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Homosexualité : revendication du lobby gay

Mariage : la question n’est pas celle des droits des adultes, mais des devoirs envers les enfants

Nathalie Heinich, sociologue et directrice de recherches au CNRS, publie une tribune dans Le Monde, sur le mariage. Extraits :

"Il est faux d'affirmer que le
mariage est non seulement l'institution organisant la filiation mais
aussi celle reconnaissant une " communauté de vie " : si c'était le cas,
maints pères pourraient se marier avec leur fille, maintes mères avec
leur fils, maints frères avec leur soeur, puisque nombreuses sont les
familles où existe une telle communauté de vie. Ce que reconnaît
l'institution du mariage, c'est l'existence d'un rapport sexuel dans une
communauté de vie, ouvrant donc à la possibilité d'une filiation.

Dans ces conditions, prétendre ne revendiquer le mariage homosexuel que
pour la reconnaissance d'un lien amoureux, et non pas pour la
filiation, revient à exiger de l'Etat qu'il ait un droit de regard sur
la sexualité des personnes (ce que, soit dit en passant, les mouvements
de défense des homosexuels ont longtemps combattu, du temps où
existaient des lois condamnant l'homosexualité). Faut-il accepter, au
nom de l'égalité, que la sexualité entre adultes consentants devienne,
pour tous – hétérosexuels comme homosexuels -, une affaire d'Etat ?
C'est là une conséquence majeure de l'actuel projet de loi, qui
mériterait d'être, pour le moins, discutée.

Concernant,
justement, l'argument de l'égalité : il est faux d'affirmer que le
mariage homosexuel serait conforme à l'exigence d'égalité de tous les
citoyens, car une telle exigence n'a jamais existé, en démocratie, que
sur le plan des droits civiques – le droit de vote en particulier.

[…] Reste la question de la parentalité
: là, le statut des homosexuels n'est pas équivalent à celui des
hétérosexuels, puisque leur sexualité rend problématique l'engendrement,
sauf à pratiquer la bisexualité ou à recourir à des techniques
artificielles.
Nos institutions juridiques ont-elles pour vocation de
compenser les conséquences problématiques que peuvent avoir pour des
individus leur refus de recourir à des arrangements avec l'autre sexe,
en dissociant plaisir sexuel et procréation ? Là encore, le saut logique
et éthique est considérable. Certes, l'on peut toujours modifier une
institution. Mais est-ce parce qu'une modification est possible, ou
parce qu'elle est souhaitée par certains, qu'elle doit être imposée à
tous, au prix de bouleversements dont les implications n'ont pas été
réellement discutées, faute justement de réel débat ou d'arguments
sérieux ?

[…] En l'état de nos institutions, il faut donc admettre
que le mariage homosexuel ne prend sens que dans une revendication de
filiation
: ce qui est d'ailleurs le fondement de l'institution du
mariage, qui consiste initialement (même si cette fonction a été
historiquement élargie par diverses réformes) à donner des parents
légaux (donc une généalogie) à des êtres de chair. Et en effet,
autoriser le mariage homosexuel, c'est ouvrir automatiquement le droit à
l'adoption pour les couples homosexuels.

La question qui doit se
poser alors n'est plus celle des droits des adultes, mais des devoirs
envers les enfants
; et précisément : quel sera leur état civil ?
Auront-ils accès à l'identité de leurs géniteurs ? Leur propre identité
sera-t-elle inscrite dans la différence des sexes qui a présidé à leur
engendrement, ou bien y aura-t-il déni de cette réalité originaire ?
Sachant l'importance des troubles (parfois psychotiques) liés au secret
ou au déni de l'origine, il serait irresponsable de s'engager dans une
ouverture du mariage, donc de la filiation, aux couples de même sexe,
sans réponse claire à ces questions – principe de précaution oblige. Et
ne parlons même pas ici des problèmes posés par la procréation
médicalement assistée (PMA) ou la gestation pour autrui (GPA), qui ne
manqueront pas d'être exigés, toujours au nom de l'égalité. […]"

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