Guillaume Bernard, maître de conférence à l'Institut catholique d'études supérieures, analyse pour le Figarovox le résultat de la législative partielle d'hier dans le Doubs :
"Derrière le dilemme des consignes de vote pour une élection dont un parti est éliminé du second tour, se profile un enjeu national crucial: avec qui cette formation est-elle potentiellement prête à gouverner? En effet, les élections redessinent depuis 2012 le paysage politique français; il devient tripolaire: gauches et écologistes, centre et droite modérée, droite radicale. L'ambition des deux actuels partis de gouvernement (PS et UMP) est donc d'être présents au second tour de la prochaine présidentielle contre le FN. Ils partent du principe que cela leur assurera automatiquement la victoire. Vraisemblable, ce scénario n'est pour autant pas certain. En outre, il élude commodément l'étape suivante: les législatives. Si un président nouvellement élu a toujours obtenu, sous la Ve République, une majorité parlementaire, la chose devient plus aléatoire avec la transformation du système partisan.
Car si aucun des trois camps n'obtenait de majorité stable à l'Assemblée nationale, il faudra constituer un gouvernement de coalition. En supposant que la droite modérée gagne la présidentielle, acceptera-t-elle de gouverner avec certaines composantes de la gauche? C'est ce qu'anticipent des dirigeants de l'UMP en préconisant toujours le «Front républicain» contre le FN. Quant à ceux qui avancent la thèse du «ni-ni», leur position confine au nihilisme. Serait-ce l'aveu de leur incapacité à déterminer ceux dont ils sont -bien que ne s'accordant pas sur tout- les moins éloignés? C'est en tout cas le témoignage sinon du vide du moins de l'écartèlement idéologique interne.
Le spectre politique fonctionne par interactions. La progression du FN (due en partie à l'abandon de l'espace idéologique de droite) est telle qu'il n'est pas certain que l'UMP demeure le parti dominant à droite. Cela l'oblige à clarifier ses positions sur des sujets comme le multiculturalisme, le protectionnisme ou encore la fédéralisation européenne. De ces précisions découleront naturellement ses stratégies électorales et alliances gouvernementales, mais également l'endiguement ou l'hémorragie de son électorat de plus en plus séduit par le FN ou à défaut par des alliances avec lui."