L’hebdomadaire italien de gauche L’Espresso a publié une discussion (v.o.) entre l’ancien archevêque de Milan et Ignazio Marino, médecin célèbre et élu sénateur sur une liste des "Démocrates de Gauche", les ex-communistes.
La reprise dans les médias de certains propos du cardinal au cours de cette discussion est de nature à jeter le trouble dans les consciences. L’agence catholique APIC parle d’un "embarras" au Vatican.
Essayons d’y voir plus clair :
1. En quelle qualité le cardinal Martini parle-t-il ?
Clairement pas en qualité de prince de l’Eglise, mais plutôt en tant qu’intellectuel (jésuite) et universitaire. On compte par exemple, dans la transcription de ses propos, au moins une dizaine d’occurences de l’expression "il me semble". Le prélat n’est pas en train d’enseigner. Il réfléchit à haute voix et parle en son nom personnel.
2. Les médias exagèrent-ils ses propos ?
Sans surprise, oui. L’AFP titre : "Préservatif et avortement légal: ‘un moindre mal’ pour un cardinal italien". Or les propos du cardinal sur le préservatif concernent des cas délimités; et il n’utilise pas l’expression du "moindre mal" à propos de l’avortement, sauf quand il parle du cas d’une grossesse "menaçant gravement la vie de la mère". C’est le Prof. Marino qui utilise l’expression de "moindre mal" pour justifier les avortements pour raisons économiques, et le cardinal refuse de la reprendre.
3. Pour autant, le cardinal a-t-il tenu des propos en contradiction avec l’enseignement de l’Eglise ?
Si leur transcription par l’Espresso est exacte, oui. Notamment sur la question de la légalisation de l’avortement. Le cardinal développe en effet sur ce sujet un discours vicié.
Citant Mt 10,28, il oppose d’abord la vie surnaturelle à la vie physique, et argue de cette opposition pour relativiser le respect dû à la vie physique : "la vie physique doit donc être respectée et défendue, mais elle n’est pas la valeur suprême et absolue." Propos dangereux, dans une réflexion sur l’avortement…
Evangelium vitae met justement en garde contre cette méprise (§47) (le terme absolu est surligné par moi, puisque l’argument du cardinal porte dessus):
Certes, la vie du corps dans sa condition terrestre n’est pas un absolu pour le croyant: il peut lui être demandé de l’abandonner pour un bien supérieur […]
Toutefois, personne ne peut choisir arbitrairement de vivre ou de mourir; ce choix, en effet, seul le Créateur en est le maître absolu […].
Ce qui est vrai de sa propre vie l’est bien sûr à plus forte raison dans le cas d’un tiers innocent (EV §57):
[L]e commandement « tu ne tueras pas » a une valeur absolue quand il se réfère à la personne innocente. […] Par conséquent, avec l’autorité conférée par le Christ à Pierre et à ses Successeurs, en communion avec tous les évêques de l’Eglise catholique, je confirme que tuer directement et volontairement un être humain innocent est toujours gravement immoral.
La formule de cette dernière déclaration engage l’infaillibilité du Pape. Les catholiques n’ont plus à spéculer sur la question, et le cardinal Martini pas plus qu’un autre.
Le cardinal semble ensuite aller jusqu’à justifier la légalisation de l’avortement (semble, parce que son raisonnement – procédant par appositions – est ambigu). Il semble dire que l’ "Etat moderne" ne pouvait pas ne pas intervenir pour réguler la situation "sauvage et arbitraire" des avortements clandestins, et se réjouit que la légalisation ait réduit le nombre de ces derniers.
Evangelium vitae répond (§57):
« Rien ni personne ne peut autoriser que l’on donne la mort à un être humain innocent, fœtus ou embryon, enfant ou adulte, vieillard, malade incurable ou agonisant. […] Aucune autorité ne peut légitimement l’imposer, ni même l’autoriser. »
C’est même le "premier devoir" de l’Etat que de défendre les "droits fondamentaux de la personne humaine, spécialement les droits du plus faible." (EV, §101)
Les arguments du cardinal Martini en faveur de l’avortement légal ne sont donc pas recevables, car l’Etat qui raisonne comme lui manque au premier de ses devoirs.
[Les commentaires irrespectueux envers le cardinal seront censurés]
Olivier
Le cardinal Martini est connu pour avoir été le candidats des “progressites” lors du dernier conclave, dont est sorti vainqueur son adversaire supposé conservateur, le cardinal Ratzinger, élu Pape par la grace de Dieu.
Plus rien ne m’étonne donc dans ce bas monde et lorsqu’on voit des évêques (celui d’Arles) faire sonner le tocsin (oui, le tocsin!) le lendemain du 21 avril 2002, je constate que c’est tout simplement leur propre autorité qu’ils sapent sans même s’en rendre compte.
bernard
Comme les récents propos de Mgr Santier, çelà n’a rien de surprenant (tendance progressiste), mais ces propos (si ils n’ont pas été déformés par le journaliste) sont graves dans la bouche d’un cardinal. Ils risquent d’inciter à l’erreur nombre de catholiques mal informés….
Malleus
Plus que “progressiste”, le cardinal Martini depuis longtemps joue -à l’échelle italienne- un vrai rôle de saboteur, à tel point que nombreux sont les croyants à supposer qu’il s’agit d’un infiltré…
Il faut croire que la Razingerophilie générale dans le monde catholique lui est insupportable depuis son exil, pardon, sa retraite hierosolimitaine…
bernard
Oui c clair, qu’il a dû mal digérer l’élection de Benoît XVI lors du dernier conclave. D’autre part, il est de cette génération de jésuites qui s’est livré à toutes les compromissions (dialogue avec les f-maçons,théologie de la libération, etc…). Bref, encore les reste des 70’s…