Dans le Figaro sur l'abrogation de la loi Taubira, que Luc Ferry estime impossible :
"[…] C'est pourtant tout le contraire qui est vrai et plus encore, nécessaire. Car la loi Taubira a elle-même abrogé un fondement juridique pluri millénaire dont elle dit elle-même dans son exposé des motifs qu'il était si évident qu'il n'était pas écrit: le mariage est l'union devant la société d'un homme et d'une femme dans le but de mettre au monde et d'élever des enfants issus de leur union ou, à défaut, adoptés par eux. Une loi qui n'a pas trois ans, qui abroge un principe aussi ancien, aussi naturel et aussi fécond, ne pourrait pas, à son tour, être abrogée ? Mais au nom de quoi ?
De ce que, d'après le philosophe, «il n'y a aucun doute chez les juristes, on ne peut en France démarier ni désadopter». Mais qui sont ces juristes qui n'ont jamais vu, en marge des états civils, la mention «mariage dissous par jugement en date du….» ou, plus récemment, mais avec un fondement légal certain, «mariage annulé par jugement du…». Certes, ces démariages ne sont pas le fruit de la volonté d'un juge, mais ils ont été rendus possibles par la loi qui prévoit et organise le divorce, ladite loi ayant abrogé la loi précédente qui elle-même avait abrogé sa jumelle, qui encore, etc., jusqu'à la promulgation du premier Code Civil qui, lui, abrogeait allègrement les effets religieux des mariages-sacrements, en vigueur en France depuis au moins six cents ans.
Cela étant dit, de toute façon, nul ne demande l'abrogation avec rétroactivité. Notons, d'ailleurs, qu'en Belgique, où le mariage entre personnes de même sexe existe depuis plusieurs années, 90 % des couples de femmes et 70 % des couples d'hommes divorcent…
Quant aux adoptions dont Luc Ferry dit que, d'ici à 2017, elles se compteront par milliers, on voit que la pratique de la procédure d'adoption, ses lenteurs et ses précautions ne lui sont pas familières ! De surcroît, il indique lui-même qu'avant la loi Taubira, des célibataires homosexuels adoptaient des enfants. Alors, où est l'insoluble problème de l'abrogation de cette loi ?
Un simple regard sur notre Code Civil nous fait voir le nombre des lois abrogées, laissant prévoir l'abrogation possible, voire certaine, de nombreuses lois actuellement en vigueur. Prétendre, à l'avance, sans que le texte nouveau ait été rédigé, analysé, amendé et voté, qu'a priori le Conseil Constitutionnel l'annulera est une présomption qu'aucun juriste, ne pourrait se permettre.
Quant à la Cour européenne des droits de l'homme qui, rappelons-le, n'est pas un super législateur, elle a jugé de façon solennelle, le 16 juillet 2014, que la Convention européenne des droits de l'homme ne contient pas de droit au mariage pour les couples de même sexe. Luc Ferry ne mentionne en outre pas que 14 des 47 Etats du Conseil de l'Europe ont inscrit dans leur constitution que le mariage est l'union d'un homme et d'une femme… ce qui n'est pas tout à fait rien par rapport au sujet traité!
Ce que le philosophe ne dit pas, c'est que cette loi est inapplicable, dans son état présent. Pour qu'elle arrive à ressembler à une loi sur le mariage, avec ce que celui-ci implique pour les enfants, il est évident qu'elle suppose inéluctablement la légalisation de la P.M.A. sans père et de la G.P.A.
Si les personnes mariées selon cette loi avaient consulté, avant de se marier, des juristes prudents, ceux-ci leur auraient dit ce que dit la sagesse: «cette loi ne tient pas compte de la réalité humaine, elle ne durera pas. Si vous voulez passer entre vous des conventions stables, concluez-les vous-même devant notaire, mais ne vous embarquez pas dans cette aventure!» […]"