronisme délétère aggravé par la pandémie. Il occupe la place… que trop d’hommes politiques ont bien voulu lui laisser par leur inconsistance, leur silence, ou encore leurs contradictions renouvelées.
Ceux qui se plaignent de l’omniprésence d’Eric Zemmour sont en fait bien en peine de lui opposer un candidat ou des idées alternatives. La politique, comme la nature, a horreur du vide. Il y a bien une bande de personnages falots, plus ou moins convaincus d’eux-mêmes, qui tentent d’occuper le terrain au centre-droit, et de faire croire qu’une candidature sur l’espace naguère habité par Les Républicains a du sens : il s’agit de Michel Barnier, de Denis Payre, ou encore de Valérie Pécresse et de son alter ego masculin, Xavier Bertrand. Mais perdus dans le brouillard, ils ne parviennent à survivre qu’en singeant avec plus ou moins de bonheur l’éditorialiste. Invité du «Grand Jury» RTL-LCI-Le Figaro, Xavier Bertrand n’a réussi qu’à se positionner relativement à Eric Zemmour, et non à imposer sa personnalité autonome. Il réagit. Il nuance, par exemple en refusant les « amalgames » du polémiste… mais c’est pour mieux assimiler d’autres de ses idées, comme celle du risque de guerre civile en France. Valérie Pécresse ne vaut guère mieux, elle qui n’en finit pas de courir après une droite chimérique en faisant croire qu’elle se méfie de l’Europe et de l’immigration.
Du côté du Rassemblement national, les choses sont assez claires. Les interventions médiatiques des membres du Parti se succèdent, et entérinent une utilisation désormais de plus en plus systématique de la langue de bois journalistique, de l’équilibrisme idéologique sans substance. La communication de Marine Le Pen durant ces derniers jours a été occupée par la privatisation de l’audiovisuel et la nationalisation des autoroutes ou par la maladie d’Alzheimer. La ruralité, l’énergie, elle tire dans toutes les directions pour être sûre de cocher toutes les cases, toutes les niches. Mais sans vision, ces questions restent des détails de l’histoire, oserait-on dire, sans jeu de mots.
La campagne présidentielle n’a pas encore véritablement pris son envol. Elle piétine dans la poussière, elle souffre d’être alourdie par la médiocrité d’individus qui bricolent, sur le dos de la France. Il est temps de reprendre de la hauteur. Eric Zemmour l’a compris, et c’est pour cela qu’il suscite un tel engouement.
Et pourtant il n’est pas candidat à la présidentielle, même si certains militent et lancent des pétitions dans cet objectif.