Grégor Puppinck révèle dans Valeurs Actuelles comment l’Open Society de la famille Soros est parvenue à étendre son pouvoir en Albanie, et à travers elle, jusqu’au sein des instances européennes.
Historiquement, ce sont surtout dans les pays d’Europe centrale que l’Open Society Foundations (OSF) est parvenu à déployer une action considérable et à exercer toute son influence. Le cas de l’Albanie est un exemple de cette stratégie d’investissement et d’influence. Ce petit pays compte seulement 2,7 millions d’habitants, avec un PIB par habitant extrêmement faible de 6000 euros par an. Ce serait aussi le pays « le plus touché par la corruption administrative, la plus élevée de la région, avec 57 % des citoyens à qui l’on demande au moins occasionnellement des pots-de-vin et 47 % qui participent effectivement à des transactions de corruption » selon Euractiv. Ce pays est une plaque tournante du trafic de drogue, de la traite humaine, du blanchiment d’argent… C’est aussi une base importante de l’OSF.
Alexandra Soros et Edi Rama : les deux frères
Depuis 2013, le pays est gouverné par le socialiste Edi Rama, un proche de George et Alexander Soros. Ce dernier et Edi Rama se voient régulièrement et se disent « frères ». Entre 1992 et 2020, l’Open Society Foundations de George et Alexander Soros a investi plus de 131 millions de dollars en Albanie, soutenant l’arrivée au pouvoir de M. Rama puis son gouvernement. L’influence de l’OSF en Albanie est donc considérable, au point que Ilir Meta, ancien président de l’Albanie, a accusé George Soros de vouloir capturer l’État.
Après l’élection de M. Rama au poste de premier Ministre, l’une des principales opérations de l’OSF fut de promouvoir la réforme de la justice de l’Albanie. D’après Andi Dobrushi, directeur exécutif de l’OSF en Albanie, « OSF Albanie a été le principal bailleur de fonds de l’ensemble du processus de réforme ». L’OSF a aussi agi en collaboration avec l’administration démocrate américaine, via USAID, et avec l’Union européenne. USAID a versé 60 millions de dollars entre 2000 et 2015 dans le secteur de la justice en Albanie, l’OSF participant à l’affectation de ces sommes. Plusieurs sénateurs américains se sont inquiétés de cette collaboration, car elle viserait, selon eux, à renforcer le pouvoir du gouvernement sur la justice.
La réforme de la justice comprend une réorganisation du système de nomination judiciaire et un mécanisme de sélection anticorruption. L’opposition a dénoncé cette réforme comme visant à permettre au gouvernement de prendre le contrôle du système judiciaire. Le rôle de l’OSF dans cette réforme fut particulièrement dénoncé.
Nomination d’un « avocat » de l’OSF à la CEDH
C’est dans ce contexte qu’en 2019 le Gouvernement albanais devait nommer trois candidats au poste de juge à la CEDH. Le choix du Gouvernement se porta sur Sokol Berberi, Marjana Semini et Darian Pavli. Berberi et Pavli sont d’anciens collaborateurs de l’OSF et acteurs du processus de réforme de la justice, de même qu’Artur Metani, le Président de la commission nationale ayant établi cette short-list. Metani est en outre le frère du ministre socialiste Eglantina Gjermeni, et le conseiller du Premier Ministre.
La presse locale a déploré que ces trois candidats n’aient pas été soumis à la procédure anticorruption, contrairement à ce qu’aurait laissé entendre le gouvernement, car M. Berberi avait quitté la magistrature tandis que M. Pavli n’avait jamais été magistrat.
Finalement, c’est M. Pavli qui a été élu juge à la CEDH par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. Né en 1975 à Vlora en Albanie, Darian Pavli est un ancien élève de la Central European University de Budapest, l’université fondée et financée par George Soros. Il a notamment travaillé pour Human Rights Watch (également financée par l’OSF), ainsi que pour l’Open Society entre 2003 et 2017, notamment à New York. Il a acquis la nationalité américaine. Son travail consistait à engager des contentieux stratégiques dans le but de produire un effet politique par la jurisprudence. Darian Pavli est cousin avec le Premier Ministre Rama.
En 2015, il devient conseiller auprès de la commission parlementaire spéciale sur la réforme de la justice du Parlement d’Albanie, puis retourne à l’OSF, comme directeur des programmes pour l’Albanie. Il collabore aussi avec le Conseil de l’Europe et l’Union Européenne pour la réforme du système judiciaire albanais. M. Pavli a ainsi eu une carrière typique de juriste de l’Open Society.
Le juge Pavli est-il vraiment avocat ?
Il n’a jamais eu d’expérience en tant que juge et se présente comme avocat. Pour pouvoir candidater à la fonction de juge à la CEDH, la réglementation albanaise requiert une expérience de 15 ans comme juge, professeur de droit ou avocat. Or, une question sérieuse se pose quant à la qualité d’avocat (senior attorney) que M. Pavli revendique. En effet, non seulement il ne précise jamais auprès de quel barreau, ni en quelle année il a été reçu, mais il est inconnu des grands barreaux américains tels que New York et Washington. Quant au barreau albanais, il refuse étrangement de clarifier ce point au motif que cela relèverait de la vie privée de M. Pavli. Autre étrangeté, dans des affaires judiciaires auxquelles il a participé, telle l’affaire El-Masri, M. Pavli n’agit pas comme avocat, mais est représenté par un avocat. Un député membre de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe avait soulevé cette question, mais elle ne fut jamais transmise au Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, et est donc restée sans réponse à ce jour.
Une fois nommé à la CEDH, M. Pavli a jugé les affaires contestant la conformité de la réforme de la justice albanaise avec la Convention européenne, se plaçant ainsi à plusieurs reprises en situation manifeste de conflit d’intérêts. Une partie de la presse albanaise a dénoncé ce conflit d’intérêts . Cela est d’autant plus remarquable que la matière de ces jugements est hautement politique et fortement contestée par l’opposition.
La mafia albanaise
Quant à M. Sokol Berberi, qui a aussi travaillé avec l’OSF, il aurait été écarté par le Conseil de l’Europe en raison de son lien de parenté avec Agron Xhafaj, un trafiquant international de drogue. Il est aussi beau-frère de Fatmir Xhafaj, ministre de l’Intérieur de Rama ayant démissionné en 2018, « moins d’une semaine après une grande opération policière contre le crime organisé et le trafic de drogues ». Cela n’a pas empêché le Gouvernement d’Albanie de nommer M. Berberi juge ad hoc à la CEDH, c’est-à-dire juge remplaçant, ainsi qu’au sein de la prestigieuse et influente Commission de Venise : la plus haute autorité européenne en matière de droit constitutionnel… laquelle fut saisie notamment de la réforme de la justice en Albanie.
C’est là un aperçu de l’influence de l’OSF dans un pays pauvre et corrompu tel que l’Albanie.
Cette situation montre combien il est difficile de faire fonctionner une institution paneuropéenne composée pour partie de tels pays. Ce que l’on constate de l’Albanie est aussi vrai d’autres pays européens. Un haut fonctionnaire du Conseil de l’Europe me disait récemment à ce propos : « Tu n’imagines pas à quel point on a du mal à trouver des candidats corrects pour la CEDH dans certains pays. »Cette difficulté est bien compréhensible, mais difficile à accepter lorsqu’elle affecte la composition de la plus haute juridiction européenne.
Thibaud
Je trouve de plus en plus que ce genre « d’enquête » n’a aucun intérêt. C’est l’équivalent des extrême-centristes accusant tous les OTANO-critiques d’être « payés par Poutine ».
Est-ce que les juges de la CEDH sont payés par Soros ? Sans doute mais ils sont également complètement sincères. S’ils arrêtaient de recevoir du pognon de Soros, ils ne deviendraient pas soudainement anti-migrants.
À fortiori, les juges à la CEDH n’ont aucun pouvoir. Je rappelle que la Turquie se fait condamner 200 fois par an et que la Russie avant de sortir de la CEDH se faisait condamner 2000 fois par an et que ça n’a / n’avait strictement aucun impact sur la politique de ces États.