Partager cet article

L'Eglise : L'Eglise en France

Pâques, une leçon pour notre époque

Pâques, une leçon pour notre époque

Du père Danziec dans Valeurs Actuelles :

Le catholicisme semble connaître, en France, un certain regain spirituel ces dernières années. S’agit-il un feu de paille ? Ou l’aveu inattendu d’une crise intérieure profonde que beaucoup se refusaient, jusqu’alors, de voir ?

Il n’y a pas que les enfants qui le savent : les œufs de Pâques les plus savoureux contiennent en leur cœur des friandises attendues. Il en va de même pour les articles de Jean-Marie Guénois, spécialiste des questions religieuses pour Le Figaro. Dernier exemple en date, l’entretien, publié à l’occasion du week-end pascal, qu’il a rondement mené avec le religieux dominicain et Youtubeur frère Paul-Adrien. Au menu de l’interview : le carême en tendance, l’augmentation significative du nombre de catéchumènes, le rayonnement de l’Evangile par la médiation des réseaux sociaux mais aussi la question des scandales dans l’Eglise et l’enjeu de la crédibilité de l’institution ecclésiale. Un check-up complet de l’état de santé de la foi chrétienne dans l’hexagone.

Pour les observateurs attentifs, ce qui se passe actuellement,dans l’univers catholique français, surprend et interroge. Alors que jamais, sans doute, l’Eglise en France n’avait subi pareille déroute publicitaire – la sortie de l’ouvrage Abbé Pierre : la fabrique d’un saint de Laetitia Cherel et Marie-France Etchegoin, le jour significatif du Jeudi Saint, en est le dernier avatar –, les pratiques religieuses populaires reviennent en force, à l’instar des processions, des pèlerinages ou des chemins de croix en plein air. La mise en lumière de désordres d’une partie du clergé et de leur gestion parfois problématique aurait dû, en toute logique, étioler a minima les conversions au catholicisme et frapper l’ensemble des prêtres de suspicion.Ce n’est pourtant pas ce qui se passe absolument. Comment même expliquer l’intérêt grandissant des jeunes générations pour les questions religieuses touchant au christianisme ? Hier soir, ils étaient 17 788 adolescents et adultes à recevoir le baptême. Un chiffre que nul n’aurait envisagé il y a cinq ans.

Dieu n’est pas mort

A l’heure où tout change et où une information, aussitôt transmise, se trouve chassée par une autre, la Bonne Nouvelle du Seigneur est-elle appelée à subir le même sort ?Dit autrement : cet engouement pour le Christ et son message, relève-t-il d’un simple effet de mode ou d’une véritable lame de fond ? On mesure le vertige que provoque une telle interrogation. Il faut bien admettre que les questions existentielles, appartenant au domaine de l’intime, bien malin qui se prétendrait capable de sonder les reins et les cœurs. Il n’empêche, le frère Paul-Adrien voit juste lorsqu’il constate : « Le grand corps social, athée, militant est en train de fondre au soleil. Le christianisme, avec la figure de Jésus, est redevenu une réponse possible. »

Très certainement, c’est là que réside le plus intéressant de la situation présente. L’homme, animal religieux malgré lui, ou à ses dépens selon certains, reste habité par le vertige de sa condition. Des interrogations relatives à son devenir, à l’au-delà et à la portée de ses actes, ne cessent de le traverser ou finissent, s’il avait voulu les chasser, par lui revenir en boomerang. De Descartes à Rousseau, la modernité s’était attachée à reléguer Dieu à la sphère privée. La postmodernité, plus pernicieuse, ambitionnait d’arracher aux hommes le désir même de Dieu. La révolution sexuelle de mai 68, la marchandisation du confort promue par la société de consommation, le culte de l’homo festivus fustigé par Murray et la promotion du bien-être qui s’étale sous nos yeux laissaient penser que la partie était gagnée. Ce n’est pas faute pourtant d’avoir été prévenus par Saint-Exupéry : « On ne peut plus vivre de frigidaires, de politique, de bilans et de mots croisés ». Oui, Dieu n’est pas mort. A l’heure de Pâques, une fois encore, il se rappelle à nous.

Boue existentielle des réseaux sociaux

Bien sûr, les réseaux sociaux avec leurs algorithmes et leur mode de procéder entraînent leurs utilisateurs dans une forme de dépendance. Assurément, ils charrient dans leurs cortègeleurs lots de facilités, d’erreurs, de dégâts affectifs, d’affaiblissements de la réflexion, de replis sur soi-même. Mais ils offrent aussi, dans cette boue existentielle, un miroir de ce que l’on ne peut trouver qu’ailleurs. Rien ne saurait remplacer le don de soi, une poignée de main offerte, un sourire partagé, un service rendu, une prière accomplie dans le secret de sa chambre, à l’image de Maximus qui, dans le film Gladiator, ne manque pas de se relier à sa femme et son fils par le langage de son âme.

La grâce de la Résurrection, hier comme aujourd’hui, vient nous rappeler que rien ne saurait remplacer le sacrifice et l’amour. En un mot comme en cent, rien ne saurait remplacer Dieu. Comme le négatif photographique permit au linceul de Turin de dévoiler ses secrets, les réseaux sociaux permettent,en creux, de montrer les aspirations qu’ils ne sauront jamais combler. Ils orientent, sans en avoir conscience, vers une issue de secours, une porte de sortie qu’ils pensaient pouvoir masquer : celle du réel. Or le réel, le voici : le cœur humain, avec ses besoins profonds, réclame de croire aux étoiles, aux signes, au surnaturel, à l’éternité.

A la mort du Christ, tout semblait contraire à ses disciples. Ses plus proches – ses apôtres à l’exception d’un seul, l’avaient ou trahi, ou renié, ou abandonné. Pitoyable spectacle. Tout donnait en effet le sentiment d’un grand gâchis, d’une aventure manquée. Et pourtant.

En ce jour de Pâques, il n’est pas interdit de se le demander : et si cette grand débandade spirituelle de ces dernières dizaines d’année ne sonnait pas l’heure d’une révolte des consciences ? Et si, finalement, après avoir fait le choix de compter sur lui-même, il n’était pas temps, pour l’homme, de revenir à des choses plus sérieuses ? Et s’il n’était pas temps, pour l’homme, de s’en remettre à ce qui le dépasse et qu’on appelle Dieu ? Les sceptiques attendront, comme toujours. Mais les croyants, eux, savent par la foi qui les habite, que Dieu n’a pas dit son dernier mot. Et c’est dans cette intime conviction que toute espérance invincible prend sa source.

Partager cet article

Nous utilisons des cookies pour vous offrir la meilleure expérience en ligne. En acceptant, vous acceptez l'utilisation de cookies conformément à notre politique de confidentialité des cookies.

Paramètres de confidentialité sauvegardés !
Paramètres de confidentialité

Lorsque vous visitez un site Web, il peut stocker ou récupérer des informations sur votre navigateur, principalement sous la forme de cookies. Contrôlez vos services de cookies personnels ici.


Le Salon Beige a choisi de n'afficher uniquement de la publicité à des sites partenaires !

Refuser tous les services
Accepter tous les services