De Cyril Brun :
"[…] On ne
parle pas d’individu humain, mais d’être humain ou de personne humaine.
Que représente, en effet, « personne » sinon cette idée de relation à
l’autre. Exactement, personne signifie « parler à travers ». L’individu
est l’être pris isolément, nous dirions presque froidement, sans tenir
compte de l’immense faisceau relationnel dont il est le cœur. Et ce cœur
relationnel a ceci de particulier chez l’homme qu’il en est précisément
maître, auteur et responsable en tant qu’il est la source de son
rayonnement et réciproquement, il est conscient de cette irradiation
permanente des autres et du monde sur lui. Et cette conscience en fait
non pas un être soumis aux aléas, mais un être libre. Libre parce que la
conscience de cette interdépendance native lui permet de ne pas être
déterminé par elle. L’homme est donc responsable de cette
interdépendance qui le façonne, pour ne pas en être l’esclave, mais au
contraire pour être l’artisan de sa liberté. C’est le célèbre
« Connais-toi toi-même » de Socrate. L’homme, à partir du moment où il
est en relation, est nécessairement marqué par ces relations. Mais il
n’en est l’esclave que s’il croit qu’elles ne le concernent pas. En
d’autres termes, celui qui croit être un individu isolé est esclave du
monde qui l’entoure. L’individu est un mythe. Aucune chose et moins
encore un homme, n’est seule. La théorie de l’individu est une
aliénation terrible de l’homme, parce qu’elle l’aveugle et l’enferme en
lui-même, sans pouvoir empêcher que le monde maintienne sur lui son
emprise. L’idéologie de l’individu coupe la relation réciproque, sans
couper (au contraire) la relation de dépendance dont l’individu devient
alors le jouet.La
personne, au contraire, est un être de relation qui sait que ce qu’elle
est vient autant d’elle que des autres et du monde. Plus la personne a
conscience de cela, plus elle est libre. Mais cette personne n’est
véritablement humaine que lorsqu’elle fait de sa liberté une
responsabilité. Cette liberté humaine suppose en effet de prendre au
sérieux la coresponsabilité de toutes les personnes humaines dans cette
solidarité. Ne pas considérer cette responsabilité, inhérente à la
liberté, est en fait un égoïsme mortifère. […]L’individualiste,
pour sa part, nie l’interdépendance native des hommes et du monde. Dans
cette négation, il refuse les conséquences de ses actes et ignore
celles des autres sur lui. L’individualiste est tendu, seul, vers la
réalisation d’un but personnel (car qui dit but dit bien relation)
quitte à écraser les autres individus. […]L’individu
est donc bien un mythe qui asservit l’homme aveuglé par l’illusion de
l’indépendance et l’individualisme est l’effet pervers de ce mythe qui
pousse l’homme à vouloir être et donc exister et se réaliser
par lui-même et pour lui-même. C’est la grosse erreur d’un libéralisme
moderne qui confond liberté et responsabilité avec absence d’entrave et
réalisation de soi. L’homme véritablement libre ne nie pas
l’interdépendance, il la sublime pour grandir. L’homme vraiment
responsable ne répond pas à lui-même, mais de lui-même. […]
Avoc
Le terme “individu” est à utiliser dans une dimension purement quantitative.
Le terme “personne” est à utiliser dans une dimension qualitative.
Ainsi, l’individu est l’un parmi les autres; “individu” s’oppose à “groupe”, “société”, etc.
La “personne” est l’être doué d’une âme, de conscience et de volonté. Dès lors, aussi, d’une capacité relationnelle.
Vous noterez que les socialistes utilisent plutôt le terme “individu”, car -eux- pensent l’être humain comme unité d’une société (qui a leur faveur : la société prime l’individu, selon eux).
L’Eglise parle de “personne” car NSJC est venu rappeler que Dieu s’adresse à chacun dans sa singularité, avec sa propre âme, son être de chair et d’intelligence.