De Gérard Leclerc dans France catholique :
La situation du Liban, pris en otage par le Hezbollah, a de quoi inquiéter, nous autres Français, tant les liens avec ce pays tiennent à notre histoire la plus ancienne. C’est, en effet, Saint Louis qui, au cours d’un séjour sur place, décida d’attribuer aux chrétiens de la région une protection égale à celle de ses sujets du royaume de France.
Ainsi s’établit la mission de protection des chrétiens d’Orient, à laquelle nous n’avons jamais renoncé, en dépit de toutes les vicissitudes. Le fait que la Société des nations ait investi la France d’un mandat sur la Syrie et le Liban en 1920 se comprenait aussi dans le fil d’une tradition bien établie.
« Pays étranglé »
L’évolution accomplie au cours des dernières décennies a malheureusement brouillé les perspectives. Le nombre de chrétiens libanais n’a cessé de se réduire, au point que, selon le patriarcat maronite, ils ne représenteraient plus que 19,4 % de la population. Ce chiffre s’explique par un exil massif. Les chrétiens représentent 80 % de la diaspora libanaise dans le monde, qui est de l’ordre de 15 millions.
Pourtant, on a cru un certain temps que ce pays pourrait constituer un modèle de cohabitation entre communautés, du fait d’un système institutionnel qui accordait aux chrétiens et aux musulmans une sorte de parité pour la conduite du pays. Mais les choses se sont dégradées, de guerre civile en occupation de fait du pays par une organisation islamiste, dont la finalité est la destruction de l’État d’Israël. Pour reprendre l’expression du spécialiste de géopolitique Vincent Hervouët : « Le Liban est un pays fantôme, comme un arbre mort étranglé par le lierre. » Les derniers événements, avec l’offensive de Tsahal contre son ennemi installé sur le territoire libanais, n’ont fait que renforcer la fragilité d’un pays impuissant à maîtriser sa situation interne.
Multiconfessionnalisme en question
Il n’est malheureusement pas sûr que les dirigeants français soient en mesure d’agir pour la sauvegarde d’un pays dont le passé nous a rendus indéfectiblement solidaires. Leurs dernières initiatives se sont soldées par autant d’échecs. On en est aujourd’hui à déplorer un phénomène de « libanisation » qui conduit à l’éclatement du tissu social et dont on redoute les effets chez nous. Pour beaucoup d’observateurs, le Liban offre, en effet, la démonstration d’un pays multiconfessionnel, condamné à une guerre intestine permanente.
Nous sommes en présence d’un défi de civilisation dont la nature est religieuse, l’islam constituant un modèle inassimilable, même à longue échéance. Puissions-nous, avec nos frères chrétiens libanais, invoquer l’intercession de saint Charbel pour desserrer cette étreinte mortelle, dans la perspective d’une paix bien problématique.