Voici le message du 15 avril de Mgr Aillet :
1. Les raisons de cette Supplique
Le monde traverse une crise sanitaire grave qui a fait déjà de nombreuses victimes et qui plonge des populations entières dans l’inquiétude et l’angoisse. A la demande de nombreux fidèles laïcs, les conférences épiscopales d’Espagne et du Portugal ont décidé de consacrer leurs pays respectifs au Sacré-Cœur de Jésus et au Cœur Immaculée de Marie, le 25 mars dernier au Sanctuaire Notre-Dame de Fatima, pour demander au Seigneur de mettre un terme à la Pandémie du Covid-19. Plus d’une vingtaine de conférences épiscopales d’Europe et d’Amérique se sont unies à cette consécration.
La France a eu le privilège des apparitions du Sacré-Cœur de Jésus à Paray le Monial. Parmi les messages du Sacré-Cœur à sainte Marguerite-Marie Alacoque, figure la demande d’une consécration de la France. La Basilique du Sacré-Cœur de Montmartre a été consacrée en 1919 et la France a été consacrée au Sacré-Cœur le 17 juin 1945, avec les encouragements du Pape Pie XII.
Face à la crise sanitaire qui afflige notre pays, et dont on ne peut encore évaluer les graves conséquences sociales et économiques, non moins qu’à la crise spirituelle qui traverse notre société française, des associations de fidèles laïcs, de sensibilités diverses, ont pris l’initiative d’une supplique adressée filialement aux évêques de France pour renouveler la Consécration de notre pays au Sacré-Cœur de Jésus, par le Cœur Immaculé et douloureux de Marie. Cette Consécration était proposée initialement pour le dimanche 19 avril, Fête de la divine Miséricorde, instituée par le Pape saint Jean Paul II, selon les révélations du Sacré-Cœur à sainte Faustine. A ce jour, cette supplique compte plus de 56000 signatures.
Mgr Eric de Moulins-Beaufort, Président de la Conférence des évêques de France, qui a salué cette heureuse initiative, a estimé après examen qu’une telle consécration requérant l’assentiment de tous les évêques et l’adhésion des fidèles, ne pourrait être réalisée le dimanche 19 avril et qu’il faudra un plus long temps de préparation pour aboutir, le moment venu, au niveau de la Conférence épiscopale française, ce que je comprends bien ; mais il a indiqué également que plusieurs évêques ont renouvelé cette consécration ou vont la célébrer en leur diocèse pour la première fois.
2. Une consécration « privée » de la France aux Cœurs de Jésus et de Marie
Rien n’empêche donc, dans ces temps particuliers, de se consacrer au Sacré-Cœur de Jésus et au Cœur Immaculé de Marie ou de renouveler cet engagement en ce dimanche 19 avril, et de l’accomplir pour la France, pour ce qui nous concerne. C’est ainsi que, après avoir renouvelé la consécration du diocèse de Bayonne aux deux Cœurs unis de Jésus et de Marie, le 25 mars dernier, je consacrerai la France, depuis ma chapelle privée, aux mêmes deux Cœurs unis, le dimanche 19 avril 2020. Il va sans dire que ma démarche n’engage pas la Conférence des Evêques de France et qu’elle consistera à préparer intérieurement ceux qui s’uniront librement à une Consécration plus officielle de la France, quand le moment sera venu.
Dans sa méditation sur l’évangile de la Tempête apaisée, le 27 mars dernier à Rome, le Pape François a décrit la crise spirituelle qui caractérise notre époque et à laquelle la France n’échappe pas :
« La tempête démasque notre vulnérabilité et révèle ces sécurités, fausses et superflues, avec lesquelles nous avons construit nos agendas, nos projets, nos habitudes et priorités. Elle nous démontre comment nous avons laissé endormi et abandonné ce qui alimente, soutient et donne force à notre vie ainsi qu’à notre communauté. La tempête révèle toutes les intentions d’emballer et d’oublier ce qui a nourri l’âme de nos peuples, toutes ces tentatives d’anesthésier avec des habitudes apparemment ‘salvatrices’, incapables de faire appel à nos racines et d’évoquer la mémoire de nos anciens, en nous privant ainsi de l’immunité nécessaire pour affronter l’adversité ».
Le Pape saint Jean Paul II avait, en son temps, interpellé la France en des termes qui sont restés gravés dans nos mémoires :
« France, Fille aînée de l’Eglise, es-tu fidèle aux promesses de ton baptême ? Permettez-moi de vous demander : France, Fille de l’Eglise et éducatrice des peuples, es-tu fidèle, pour le bien de l’homme, à l’alliance avec la sagesse éternelle ? »(1er juin 1980).
C’était reconnaître, à l’instar de bien de ses prédécesseurs, la vocation chrétienne et la mission spéciale de la France dans le plan de Dieu, comme les multiples interventions de la Providence aux heures les plus décisives de notre histoire semblent le confirmer.
Une démarche personnelle en union avec le Sacrifice de Jésus …
Un acte de Consécration est toujours premièrement une démarche personnelle qui se situe dans la ligne de notre Consécration baptismale : c’est personnellement que l’on décide librement de se consacrer au Sacré-Cœur de Jésus par le Cœur Immaculé et douloureux de Marie. Il s’agit d’abord d’un acte de réparation où l’on satisfait pour ses infidélités à l’alliance d’amour que le Seigneur a instaurée avec nous au jour du baptême. C’est ensuite un acte d’offrande renouvelée de soi au Seigneur, selon les indications de l’apôtre Paul aux Romains : « Je vous exhorte donc, frères, à lui offrir votre corps – votre personne entière –, en sacrifice vivant, saint, capable de plaire à Dieu : c’est là, pour vous, la juste manière de lui rendre un culte » (Rm 12, 1). C’est enfin un acte de confiance en Dieu, dans des circonstances difficiles de notre vie. Cet acte de consécration passe nécessairement par l’unique offrande d’amour de Jésus à son Père, sur la croix, qui est d’abord un sacrifice de réparation ou d’expiation pour nos péchés, « non seulement les nôtres, mais encore ceux du monde entier » (1 Jn 2, 2), et qui est en même temps un acte de confiance absolue et d’obéissance amoureuse à la Volonté de son Père. Une telle consécration n’est donc pas un acte magique ni une simple dévotion, c’est un acte qui engage notre personne dans la radicalité du don de soi à Dieu et aux autres. Elle requiert l’état de grâce qui nous établit dans l’amitié avec Dieu.
… qui s’étend à tous ceux auxquels nous voulons l’appliquer
Mais parce que cette consécration passe par le Sacrifice de Jésus, elle acquiert une valeur rédemptrice pour ceux auxquels nous sommes liés et pour lesquels nous accomplissons cette démarche : nous devenons, en vertu du baptême qui nous unit au Christ et à nos frères, « médiateurs » entre Dieu et les hommes, et, d’une certaine manière, Co-rédempteurs du genre humain ! Notre consécration a valeur d’intercession pour les hommes et nous crions avec le Christ, en prenant sur nous une part de sa peine : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23, 34). Voilà comment nous pouvons intentionnellement englober la France, notre patrie, dans notre consécration personnelle. Ce qui exige, non seulement que nous apportions le repentir de nos péchés, mais que nous nous unissions à son Sacrifice par un acte de pénitence et un vrai désir de nous convertir.
Une Consécration aux deux Cœurs unis de Jésus et Marie
En même temps que nous nous consacrons au Sacré-Cœur de Jésus, « ce Cœur qui a tant aimé les hommes … et qui n’en reçoit qu’ingratitude, surtout de la part de ceux qui lui sont consacrés » (Le Sacré-Cœur de Jésus à Sainte Marguerite-Marie Alacoque), nous nous consacrons au Cœur Immaculé de Marie : en nous unissant à la Passion du Christ, nous nous unissons en même temps à la Compassion de Marie ! Elle est la Nouvelle Eve, que Dieu a créée de toute éternité pour être l’aide qui soit assortie au Nouvel Adam (cf. Gn 2, 18) : elle participe d’une manière unique et singulière à la Rédemption du monde, comme Co-Rédemptrice universelle du genre humain. Depuis le jour de l’Annonciation, son « Me voici – Ecce ancilla Domini, fiat mihi… » est inséparable du « Me voici – Ecce venio » du Christ, que l’auteur de la lettre aux Hébreux a mis dans la bouche du Verbe, en entrant dans le monde : « Tu n’as voulu ni sacrifice ni offrande, mais tu m’as formé un corps. Tu n’as pas agréé les holocaustes ni les sacrifices pour le péché ; alors, j’ai dit : Me voici, je suis venu, mon Dieu, pour faire ta volonté » (Ps 39, 7-9 ; He 10, 5-7). Du haut de la croix, Jésus nous a donné sa Mère – « Femme, voici ton fils … Voici ta Mère » (Jn 19, 26-27), pour qu’elle nous apprenne à entrer avec elle dans le Sacrifice de Jésus.
3. L’opportunité de cette Consécration en temps d’épreuve
C’est dans ce sens, qu’en renouvelant notre Consécration personnelle aux deux Cœurs unis de Jésus et de Marie, nous pourrons leur consacrer la France, notre patrie qui nous est chère. Les malheurs qui s’abattent sur nous ne sont pas voulus par Dieu, mais, s’il les permet, lui qui est Tout-Puissant, c’est parce qu’il est assez bon et puissant pour tirer le bien du mal lui-même. L’Ecriture Sainte nous invite à y voir, non pas un jugement définitif ou une condamnation, mais des leçons ou des corrections du Seigneur pour nous appeler à nous convertir : « Quel est le fils auquel son père ne donne pas des leçons ? » (He 12, 7). Nous pouvons ainsi ressaisir nos épreuves comme un appel à la conversion qui est la première expression de la Miséricorde divine ! C’est ainsi que le Pape François, dans sa méditation du 27 mars dernier écrivait : « Seigneur, durant ce temps (de Carême), ton appel urgent résonne : ‘Convertissez-vous’, ‘Revenez à moi de tout votre cœur’ (Jl 2, 12). Tu nous invites à saisir ce temps d’épreuve comme un temps de choix. Ce n’est pas le temps de ton jugement, mais celui de notre jugement … C’est le temps de réorienter la route de notre vie vers toi, Seigneur, et vers les autres ».
4. La pertinence du dimanche de la divine Miséricorde
Le Dimanche de la Miséricorde, cette consécration prend tout son sens. Nous y contemplons la réponse suprême du Père à la prière du Fils sur la croix, « dans un grand cri et des larmes » (He 5, 7) : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’ils font » (Lc 23, 34) ! Comme le dit le prophète Isaïe, dans le quatrième chant du Serviteur de Yahvé : « Car il s’est dépouillé lui-même jusqu’à la mort, et il a été compté avec les pécheurs, alors qu’il portait le péché des multitudes et qu’il intercédait pour les pécheurs » (Is 53, 12). Par son sacrifice, il a satisfait surabondamment pour les péchés des hommes et la Miséricorde infinie a jailli de son Cœur transpercé ! Le bon larron, ce brigand pour qui ce supplice était justice, en a été le premier bénéficiaire : « En vérité, je te le dis : aujourd’hui, avec moi, tu seras dans le paradis » (Lc 23, 43). Lorsqu’il apparaît ressuscité à ses disciples, qu’il appelle désormais ses « frères », non seulement il n’a pas une parole de reproche pour l’avoir abandonné ou renié, mais il leur dit : « La paix soit avec vous » ! Et en soufflant sur eux, il leur communique l’Esprit Saint et il leur donne le pouvoir de pardonner les péchés (cf. Jn 20, 19-23).
Après nous être préparés à cette Consécration par la neuvaine à la Miséricorde divine de sainte Faustine – où nous avons amené à la source de la Miséricorde qu’est le Cœur de Jésus, pour les y plonger, tour à tour les pécheurs, les âmes sacerdotales et religieuses, les âmes pieuses et fidèles, les païens qui ne le connaissent pas encore, les hérétiques et les apostats, les âmes douces et humbles et les petits enfants, les âmes des souffrants, les âmes du Purgatoire, les âmes indifférentes et froides qui blessent le plus douloureusement son Cœur –, nous consacrerons notre pays avec une grande confiance en sa Miséricorde, en répétant inlassablement la prière de Jésus : « Père, pardonne-leur : ils ne savent pas ce qu’il font », et l’invocation de sainte Faustine : « Jésus, j’ai confiance en toi ! ». Et nous demanderons qu’en vertu de cette Consécration renouvelée, le Seigneur nous immunise contre le découragement et, s’il le veut, mette un terme à cette Pandémie.
Comme cela nous a été proposé par l’association « Civilisation de l’amour » qui porte cette supplique, nous pouvons nous y préparer, chaque jour, en récitant la prière du petit Marcel Van pour la France et une prière de consécration personnelle :
« Seigneur Jésus, aie compassion de la France, daigne l’étreindre dans ton Amour et lui en montrer toute la tendresse. Fais que, remplie d’Amour pour Toi, elle contribue à te faire aimer de toutes les nations de la terre. Ô Amour de Jésus, nous prenons ici l’engagement de te rester à jamais fidèles et de travailler d’un cœur ardent à répandre ton Règne dans tout l’univers. Amen ».
« Seigneur Jésus, Toi qui es venu allumer un feu sur la terre, je m’abandonne aujourd’hui à la volonté du Père et au souffle de l’Esprit. Purifie mon cœur, embrase-le d’amour et de charité, fais grandir en moi le désir de sainteté. Et par le Cœur Immaculé de Marie, je me consacre tout entier à ton Cœur pour t’aimer et te servir ».
Pour ceux qui voudront s’unir à la Consécration privée que je ferai de la France aux deux Cœurs unis de Jésus et de Marie : j’accomplirai cette démarche à l’issue de la Messe que je célébrerai dans ma chapelle de l’évêché, le dimanche 19 avril à midi, que l’on pourra suivre en direct en cliquant sur le lien disponible sur le site du diocèse de Bayonne www.diocese64.org. Je répète qu’il ne s’agit pas de la Consécration officielle des évêques de France qui est reportée.
F. JACQUEL
Peut-on supposer que, le 19 avril étant le dimanche de la Miséricorde, la CEF, par la voix de son Président, estime la fête trop solennelle pour profiter de l’occasion pour une Consécration solennelle par l’ensemble des Évêques, chacun dans son Diocèse, aux deux Cœurs de Jésus et de Marie ?