Extrait de l’homélie prononcée par le pape au Panama, lors de la clôture des Journées Mondiales de la Jeunesse, dimanche; Les prochaines JMJ se déroulerons à Lisbonne, au Portugal, en 2022.
Nous ne croyons pas toujours que Dieu peut être si concret et si quotidien, si proche et si réel, et encore moins qu’il se rend si présent et agissant à travers une personne connue, comme peut l’être un voisin, un ami, un parent. Nous ne croyons pas toujours que le Seigneur peut nous inviter à travailler et à nous salir les mains avec lui pour son royaume, de manière si simple mais si forte. Il en coute d’accepter que « l’amour divin devient concret et presque tangible dans l’histoire avec tous ses événements amers et glorieux » (Benoît XVI, Audience générale, 28 septembre 2005).
Et de nombreuses fois nous nous comportons comme les voisins de Nazareth, quand nous préférons un Dieu à distance : beau, bon, généreux, bien décrit, mais à distance et, surtout qui ne gêne pas, un Dieu « apprivoisé ». Car un Dieu proche et quotidien, un Dieu ami et frère, nous demande de tirer les enseignements en terme de proximité, de vie quotidienne et surtout de fraternité. Il n’a pas voulu se manifester de manière angélique ou spectaculaire, mais il a voulu nous offrir un visage fraternel, amical, concret, familier. Dieu est réel parce que l’amour est réel, Dieu est concret parce que l’amour est concret. Et, justement, ce « caractère concret de l’amour constitue l’un des éléments essentiels de la vie des chrétiens » (Benoît XVI, Homélie, 1er mars 2006).
Nous pouvons aussi courir les mêmes risques que les habitants de Nazareth, quand, dans nos communautés, l’Evangile veut se faire vie concrète et que nous commençons à dire “mais ces garçons-là ne sont-ils pas enfants de Marie, de Joseph, ne sont-ils pas frères de …? parents de… ? Ceux-là ne sont pas les jeunes que nous avons aidé à grandir ?… Qu’il se taise, comment pouvons-nous le croire ? Lui là-bas, n’est-il pas celui qui cassait toujours les vitres avec le ballon ?”. Et ce qui est né pour être prophétie et annonce du Royaume de Dieu finit enchaîné et appauvri. Vouloir enchaîner la parole de Dieu est une tentation de tous les jours.
Et même vous, chers jeunes, il peut vous arriver la même chose chaque fois que vous pensez que votre mission, votre vocation, que même votre vie est une promesse qui cependant vaut seulement pour l’avenir et n’a rien à voir avec le présent. Comme si être jeune était synonyme de salle d’attente de celui qui attend son heure. Et dans l’”entre-temps” nous vous inventons ou vous vous inventez un avenir hygiéniquement bien emballé et sans conséquences, bien armé et garanti, et avec tout “bien assuré”. Nous ne voulons pas vous offrir un avenir de laboratoire ! C’est la “fiction” de la joie, non la joie de l’aujourd’hui, du concret, de l’amour. Et ainsi avec cette fiction de la joie nous vous “tranquillisons”, nous vous endormons, pour que vous ne fassiez pas de bruit, pour que vous ne dérangiez pas trop, pour que vous ne posiez pas de questions à vous-mêmes et à nous, pour que vous ne vous remettiez pas en question vous et nous ; et dans cet ”entre-temps”, vos rêves perdent de la hauteur, deviennent rampants, commencent à s’assoupir et sont des illusions, mesquines et tristes (cf. Homélie du Dimanche des Rameaux, 25 mars 2018), seulement parce que nous considérons ou vous considérez que ce n’est pas encore votre heure ; que vous êtes trop jeunes pour vous impliquer dans le rêve et construire le demain. Et ainsi nous continuons à vous renvoyer… Et vous savez une chose ? Cela plaît à beaucoup de jeunes. S’il vous plaît, aidez-les à faire en sorte que cela ne leur plaise pas, qu’ils réagissent, qu’il veuillent vivre « l’heure » de Dieu.