Dans les mois et les années qui suivent, cette union avec le Christ crucifié ne cesse de s’approfondir. Marthe fait nombre d’expériences qui la rangent au rang des grands mystiques. En particulier, toutes les semaines, elle revit la Passion du Christ. Elle reçoit les stigmates et a un contact privilégié avec la Vierge Marie, qui semble lui être apparue souvent. Déconcertée par ces phénomènes, elle a la chance d’être aidée par quelques prêtres, et par des lectures qui l’aideront à se situer.
Dans le même temps, son univers humain s’élargit considérablement. On commence à parler d’elle. On vient la voir. On se recommande à ses prières, on lui demande des conseils. On s’aperçoit qu’elle a un charisme de discernement. Aidée par un bon sens évident et une mémoire phénoménale, elle aide les personnes les plus diverses dans les situations les plus complexes alors qu’elle-même ne mange pas, ne boit pas, ne dort pas et ne vit que de l’Eucharistie. Dans la région de la Drôme et de Lyon, sa réputation perce peu à peu.
Une influence
Le 10 février 1936, elle reçoit la visite d’un prêtre lyonnais : l’abbé Georges Finet (1898-1990). Elle comprend qu’il est l’homme envoyé par Dieu pour l’aider à réaliser une œuvre que la Providence lui suggérait depuis quelques temps : la fondation des Foyers de Charité. Le Père Finet est un remarquable prédicateur, il a un caractère plein d’allant, il n’a peur de rien ni de personne. Éclairé et inspiré par Marthe, il commence à prêcher des retraites à Châteauneuf qui, peu à peu, obtiennent un grand succès. Des laïcs se mettent à sa disposition, d’abord pour s’occuper d’une petite école, ensuite pour accueillir les retraitants. Le premier Foyer de Charité est fondé. À la mort de Marthe, il existe une cinquantaine de Foyers répandus dans le monde entier, regroupant environ 600 membres. C’est une institution très dynamique dans l’Église en un temps de grande crise. Les Foyers de Charité, reconnus en 1986 comme association privée internationale de laïcs, sont à l’origine de quantité de vocations et ont favorisé maintes conversions.
Marthe Robin est au centre de toute cette œuvre. Elle accompagne les Pères et les membres des Foyers, elle aide au discernement des fondations. Mais son influence va plus loin. Elle reçoit dans sa chambre jusqu’à soixante personnes par jour au cours des retraites. La vie de beaucoup d’entre elles en est modifiée. Parmi elles, il y a des dizaines d’évêques, des centaines de prêtres. Marthe aide les fondateurs et fondatrices des ordres religieux nés en France juste après la Seconde Guerre mondiale, puis celles et ceux des communautés nouvelles. Dans la période difficile que traverse l’Église après le Concile Vatican II, particulièrement en France, elle reste ferme et calme. Elle est un point de ralliement pour beaucoup. À sa mort en 1981, des milliers de personnes (dont quatre évêques et plus de 200 prêtres) participent à ses obsèques.
Le procès de canonisation
Le procès de canonisation de Marthe Robin est ouvert dans le délai normal de cinq ans, dès 1986. La phase diocésaine est menée auprès de l’évêché de Valence de 1986 à 1996. Des centaines de témoignages affluent. Sur avis favorable du tribunal diocésain, la phase romaine est entamée en 1996. Un énorme dossier est transmis à Rome où tout est revérifié. En 2010 la Positio, c’est-à-dire le résumé du procès, est approuvée par les instances romaines. Le 7 novembre 2014, Marthe est déclarée Vénérable. De très nombreux témoignages de grâces, de faveurs et même de miracles affluent à Châteauneuf ; la ferme de Marthe Robin est devenue un lieu de visites et de prières très fréquenté. Marthe Robin apparaît ainsi, dans la conscience des chrétiens, comme un des grands personnages de l’Église de France dans le monde de ce temps et, en raison de son influence, une fondatrice pour l’évangélisation des temps à venir.