Extrait d'un excellent article trouvé sur Contre-Débat :
"« On est des citoyens comme les autres », affirment nos deux messieurs, comme pour proclamer un argument massue qui rendrait à lui seul scandaleuse la législation actuelle sur le mariage. Certes, ils sont des citoyens comme les autres – personne ne peut le contredire. Mais justement, étant des citoyens comme les autres, ils ont, comme tous les autres citoyens, le droit de se marier avec une personne de sexe opposé. Il n’y a ici aucune discrimination – au contraire, c’est, pour une fois, l’égalité la plus parfaite qui s’applique : riches, pauvres, noirs, blancs, chanceux, malchanceux, parisiens, provinciaux, sachez-le : vous pouvez tous vous marier avec une seule personne (à la fois, du moins) et de sexe opposé ! Pour qu’il y ait « discrimination », en effet, c'est-à-dire inégalité, il faudrait qu’à situation similaire, le traitement soit différencié. Objection : c’est le cas. Un homosexuel ne peut pas se marier, car seuls les hétérosexuels le peuvent : inégalité, discrimination, horreur. Nous répondons laconiquement : faux. Un homosexuel peut tout à fait se marier, de même qu’un hétérosexuel, avec une personne de sexe opposé. L’égalité entre eux est juridiquement parfaite.
L’objection précédemment relevée est en fait plus profonde, car elle sous-entend qu’il y a équivalence entre le fait pour un homosexuel de se marier avec un autre homosexuel et le fait pour un hétérosexuel de se marier avec un autre hétérosexuel. Dès lors, si le mariage homosexuel n’est pas autorisé, il y a juridiquement, certes, égalité, mais il n’y a en aucun cas équité. D’où la discrimination. Voilà comment tourner l’argument de manière intéressante – il est dommage que nous soyons obligés de le faire à leur place. Mais, là encore, de gros problèmes subsistent. En effet, cette théorie revient à donner une valeur juridique à la relation entre les personnes plus qu’à la personne elle-même. On considère ici l’union de mariage, plus que le droit de la personne à se marier. Dans ce raisonnement, c’est en tant qu’il y a homosexualité ou hétérosexualité que l’on se marie, non en tant qu’individu choisissant le mariage. Soyons très concrets. Un homosexuel peut se dire « j’ai en tant qu’individu le droit de me marier, mais je ne le souhaite pas car je n’ai pas envie de fréquenter quelqu’un du sexe opposé ». L’individu, libre de se marier ou non, prime dans ce raisonnement. Mais il peut aussi se dire « je n’ai pas le droit de me marier, car le mariage pour moi n’a aucun sens s’il est contracté avec une personne de sexe différent ». C’est ici la relation (homosexuelle) qui prime. Ce raisonnement est anti-individualiste. Cet homosexuel ne se considère plus comme un citoyen de 1789, revendiquant des droits individuels et égaux pour tous (« Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits », « tous les citoyens [sont] égaux » aux yeux de la loi, rappelle la déclaration des droits de l’homme et du citoyen dans ses articles I et VI). Il veut des droits différenciés en fonction des différentes relations qui unissent les individus. Pour toutes ces raisons, il faut bien comprendre que l’argument qui consiste à faire de l’absence de mariage homosexuel une discrimination est en réalité profondément antirépublicain. Certains homosexuels ne s’y trompent d’ailleurs pas, et refusent le mariage homosexuel, argumentant comme ceci : « Au lieu de laisser la liberté sexuelle prospérer, s'épanouir, [au lieu, donc, de conserver le primat de l’individu qui fait ce qu’il veut, ndlr] on cherche maintenant comment la ranger dans de vieilles boîtes », appelées « le cadre préétabli du mariage et de la vie de famille », c’est-à-dire un cadre qui privilégie la relation et le corps social sur l’individu – on est dans l’anti-modernité. « On est des citoyens comme les autres ». Certes, mais cela veut dire que, comme tous les autres citoyens, vous êtes soumis à une loi qui est la même pour tous. Sauf si vous êtes anti-individualistes, mais alors il ne fallait pas employer le terme de « citoyen ». Raté pour cette fois."
« On se marie parce qu'on s'aime » affirment aussi nos deux individus. […] Le mariage civil est un acte juridique. Nulle mention, dans le Code civil, de la nécessité d’un quelconque « amour » pour se marier : l’article 146 prévoit seul qu’« il n'y a pas de mariage lorsqu'il n'y a point de consentement » […]. En effet, dans une société où l’individu prime sur la relation, le consentement est la base de tout. Cet article montre bien que le mariage est un contrat juridique, dont tout sentimentalisme amoureux est absent. Et en effet : la société n’a pas d’intérêt spécifique à reconnaître l’amour qui unit deux de ses membres : c’est une affaire privée. En revanche, elle a grand intérêt à reconnaître que « les époux assurent ensemble la direction morale et matérielle de la famille. Ils pourvoient à l'éducation des enfants et préparent leur avenir » (article 213). Parce qu’éduquer des enfants et s’occuper d’une famille coûte très cher, à la fois humainement et pécuniairement. En échange de ce « service rendu », il est donc tout naturel que la société accorde à l’homme et à la femme certains avantages conférés dans le cadre du mariage. […] L’enjeu est le suivant : une « famille » homosexuelle peut-elle apporter autant à la société qu’une famille hétérosexuelle ? Ce serait difficile, car les homosexuels ne peuvent avoir d’enfants. Réponse : on autorisera l’adoption. Mais c’est un processus difficile et long. Reste encore à savoir s’il n’est pas meilleur pour un enfant d’avoir deux parents de sexes opposés. En fait, le seul argument qui tienne est : « nous voulons le mariage, parce que nous voulons l’adoption ». Mais ce n’est étrangement jamais celui qui est développé.Pour cela, en effet, il faudrait davantage d’honnêteté. Il faudrait arrêter de prendre tous ceux qui s’opposent à une prétendue « marche de l’histoire » pour d’affreux réactionnaires favorables aux discriminations, « homophobes » et profondément « fermés ». Il faudrait accepter le débat, la contradiction, la réflexion. Tout ce que les associations homosexuelles, et beaucoup de journalistes, comme le montre si bien cet article de L’Express, ont toujours refusé."