Un article d’Antoine Bordier :
A l’Ile-Bouchard, à 40 mn au sud de Tours, Eric et Casilda Pommeret viennent de poser leurs valises. Les peintures de leur nouvelle maison familiale sont encore fraîches, et, leur emménagement est tout récent. Après leurs années de mission pour les maisons d’accueil de Chézelles, ils ont décidé de vivre leur retraite à deux pas du lieu où est apparue la Vierge Marie avec l’archange Gabriel en décembre 1947. Entretiens avec un couple qui a choisi de mettre au cœur de sa vie le service de Dieu et des hommes.
Il fait un froid de canard, cette après-midi du 14 décembre 2020, quand nous arrivons à l’Ile-Bouchard. Ce petit village de 1500 âmes est situé en Indre-et-Loire. Selon une tradition locale, avant de rejoindre le roi Charles VII, à Chinon, le 6 mars 1429, Jeanne d’Arc y « a entendu la Messe » dans l’église Saint Gilles. Cette région est avant tout celle des pérégrinations de saint Martin, l’apôtre des Gaules. Et, c’est au 9è siècle que le nom de Bouchard apparaît. C’est celui du seigneur local, qui entreprend de ramener les reliques de saint Martin en Touraine. A son époque, saint Martin, seul, dans un premier temps, puis, avec ses moines et en tant qu’évêque de Tours, a évangélisé toute la région. Est-ce pour cela que la Vierge Marie a décidé d’apparaître en ce lieu, 6 fois, du 8 au 14 décembre 1947 ? La France, en pleine période pré-révolutionnaire, risque de voir le gouvernement tomber entièrement entre les mains des communistes, sous la tutelle de Staline.
Une histoire familiale reliée à l’Ile-Bouchard
Dans leur nouvelle maison, qui se situe à 10 mètres de l’église Saint Gilles, lieu des apparitions, Eric et Casilda se souviennent de cette aventure qui les a menés d’Annecy à l’Ile-Bouchard. Engagés au sein de la Communauté de l’Emmanuel depuis une trentaine d’années, ils racontent :
« On nous a demandé, il y a 7 ans, si nous accepterions de prendre la responsabilité de deux maisons d’accueil : celle de Chézelles et celle de Marigny situées à l’Ile-Bouchard. C’était deux ans avant ma retraite, explique Eric. Et nous avons dit oui. C’est une décision que nous avons prise en famille. Il n’était pas facile de quitter la région d’Annecy pour venir en Touraine. Nous y étions heureux. »
Eric plonge dans ses souvenirs, et, parle de son père, François-Xavier, né en 1904. Clin Dieu familial, « avant la Seconde Guerre Mondiale, il a remplacé le médecin de l’Ile-Bouchard, avec la perspective de lui succéder, par la suite. Puis, finalement, il s’installera à Saint-Malo. » C’est le seul lien qu’ils ont avec ce lieu. Les Pommeret, prennent, donc, la responsabilité de ces deux maisons d’accueil. Ils se rapprochent, à petits-pas, du sanctuaire. Si les apparitions n’y sont pas officiellement reconnues par l’Eglise, le 8 décembre 2001, à la suite d’une enquête, l’archevêque de Tours, Mgr André Vingt-Trois, futur cardinal de Paris, a autorisé les pèlerinages et le culte public. Depuis, le nombre de pèlerins ne cesse d’augmenter pour atteindre les 100 000 par an.
Des pèlerins en nombre à l’Ile-Bouchard
Casilda, qui a des origines en Espagne, explique qu’elle a été « heureuse pendant ces 5 ans d’accueillir de nombreux pèlerins. Nous avons accueilli beaucoup de familles avec leurs souffrances, et, leurs joies. Des familles en difficulté qui viennent faire ‶ l’opération de la dernière chance ″ pour sauver leur couple. Il y a, aussi, des couples qui n’arrivent pas à avoir d’enfants. Ce qui m’a beaucoup touché, notamment, ce sont les pèlerins humbles. J’ai constaté l’expression de cette humilité chez des pèlerins qui venaient à l’Ile-Bouchard dans le cadre de leur paroisse. Ils venaient de toutes les régions de France. » Casilda est touchée, visiblement, par cette humilité, et, cette piété, qui transparaissent simplement. Cela lui rappelle les propos de la Vierge Marie, de 1947 : « Je suis venue, ici, parce qu’il y a des personnes pieuses. » Eric et Casilda arrivent dans la région en mars 2015. Eric continue à travailler pour son groupe industriel basé à Annecy. Il fait les trajets. En 2015, il est complétement libéré de ses obligations professionnelles. Ensemble le couple entreprend des travaux pour restaurer les vieilles demeures : le château de Chézelles, et la gentilhommière de Marigny. Ils rénovent la chapelle du château, et choisissent une iconographie religieuse épurée, qui invite à la prière et au recueillement.
« Marie apparaît comme à l’Annonciation »
Le 8 décembre 1947, Marie apparaît dans l’église paroissiale Saint Gilles, vers 13h00, à des enfants, Jacqueline Aubry, Jeanne, sa petite sœur, Laura Croizon et Nicole Robin. « C’est le miroir de Lourdes », explique Casilda, qui n’a pas fait d’études en théologie, mais qui relie les deux. « A Lourdes, la Vierge Marie apparaît le jour de l’Annonciation (NDLR : le 25 mars 1858) pour dire à Bernadette : “Que soy era l’immaculada Concepciou” (je suis l’Immaculée Conception). Et, ici, Marie apparaît comme à l’Annonciation. » Une nouvelle annonciation en ces temps très difficiles pour la France. Depuis avril 1947, la France vit, en effet, des heures très sombres. C’est la grève générale depuis plusieurs mois, avec son lot de sabotages et les dépôts de munitions tombés entre les mains des grévistes révolutionnaires. L’armée se mobilise. Staline a décidé de prendre le pouvoir politique dans toute l’Europe. La France est au plus mal. Ce 8 décembre 1947, la Vierge Marie confie ce message aux jeunes filles : : ‶ Dites aux petits enfants de prier pour la France, car elle en a grand besoin. ″ 4 jours plus tard la France est définitivement sauvée. Eric, avec son âme et ses talents de musicien relie ces évènements tragiques qui auraient pu faire de la France le premier satellite soviétique d’Europe de l’Ouest, à sa propre histoire, plus personnelle. Au fond du salon, on aperçoit son piano, qu’il pratique quotidiennement. Il parle de l’Annonciation et de cet instrument qu’il a inventé : le Psalme. Il l’a confié à la Communauté Monastique de Jérusalem, dans l’église Saint Gervais, à Paris. Le Psalme est un jeu d’orgue qui entre en harmonie avec une grande cithare, à travers un seul et même clavier. « Le thème de cet instrument était l’Annonciation, raconte-t-il. Et, notre premier appartement, lorsque nous nous sommes mariés, était rue de l’Annonciation à Paris ».
Leur nouvelle mission : le chapelet
Le mandat des Pommeret auprès des maisons d’accueil prend fin en septembre 2020. Leur mission a été accomplie. Au départ, ils n’avaient pas prévu de rester dans la région. Finalement, ils décident, après un petit temps de discernement et un concours de circonstances favorables, de rester sur place. Depuis leur installation dans leur nouvelle maison, ils ont pris la responsabilité du chapelet. Chaque jour, dans la petite église Saint Gilles deux chapelets sont priés. Le premier est prié le matin. Les Pommeret ont en charge le chapelet de 18h00, avec sa diffusion sur la chaîne YouTube du sanctuaire, pendant le confinement, notamment. Pour eux le chapelet est une « humble mission qui est au cœur de notre vie. C’est un cadeau, c’est une prière fondamentale. On repart de l’essentiel, de la simplicité. On parcourt toute la vie du Christ, et, nous méditons les mystères. Il y a une dimension de rayonnement qui nous dépasse. Notre nouvelle mission passe par le chapelet : être là et prier. » Dans leur salon, trône une copie de la Vierge Marie telle qu’elle est apparue. Toute blanche, elle mesure près d’un mètre. Le chapelet semble être de nouveau d’actualité sur ces terres mariales et martiniennes. Lors de son apparition, Marie apprend aux enfants à le prier. Celle qui est invoquée sous le vocable de Notre Dame de la Prière se transforme en pédagogue.
« Je donnerai du bonheur dans les familles »
Casilda et Eric témoignent de leur vie de couple, et, de leur vie familiale. Tous les matins, le couple prie ensemble devant leur belle statue blanche. « Jacqueline, l’une des voyantes (NDLR : décédée en 2016), a rappelé que Marie est venue, aussi, à l’Ile-Bouchard pour parler aux familles. Elle a dit cette phrase, qui à l’époque paraissait anodine parce que les familles étaient unies, et, on ne parlait pas du tout de divorce : “Je donnerai du bonheur dans les familles “. » Eric se souvient de son père veuf avec ses 5 enfants. Il se souvient de la fratrie, qui était authentique et joyeuse. « C’est le combat du siècle. La famille est attaquée. Quand on vient à l’Ile-Bouchard, on vient demander une grâce, comme en témoignent les ex-votos récents, dans la chapelle de l’apparition. Marie aime la famille. Elle vient la sauver. Dans les mystères joyeux du chapelet toute la vie de la famille est décrite, rappelle Eric. Il faut revenir à cette simplicité de la vie de la Sainte Famille, surtout en ce moment » A quelques heures du passage de l’année 2020 à la nouvelle année, impossible de ne pas évoquer la Covid-19. « La Covid-19 fait des dégâts. Cela nous rappelle que Marie, l’Immaculée, n’est pas touchée par le virus du péché. Le vaccin du péché, le Seigneur l’a donné à travers sa Croix et sa Résurrection. » Ils ont pu vivre Noël en famille, avec leurs 15 petits-enfants, dont une petite Faustine. Ils confient, très émus :
« Faustine est au Ciel. Nous la prions. Elle a vécu très peu de temps : 3 semaines. Elle a pu être baptisée et confirmée. Elle a vécu d’amour, et, a même évangélisé. A tel point, que notre dernier fils, qui travaillait à Bruxelles, a parlé d’elle à son manager, un musulman. Ce-dernier, quelques jours plus tard lui a montré une photo de sa salle de prière où l’on voit le nom de Faustine marqué sur une grande affiche. Tous ont prié pour elle. »
Texte et photos réalisés par Antoine BORDIER