Le nouveau code pénal, qui devait entrer en vigueur aujourd’hui 1er avril, a été repoussé de deux mois à cause des critiques sur le caractère jugé «liberticide» de certains de ses articles sur la presse. Au nom de la présomption d’innocence et de la garantie de l’image de la personne, les textes sanctionnant la diffamation ont été durcis, prévoyant des peines de prison pouvant aller jusqu’à quatre ans. Ainsi, il est considéré comme diffamatoire d’évoquer un cas de corruption tant que la justice n’a pas tranché.
Même, le Premier ministre porte personnellement plainte au travers de ses avocats. «Cela montre le vrai visage d’un leader qui aime à poser en démocrate à Bruxelles, mais se montre toujours plus autoritaire chez lui», souligne Yavuz Onen, président de la Fondation des droits de l’homme. Les associations de journalistes manifestent contre «le risque de procédures arbitraires qui vont bourrer les prisons de journalistes». Une préoccupation partagée par Reza Turkmen, le juge turc à la Cour européenne des droits de l’homme de Strasbourg, qui a tenu à rappeler que «celle-ci ne peut accepter que des journalistes soient châtiés pour ce qu’ils écrivent».
La question est d’autant plus sérieuse qu’Erdogan est de plus en plus chatouilleux sur son image. Son équipe scrute la presse, à la recherche du moindre article ou dessin jugé offensant ou diffamatoire. Le Premier ministre avait porté plainte contre le journal local d’Eskisehir (Anatolie de l’Ouest), qui avait reproduit la caricature du chat. Là, il a été débouté en première instance. Le président de la cour a souligné qu’«un Premier ministre qui a lui-même fait de la prison pour avoir récité une poésie devrait savoir être plus tolérant»…
Quelle belle démocratie.