"Monsieur G… a ouvert le feu à une seule reprise sur chacune des jeunes femmes. Il est allé recharger, aurait donc pu les achever, mais il n’en a rien fait. Il a même provoqué les secours avant même d’ouvrir le feu. Alors d’où diable le parquet sort-il des indices graves et concordants de l’existence d’une telle intention ? […] Si ces jeunes femmes survivent, ce qui semble devoir être le cas, Dieu merci, on sera plutôt en présence du crime de violences aggravées (par usage d’une arme) ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente […]. Et là, la légitime défense pourra être invoquée.
Certes, certes, dans toute la rigueur du droit, la légitime défense n’est pas débattue dans le cadre de la détention, puisque […] les détenus provisoires sont présumés innocents. Néanmoins, envoyer un ou deux ans en prison une personne qui va peut-être bien bénéficier d’un acquittement pose problème. […] De nombreuses investigations restent à faire ? Je n’en doute pas. Nécessitent-elles la détention de monsieur G… au point que seule celle-ci permet de les mener à bien ? La lecture de l’arrêt permet d’en douter. Il précise qu’il manque l’état descriptif des blessures de la deuxième victime, qu’une expertise médicale sera nécessaire, et qu’il faut s’assurer de l’identité exacte de la deuxième victime. C’est sagesse. Mais en quoi monsieur G… laissé en liberté pourrait-il interférer dans une expertise médicale, ou gêner pour identifier une jeune femme dont lui-même ignore l’identité ?
La protection du mis en examen est mentionnée en creux, puisqu’il dit craindre des représailles. C’est donc pour lui rendre service qu’on l’a incarcéré. J’espère qu’il a dit merci, et qu’on lui présentera la note d’hôtellerie. Plus sérieusement, se fonder sur le danger ressenti par monsieur G… pour le placer en détention, alors qu’on a refusé de prendre en compte ce même danger ressenti sur la légitime défense me paraît franchement discutable. Et quand la cour prend la peine de préciser un peu plus loin que les faits ont eu lieu dans un village qui n’est pas un lieu habituel de délinquance violente, on se demande si on rêve.
Reste l’argument du trouble à l’ordre public. Le liberty killer. C’est un argument génial. Pour le parquet, il marche à tous les coups. Et comme personne ne sait ce que c’est, on peut lui faire dire n’importe quoi. Et d’ailleurs, la cour ne s’en prive pas. “Le trouble exceptionnel à l’ordre public résulte encore de la gravité des blessures infligées aux victimes et décrites ci-dessus, qui affectent la partie basse de l’abdomen”. Pour ne pas troubler l’ordre public, merci de viser la tête. “L’affaire a soulevé une émotion considérable, laquelle se manifeste par des prises de position publiques nombreuses, contradictoires et passionnées”. Heureusement que le législateur a pris le soin de préciser en 2007, à la suite de l’affaire d’Outreau, justement, que “Ce trouble ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l’affaire”.
Quant à l’argument final, selon lequel le maintien en liberté sous contrôle judiciaire “serait perçu comme un signe de tolérance à l’égard de semblables agissements et entraînerait au contraire de nouveaux troubles ; que seule l’importance symbolique attachée à la mesure de détention provisoire est de nature à ramener l’ordre et à rappeler que l’exercice de la violence légale est le monopole de l’État républicain”, on objectera à la Cour que c’est à l’État républicain d’assurer la protection des personnes et des biens, que ce soit la maison de monsieur G…, ou sa personne face à un risque de représailles, qui serait une violation du monopole de la violence légale. Et que la légitime défense est une violence légale, l’État républicain admettant que ses citoyens se défendent eux-même quand il n’est pas en mesure d’y pourvoir. Il devient urgent de supprimer purement et simplement cet “objectif” lié au trouble à l’ordre public qui n’a rien d’objectif. Cette affaire le démontre encore si besoin était.
Monsieur G… n’est ni un héros ni un salaud. […] Peut-être mérite-t-il une condamnation pénale pour ce qu’il a fait. On verra. Mais ce placement en détention me paraît totalement infondé, aucun des arguments me paraissant tenir la route. Ce n’est pas là de la bonne justice."
Maître Eolas défend René Galinier
6 commentaires
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JCM
En dehors de ce débat très technique, ce qui nous intéresse est la raison profonde qui motive les juges à le maintenir en détention. Elle n’est même pas cachée puisque c’est la première qu’ils invoquent pour justifier le trouble à l’ordre public :
“Attendu que les circonstances de la commission des faits caractérisent également un trouble exceptionnel à l’ordre public, en ce que les déclarations de Monsieur G… révèlent qu’ils ont été commis dans un contexte d’exagération sociale et de racisme revendiqué par lui…”
Il ne doit donc pas être libre pour ne pas pouvoir répéter ses propos politiquement incorrects :
« Avec tout ce qu’il se passe à la télé ça me gonfle, on est obligé de devenir raciste et de se défendre. C’est de l’auto défense …
« On est obligé de s’armer, cela s’appelle de l’autodéfense. En Algérie, cela s’appelait de l’auto pacification. Il fallait attendre que l’on nous tire dessus pour riposter. Si la justice faisait son boulot tout ça cela n’arriverait pas… ».
Moralité : même devant un juge la franchise ne sert pas toujours nos intérêts, il faut savoir cacher ses motivations et sentiments.
free
Ne parlons pas des nuisances nocturnes, même dans les quartiers dits résidentiels (aux impôts souvent élevés). J’ai demandé à transférer mes heures de travail, suite à une dépression (à cause des perturbations en plein milieu de nuit, dues à de bruyants rassemblements d'”intouchables”)
Sylvie
Donc, l’action du maintien en détention de monsieur G… relève de la prise d’otages et est illégale au niveau juridique. En principe, il devrait être libéré immédiatement. Le juge des libertés a invoqué des motifs inexistants dans le code pénal et s’est mis hors-la-loi. La famille de ce monsieur devrait normalement porter plainte contre ce juge et engager des poursuites à son encontre pour des motifs infondés qui justifie la prise d’otages…
Gustave Minet
Que la justice, en France, manque de sévérité, en particulier à l’égard des jeunes voyous “issus de l’immigration”, il n’y a guère que des universitaires à l’esprit tordu pour dire le contraire. Prendre le parti des délinquants contre les gens honnêtes n’est jamais qu’un moyen, pour les riches, de se protéger de la vengeance des pauvres. C’est l’esprit républicain, dans toute sa veulerie d’aristocrates apeurés, ce mensonger esprit de compassion qui a poussé des privilégiés à assurer leurs privilèges en se faisant les champions de l’égalitarisme. Mais en France, grâce à Dieu, il n’y a pas que des intellectuels gauchistes. Il y a aussi des âmes droites, qui comprennent que la propriété privée (qui est d’abord celle de notre propre intégrité physique) exige le droit de pouvoir la défendre. Entrer sans autorisation dans une maison et même seulement dans un terrain clôturé, c’est déjà s’exposer à se faire tirer dessus, il faut que délinquants le sachent, et pour qu’ils le sachent, il faut que cela arrive. M. G*** est un sauveur de l’ordre public.
Papon
En fait on redoute surtout que l’affaire soit jugée en Cour d’Assises ce qui provoquerait presque certainement l’acquittement; en Correctionnelle, par contre, des juges complaisants se plieront à la volonté de leur maître.
Robert Marchenoir
Tiens, Eolas est d’habitude bien à gauche, sous des dehors trompeurs de neutralité juridique. Si même Eolas devient nauséabond, où va-t-on…