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France : Laïcité à la française

Notre-Dame de qui ?

Notre-Dame de qui ?

Du père Danziec dans Valeurs Actuelles :

Il y a les prises de vue où la beauté inouïe de Notre-Dame retrouvée se découvre. Et il y a, en négatif photographique, ce que renvoie à chacun de nous la cérémonie de réouverture de la merveille de l’île de la Cité. Laurent Dandrieu, l’impeccable rédacteur en chef des pages culture de Valeurs Actuelles, le résume en ces termes précis :

« La cérémonie de réouverture de Notre-Dame de Paris témoigne que nous autres postmodernes sommes le contraire de ce que nous croyons être : nos propres créateurs, absolument libres de tout passé, alors que nous sommes enfants de Dieu et, comme l’ont souligné Macron et le pape, avant tout des héritiers ».

Le Président de la République affirmait en effet que la cathédrale de Paris témoigne qu’un passé, plus grand que nous, nous précède, quand le pape, dans sa lettre rédigée pour l’événement, appelait à se réapproprier l’héritage de notre foi. Comme si Notre-Dame, en mère et maitresse de bon sens, enseignait à tous et avec le tact d’une souveraine pédagogue que la tradition nous gouverne. Et que, bien plus, elle nous édifie.

« Qui veut l’aimer a sa place sous son manteau de pierre. »

Tel est l’immense paradoxe de la renaissance de Notre-Dame de Paris. Son incendie n’a pas seulement ravagé son sanctuaire, il a aussi provoqué des lésions dans le cœur des Français. Son colossal chantier a fait s’investir ouvriers et artisans comme jamais, en plaçant sous nos yeux ébahis des savoir-faire d’autrefois que l’on croyait oubliés. Et voici que les puissants se pressent dans sa nef, qu’un personnel politique plus habitué des loges que des églises se serre sur ses bancs. Marion Cotillard clame du Victor Hugo sous ses voutes. Vianney revisite l’Hallelujah de Leonard Cohen pour l’occasion tandis qu’un Garou grisonnant remonte le temps des cathédrales sur son parvis. La Vierge Mère est ainsi. Elle a toujours accueilli ses enfants, sans exclusive. Qui veut l’aimer a sa place sous son manteau de pierre. Il n’empêche, Michel De Jaeghere a bien raison dans son éditorial du Figaro Hors-Série sur Notre-Dame de mettre le doigt sur l’incohérence qui traverse le carré des VIP de la cérémonie de réouverture :

« Ceux qui se bousculent aujourd’hui devant les caméras sont ceux qui ont tourné le dos avec le plus d’enthousiasme à la France chrétienne dont elle est l’emblème ».

Car si sa flèche se plonge dans le ciel pour en infuser les grâces, de quelle Notre-Dame s’agit-il ? Celle d’un spectacle télévisé, fût-il léché ? Celle d’un entre-soi qui se regarde pour mieux se féliciter de lui-même ? D’une remise à niveau de notoriété présidentielle abimée ?

« Régente du pouvoir et des renversements (…) Nous n’avons plus de goût pour les départements/Ni pour la préfecture et pour la capitale » écrivait Péguy.

De qui Notre-Dame est-elle sinon celle des petits et des sans-grades. Des fragiles et des dépendants. Notre-Dame de tous ceux qui acceptent de recevoir son Fils comme Père. En un mot, elle est Notre-Dame des humbles, des discrets et des anonymes.

Evidemment que Notre-Dame est le témoin séculaire de notre histoire nationale ! « La paroisse de l’histoire de France » selon la jolie formule de Guillaume Cuchet. Mais elle est surtout – et au premier chef – la rampe de lancement d’une aventure spirituelle. Son terrain de jeu, c’est le sacré. Son occupation favorite, l’union à Dieu. D’un Claudel debout dans la foule, près du second pilier, frappé par la grâce un soir de Noël jusqu’à tous les inconnus qui, suffisamment perméables, se laisseront toucher à l’intime, dans le secret d’une visite, loin des écrans et des selfies.

Notre-Dame des humbles et des sans-grades

A cet égard, le pape François, en saluant le travail remarquable des nombreux corps de métier qui ont œuvré au relèvement de Notre-Dame soulignait ce qui échappe aux suffisants et aux superbes :

« Il est plus beau encore que nombre d’ouvriers et d’artisans aient témoigné avoir vécu cette aventure de la restauration dans une authentique démarche spirituelle. Ils se sont mis sur les traces de leurs pères dont seule la foi, vécue dans leur travail, a pu édifier un tel chef d’œuvre où rien de profane, d’inintelligible ni de vulgaire n’a sa place. »

Témoignage d’espérance

Sans doute est-ce la délicatesse de Notre-Dame de remémorer – ou d’apprendre – aux petits Français, par ce drame dépassé et le miracle de sa restauration, qu’elle est Notre-Dame des grands abandons et non des petits arrangements, Mère des espérances et non des fatalités, Gardienne de beauté et non repaire du médiocre, Tabernacle vivant de la divinité et non temple statique de pierres sculptées.

Que son témoignage, au-delà des flammes et son visage retrouvé renforcent le courage des battants et donnent au peuple de France la foi nécessaire en son redressement. « Un peu de feu dans quelque coin du monde et tous les miracles de grandeur restent possibles ». Oui, Notre-Dame de tous ceux qui vous aiment, soyez bénie.

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