Les critiques de l'UMP à l'encontre de la primaire organisée par le PS n'ont pas uniquement pour but de jeter le trouble chez l'adversaire politique. Le parti présidentiel compte ainsi prévenir les critiques sur son fonctionnement interne. D'autant plus que la CNIL vient de demander des comptes sur la primaire organisée par les écologistes. Voilà qui joue en faveur de l'option choisie par l'UMP, qui a renoncé à organiser une primaire, alors que cette procédure, plus conforme à la démocratie, tend à se généraliser. De Front de Gauche au Front National, presque tous les partis organisent des élections primaires pour désigner leur meilleur candidat à la présidentielle et favoriser ainsi le débat interne. Sauf l'UMP.
L'UMP n'a pas toujours été contre l'idée de primaire ouverte aux sympathisants. En 2007, elle fut réservée aux militants, mais Nicolas Sarkozy était candidat unique. Nicolas Sarkozy déclarait alors en avril 2005 :
"Il faut en finir avec la vieille politique qui n'a plus aucun rapport avec ce qu'est devenue la France aujourd'hui […]. Je n'hésiterai pas à faire trancher par les adhérents les problèmes et les divisions. J'irai jusqu'au bout de cette stratégie".
Il avait donc fait inscrire le principe d'un vote des militants dans les statuts du parti : "Le Congrès (…) composé de tous les adhérents à jour de cotisation (…) choisit le candidat soutenu par l'Union à l'élection à la présidence de la République." Il semble que cette option soit écartée. Jusqu'en mars 2010, l'UMP assurait qu'une primaire aurait bien lieu aussi pour 2012, ainsi que le promettait Xavier Bertrand, alors patron de l'UMP :
"Quel que soit le statut du candidat, qu'il soit ancien président ou pas, il passera par le vote des militants".
Mais il n'y aura pas de primaire. Peut-être un simple vote de confirmation de la candidature (unique) par les militants.
Instituer des primaires (y compris pour les élections législatives) fait pourtant mécaniquement augmenter le nombre des adhérents. L'expérience américaine (certes imparfaite) montre que les primaires atténuent deux vices principaux :
- Elles rendent une légitimité aux débats internes au sein d’un parti. Elles en font un lieu de convergence entre des citoyens partageant des grandes options, mais ne perdant pas leur liberté de pensée.
- Sans primaires, les partis tendent à être en permanence tournés vers la propagande extérieure, considérant que les débats internes sont des signes de faiblesse et des pertes de temps. Des primaires au contraire les rapprochent du modèle décrit par le Compendium de Doctrine sociale (§413)
"Les partis politiques ont le devoir de favoriser une large participation et l'accès de tous aux responsabilités publiques. […] Les partis doivent être démocratiques en leur sein, capables de synthèse politique et de programmation."
HV
L’UMP a d’une part raison d’attirer l’attention sur ce que le PS fera de son utilisation des listes electorales, et du respect de la loi Informatique & Liberte lors du deroulement de ces primaires. Une piste : fournir un cadre legal officiel pour ces primaires, comme aux US.
Mais l’UMP ne le fera pas pour l’instant, pour les raisons que MJ pointe du doigt.
Je ne comprends d’ailleurs pas la passivite des militants de l’UMP devant les promesses non-tenues en matiere de democratie interne. Meme les faibles pistes democratiques prevues par les statuts (constitution de “Mouvements”, de courants reconnus s’ils obtiennent 10% des voix des adherents) sont restes lettre morte. D’ailleurs, un adherent pourrait-il nous donner des nouvelles du Congres du parti, que les statuts prevoient triennal ? Sauf erreur, le dernier s’est tenu en 2007… ?
Un point de desaccord avec MJ: la designation du president du FN n’est pas une primaire, et ne la remplace pas.
Quant au PCD: par quel biais soutiendra-t-il ou non le projet de Mme Boutin de se presenter ? Y auta-t-il un vrai debat ouvert aux adherents ?
Vraiment, le contraste entre les processus du PS et EELV et ceux des partis de droite est une honte pour ces derniers.
PG
Le problème est que même aux USA, pays de la démocratie locale et directe par excellence, les appareils des partis démocratiques ”tiennent” et verrouillent précisément l’appareil de chaque parti,, et que les candidats ”dissidents” y ont souvent le plus grand mal à s’imposer dans les primaires.
La démocratie directe la plus efficace est celle du référendum, de la proportionnelle et de l’élection locale des fonctions les plus importantes, outre celle d’édiles et gestionnaires de collectivités territoriales, comme les fonctions de responsable de la police, de juge, procureur etc……
Quand le peuple tranche, il peut se tromper, il peut être parfois influencé, mais jamais tout le temps, sur tout ce qui est local et partout, et dans un territoire limité. Et il fait le lien entre ses choix et leurs conséquences locales.
Tandis que les appareils et les partis sont et demeurent dans le domaine de la représentation et des idées générales, celui des programmes théoriques et des propositions nationales, ce qui se joue au niveau de l’administration nationale.
On ne doit donc pas réduire la démocratie aux partis : la démocratie est avant tout le résultat de libertés concrètes, enracinées et locales, avec le pouvoir électif qui les accompagne. Car 95 % des sujets politiques de 90 % des électeurs ont des solutions qui peuvent être mises en oeuvre localement ou régionalement.
HB2
Je crois que l’UMP dénonce à juste titre les modalités de ces primaires qui peuvent aboutir à un flicage des fonctionnaires territoriaux dans les collectivités tenues par les socialistes.
Voir cet article : http://www.thomasjoly.fr/article-primaires-socialistes-un-moyen-de-fliquer-les-fonctionnaires-territoriaux-77270280.html
Olivier M
Le problème n’est pas d’organiser des primaires.
Chaque parti peut (ou devrait) en organiser pour choisir son chef ou son candidat présidentiel.
Mais dans une primaire, ce sont les adhérents à jour du parti considéré qui votent.
Or en l’occurence, le PS veut monter une primaire “ouverte”, incluant les “sympathisants”, déclarés ou pas, et même tous les Français en valeur absolue.
Cela revient donc à faire organiser une consultation électorale nationale…par un parti politique!
Et c’est vraiment là où le bas blesse: le PS n’est pas le ministère de l’Intéreiur et ses militants ne sont pas des fonctionnaires de l’Etat dans l’exercice de leur fonction.
Il y a donc danger grave de livrer à un parti politique les noms de ceux qui viennt voter pour lui comme de ceux qui ne viennent pas.
En l’état, cette “pimaire” qui n’en est pas une est inacceptable.
PEB
L’UMP doit faire face à un problème technique majeur.
Une primaire consisterait à remettre sur la sellette celui que le parti avait soutenu il y a quatre ans.
La suppression de la présidence de l’UMP marque bien l’idée que la véritable direction politique est à l’Elysée.
En réalité, l’UMP est, dans la tradition du RPF, de l’UDR et du RPR, une machine électorale au bénéfice du culte du chef sous couvert de centralisme démocratique.
Les primaires ont été utilisées avec un succès mitigé pour les dernières Régionales. Ce n’est donc pas la panacée. Dans le spectre politique, cette technique est plutôt adapté aux formations de Gauche où la logique partisane prime sur les équations personnelles.
Toutefois, il y a des débats internes à l’UMP, notamment à travers les fédérations professionnelles ou les Jeunes Actifs (trentenaires). Elle porte sur des questions de fond et non pas de personnes. Pour cela, le jugement du Président est plus que nécessaire.
Blanche
Attention, il n’y a pas eu de “primaires” au Front National.
Il y a eu une élection pour désigner le président du parti, ce qui est tout à fait différent.
[Certes, mais il a été précisé par l’un des candidats que le président du parti serait automatiquement le candidat de la présidentielle. MJ]
HV
@ PG:
– Je trouve incongrue votre reflexion selon laquelle “on ne doit pas reduire la democratie aux partis” – alors que ces derniers, essentiels au fonctionnement de la democratie, en sont justement un des maillons les moins democratiques !
– Sur les limites des primaires aux US: oui, le soutien de l’establishment compte, mais bien souvent ce dernier est contredit par les sympathisants. Ils ne “tiennent” pas et ne “verrouillent” pas tant que cela, et les elus en place n’ont pas a vivre dans la peur de perdre une investiture conferee par l’establishment. La perfection n’est pas de ce monde, mais la dynamique interne des partis n’a rien a voir avec celle en France (a fortiori a droite).
– La proportionnelle est-elle plus democratique que le scrutin uninominal a 2 tours ? Certainement pas si les partis ne sont pas eux-memes democratiques, puisque le scrutin de liste leur donne plus de pouvoir que le scrutin uninominal (sauf eventuellement si l’on peut panacher).