Lu dans Les 4 Vérités :
"Alain Juppé a récemment invité ses amis politiques pour un séminaire de rentrée à Bordeaux. Cette invitation n’a, en soi, rien d’original. Mais les participants, eux, étaient assez curieux. Etaient, en effet, invités des membres du parti LR, des membres du groupe dit des « Constructifs » (c’est-à-dire ces LR qui « draguent » Macron, pour quelques prébendes), et des personnes qui ont quitté LR pour l’actuelle majorité.
Que tous ces choix soient offerts aux juppéistes en dit déjà long sur le corpus idéologique du juppéisme. Manifestement, les juppéistes, qui semblent toujours hésiter à se dire de droite, pourraient aisément se définir comme membres de « l’UMPS ». Mais le plus significatif de ce séminaire réside sans doute dans la synthèse qu’en fit Alain Juppé lui-même. Sur son blogue (intitulé, sans doute pour faire «jeune», al1jup.com), l’ancien «meilleur d’entre nous » décerne bons et mauvais points et fait planer la menace d’une sécession en cas de victoire – désormais fort probable – de Laurent Wauquiez à la tête des LR.
«Je serai seulement attentif à ce que la formation, […] à la- quelle je suis attaché puisque j’en ai été le premier président, ne franchisse pas certaines lignes rouges: celle de l’incompatibilité absolue avec le FN […] ; sur les questions dites de société et de mœurs, la ligne rouge d’un conservatisme idéologique rétrograde […] ; et bien sûr la ligne rouge de l’hostilité à la construction européenne. »
Sur le dernier point, M. Juppé semble oublier qu’il avait lui-même fondé l’UMP pour permettre à des souverainistes et des européistes de se présenter ensemble aux élections. Désormais, le sectarisme fédéraliste devrait donc être la règle. S’agissant du deuxième point, on aura compris que LR aurait désormais interdiction de s’opposer à la loi Taubira. On peut, bien sûr, considérer qu’il s’agit d’une bonne loi. Mais dénoncer comme scandaleuse l’opposition à une loi que l’on estime mauvaise dépasse l’entendement. Il faut croire que, pour M. Juppé, tout ce que fait la gauche va nécessairement dans «le sens de l’histoire» et ne peut être détruit par la droite. À ce compte, le communisme n’aurait jamais été renversé en Europe de l’Est.
Quant à l’impossibilité de toute alliance avec le FN, elle est absurde. Je peux comprendre que, sur certains points, M.Juppé préfère le programme de M. Macron à celui de Mme Le Pen. Mais comment justifie-t-il que cette « ligne rouge » ait parfois « imposé » de soutenir des candidats communistes pour « faire barrage » au FN. M. Juppé considère-t-il le communisme comme moins grave que le FN?"